Le Maréchal Jourdan
mettre les maréchaux au courant que du
strict nécessaire des rôles qu’ils auraient à jouer, se réservant de leur en
apprendre davantage au fur et à mesure du développement des opérations.
Soult, tout en accusant réception de ses instructions partielles, crut devoir faire remarquer
qu’elles étaient en contradiction avec celles de Napoléon qui préconisait une
bataille rangée à laquelle participeraient l’ensemble des troupes françaises. Mais
il semble que même ainsi, il comprit l’essence du plan de Jourdan et déclara
qu’il allait exécuter sans arrière-pensée les mouvements qu’on lui
demandait. Quant à Napoléon, le risque était trop grand de voir le courrier qui porterait le
plan tomber aux mains de l’ennemi pour qu’on l’en avertît. Au
demeurant, au même moment en Autriche, l’empereur avait d’autres soucis
en tête que les problèmes espagnols. Il était entièrement absorbé par les préparatifs de la
bataille qui allait lui permettre de réparer le demi-échec qu’il avait subi à
Essling.
*
Après avoir forcé Soult à évacuer le Portugal, Sir Arthur Wellesley, remontant la vallée du
Tage, avait pénétré en Espagne dans le courant du mois de juin 1809. Toutefois, devant
le manque total d’opposition de la part des Français, il avait progressé avec
beaucoup de prudence. Ce fut seulement le 10 juillet, à Plasencia, qu’il
opéra sa jonction avec l’armée espagnole, pompeusement nommée « du
centre », commandée par Don Grégorio Cuesta, Grand d’Espagne et capitaine
général d’Estrémadure. Plein de morgue et de suffisance, cet homme de soixante-dix
ans n’avait pourtant jamais connu sur le plan militaire que des revers. Il appuyait
ses prétentions d’entrer bientôt botte à botte aux côtés de Wellesley dans Madrid,
en triomphateur sur son armée. Elle comptait trente mille fantassins, sept mille cavaliers et
soixante-dix pièces de canon. De plus, Cuesta espérait bientôt être renforcé par le corps de
Venegas, fort de vingt-six mille hommes. Il semblait ignorer que ce dernier, alors campé sur
les rives de la rivière Guadiana, était « marqué » par une partie du
4 e corps, commandé par Sebastiani, et allait être refoulé loin du théâtre
d’opérations dans les semaines suivantes.
Les deux généraux alliés ne savaient pas que, quatre jours avant leur rencontre, Napoléon
avait battu les Autrichiens à Wagram. Après avoir passé en revue les régiments espagnols,
Wellesley se vit confirmé dans ses doutes quant au succès de l’opération sur Madrid.
Ensemble, les deux généraux quittèrent Plasencia, le 17 juillet, mais
l’Anglais laissa Cuesta s’engager seul sur la route de Madrid, avec
vingt-quatre heures d’avance sur lui. L’Espagnol
n’allait pas tarder à se heurter à Victor et à rétrograder en toute hâte sur son
allié. Ils se retrouvèrent devant la ville de Talavera. À ce moment, Wellesley ignorait encore
tout de la marche de Soult. Toutefois, il décida de suspendre sa progression, malgré les
supplications de Cuesta, et de se retrancher solidement sur les collines bordant la route de
Talavera à Madrid. Au demeurant, et cela lui avait donné à réfléchir, les habitants de Talavera
avaient accueilli plutôt froidement des alliés que précédait une solide réputation de
pillards.
Ses rapports d’éclairage avaient appris à Wellesley que
l’armée du maréchal Victor avait vraisemblablement reçu des renforts.
C’était exact. Le roi, accompagné de Jourdan, d’une division
d’infanterie (Dessolles) et d’une partie importante du corps de
Sebastiani, avait rejotit le duc de Bellune qui avait déployé son armée face à celle des
alliés, de l’autre côté de la route de Talavera à Madrid que longeait un ruisseau,
l’Albareche.
Le maréchal Jourdan ayant parcouru le terrain et examiné attentivement
les emplacements des armées conseilla au roi de demeurer sur sa position qui était forte en
barrage, aussi longtemps que nécessaire, pendant que Soult effectuerait son mouvement
d’encerclement. Il estimait, probablement avec raison, que les Anglais, après
s’être retranchés dans les collines, adopteraient une tactique défensive et ne
passeraient pas à l’attaque, jugeant cette formule trop hasardeuse. Joseph semblait
vouloir accepter la manière de voir de Jourdan qui était
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