Le Maréchal Jourdan
disposait à ce moment d’une armée
composée de sujets britanniques (surtout des Irlandais), de mercenaires hanovriens et de
Portugais, estimée à cinquante-cinq mille combattants et appuyée sur
soixante pièces de canon. Pour lui faire face, Marmont n’avait que quarante-cinq
mille hommes mais un léger avantage en artillerie (soixante-quatorze canons).
Par vanité autant que par méconnaissance de ses ennemis ou du terrain, le duc de Raguse
entendit agir seul et ne sollicita pas l’appui de ses camarades ou du roi. Sous la
pression des alliés, il évacua Salamanque où Wellington entra le 17 juin, au milieu de
l’allégresse générale. L’Anglais perdit une dizaine de jours à réduire
les forts que Marmont avait armés autour de la ville, et celui-ci en profita pour concentrer
ses diverses unités éparses qui couvraient le pays contre les guérillas plus actives que
jamais.
Quoique Joseph ne fût tenu que d’une manière épisodique au courant de la
situation, Jourdan ne tarda pas à voir clair dans les projets du général anglais. Pour
l’heure, le roi était surtout préoccupé par l’administration civile du
royaume qui continuait à fonctionner fort mal. Les envoyés de Joseph étaient systématiquement
refoulés et empêchés d’accomplir leur travail par des généraux peu soucieux de voir
des fonctionnaires venir regarder d’un peu trop près la manière dont ils géraient
les provinces. Ou alors, comme Suchet, ils déclaraient froidement, preuves à
l’appui, qu’ils agissaient de la sorte sur instructions spécifiques de
Napoléon, lesquelles étaient contradictoires avec les promesses qu’il avait faites à
son frère.
Jourdan parvtit assez rapidement à convaincre le roi qu’il y avait plus urgent. Il
fallait renforcer l’armée de Marmont avant que les Anglais ne l’aient
refoulée, ce qui les mettrait en position de marcher sur Madrid comme le leur demandaient les
Espagnols. Le major général envoya donc plusieurs courriers au duc de Raguse, en lui ordonnant
de ne pas accepter de bataille, quitte à céder du terrain jusqu’au moment où
l’armée du centre, forte de seize mille hommes, aurait fait sa jonction avec lui,
puisque depuis le sud Soult, sous des prétextes variés et plus ou moins valables, refusait
d’envoyer des troupes.
Malgré les instructions de Jourdan recommandant de se hâter, il fallut plusieurs semaines
pour réunir les différentes brigades de l’armée du centre, et surtout les fourgons
nécessaires au transport des munitions et vivres. Cette armée ne quitta Madrid que le
21 juillet. Pendant ce temps, Wellington et Marmont, conscients de
l’importance des conséquences qu’entraînerait une grande bataille,
s’observaient et se livraient à de savantes marches et contremarches, ponctuées
d’escarmouches sans conséquences. Wellington, encore novice dans ce genre
d’opérations, laissa échapper deux ou trois occasions d’attaquer son
adversaire dans des conditions favorables par excès de prudence. Mais, le 23 juillet,
pour des raisons mal définies, Marmont engagea la bataille. On l’a accusé
d’avoir agi de la sorte pour ne pas avoir à partager les lauriers de la victoire
avec le roi. C’est possible, sinon probable. Toujours est-il que très vite les
alliés prirent l’avantage. Marmont, sérieusement blessé au milieu de
l’action, dut abandonner son commandement au général Bonnet, bientôt attetit à son
tour. Ce fut alors Clausel, un des meilleurs éléments de l’armée, qui, quoique
blessé lui aussi, en assura la sauvegarde en dirigeant la retraite vers le nord.
Ainsi fut perdue la bataille des Arapiles.
Au soir de cette journée, l’armée du centre, toujours en marche, atteignit Avila.
Ce fut là que Joseph apprit par un paysan qu’une bataille s’était
déroulée et que l’armée française avait été vaincue. La colère et la stupéfaction du
roi furent extrêmes. Devant cette situation, Jourdan ne perdit pas la tête. Il décida
d’arrêter la progression et de ramener l’armée du centre sur Madrid
jusqu’à de plus amples informations. Il apparut bientôt que le vainqueur,
titerrompant sa progression vers le nord, marchait sur la ville afin de complaire à ses alliés
espagnols. Jourdan recommanda l’évacuation et la retraite en direction de Valence où
il serait possible de se joindre aux forces de
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