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Le Maréchal Suchet

Titel: Le Maréchal Suchet Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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surprise d’y trouver un officier de l’état-major de Berthier qui l’y attendait et lui apportait un décret signé par Napoléon le jour où il avait appris la capitulation de Tarragone. Il était élevé à la dignité de maréchal d’Empire. Cette nomination était attendue par lui depuis six ans. C’était d’une certaine manière le couronnement de sa carrière. Il était et resterait le seul maréchal nommé au cours et pour des opérations en Espagne. C’était donc un phénomène sortant quelque peu de l’ordinaire, car depuis un moment l’empereur se désintéressait ostensiblement de « l’aventure espagnole » et commençait déjà à se pencher sur les problèmes de la guerre avec la Russie.
    Mais peut-être faut-il voir également dans cette promotion l’influence de Berthier qui était à présent dans les meilleurs termes avec Suchet et appréciait la manière dont il menait ses affaires. La renommée de Suchet après ce dernier succès rebondit jusqu’à Paris et le Journal des Débats lui consacra un long article. Or, quelques jours plus tard, Gabriel-Catherine, le frère du nouveau maréchal, dînait chez Cambacérès. Parmi les convives, il y avait le maréchal Ney fort jaloux de la gloire de ses camarades. À la fin du repas, il apostropha Gabriel-Catherine Suchet l’accusant d’avoir payé un journaliste pour rédiger et faire publier le fameux éloge.
    — Ce n’est pas moi qui en suis l’inspirateur, se défendit Gabriel.
    — Et qui donc, Monsieur ?
    — L’empereur !
    De stupeur et de saisissement, Ney laissa tomber sa tasse de café.
    Par le même courrier, l’empereur ordonnait à Suchet de démolir entièrement Tarragone (il se garda d’obéir), de prendre le mont Serrat (il était en train de le faire) et de se préparer à marcher avec son armée sur le royaume de Valence.

VIII
    VALENCE
    (1811-1812)
    À deux reprises déjà, depuis 1808, des armées françaises avaient paru sans succès devant la ville de Valence, la première fois sous le maréchal Moncey et la seconde sous Suchet lui-même. Aussi celui-ci savait à quoi s’en tenir sur les difficultés qui l’attendaient pour cette nouvelle campagne. Il décida donc de la préparer avec un soin particulier. Et avant même, il estima nécessaire de liquider le problème de Figueras. Cette ville finit par se rendre le 19 août 1811. Quoiqu’il fût conscient de la nécessité de la reprise de Figueras avant d’entamer une marche sur Valence, Napoléon demandait ce même mois à Berthier : « Que fait le maréchal Suchet de son armée ? Il s’endort trop vite sur ses lauriers… »
    Cependant, Suchet ne se hâtait toujours pas. Il craignait qu’à dégarnir trop rapidement de troupes la Catalogne et l’Aragon, il fît la partie belle aux Espagnols et les faits allaient lui montrer qu’il avait raison. Et puis, par les fortes chaleurs de la fin de l’été, les hommes supporteraient mal un climat de surcroît humide où le terrain était formé de rizières et où le paludisme régnait de manière endémique.
    Malgré l’impatience dont faisait montre l’empereur, il décida de ne rien entreprendre avant le début du mois de septembre. La maréchale qui, au début de l’année, était rentrée en France pour la naissance de sa fille, était revenue aux côtés de son mari et écrivait à son beau-frère, le 5 septembre, qu’ils quitteraient Saragosse le 9 pour le sud : « Louis, précisait-elle, a reçu des ordres très précis » ; mais elle ajoutait sans fournir davantage de détails que l’acheminement de la seule artillerie prendrait un mois.
    Pendant toute cette période, l’armée d’Aragon n’avait pas chômé. Conscients du péril qui planait sur Valence, les rebelles avaient tenté d’en renforcer la garnison en appelant à la rescousse des troupes qui tenaient encore la campagne en Catalogne et en Aragon. Suchet chargea les généraux Frère et Reille de leur barrer le passage et de les disperser, car il estimait d’après son service de renseignements que l’armée défendant Valence comportait près de quarante mille hommes sans compter la population civile prête à apporter son concours. La ville venait de changer de commandant. Palacio avait été remplacé par un des frères O’Donnell. L’armée de Murcie était censée l’appuyer et l’ensemble était sous les ordres de Blake nommé capitaine général. Il était arrivé de Cadix avec des pouvoirs

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