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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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prit l’objet des mains et le rejeta dans le traîneau. Tout le monde demeura interdit par ce brusque retour à la réalité. Ce fut Aedan qui y réagit avec le plus de vigueur :
    — Par les couilles desséchées d’un m…
    — Aedan ! l’interrompit Margot.
    — Oups ! Pardon, mon père.
    — Il n’y a pas d’offense, en ce qui me concerne en tout cas, dit Lionel avec un sourire fripon.
    — Mais, bon sang, Baillehache, ce que vous pouvez être emmerdant, à la fin, dit encore Aedan. Comme rabat-joie, on ne fait pas mieux. Bon. Allez, faisons une partie de bras de fer et je passe l’éponge.
    D’un geste taquin, il appuya le poing contre l’un des biceps du métayer. C’était une blague. Louis hésita imperceptiblement en lui jetant un coup d’œil vaguement amusé. « Enfin quelque chose d’humain », pensa Lionel. Pour cette seule raison, il sourit à son tour.
    Pendant que Sam s’occupait de l’attelage, les autres entrèrent. On servit à Louis un gobelet de vin. Après avoir bu, il s’assit en face d’Aedan et posa un de ses coudes sur la table. Il attendit, bras levé, un rictus aux lèvres.
    — Ah ben, ça par exemple ! À la bonne heure ! s’exclama l’Écossais, ravi.
    Entourés de spectateurs avides, les deux hommes prirent position. Hubert et Thierry engagèrent des paris. Jehanne se faufila entre eux et se tint timidement près de Louis en se demandant si elle avait le droit de souhaiter qu’Aedan gagne.
    — Prêt ? demanda le vieil homme.
    Louis se contenta de donner son accord en faisant un signe de tête, et leurs deux mains serrées se mirent à vibrer.
    Toc ! firent les phalanges d’Aedan en frappant durement le bois de la table. Il protesta :
    — Ce n’est pas du jeu ! Je n’étais pas prêt.
    — Si, tu l’étais, dit Louis.
    — Non, je ne l’étais pas. Je n’ai fait que vous demander si vous, vous l’étiez.
    Sous l’hilarité générale, Louis leva les yeux au plafond et but un peu de vin.
    — Allez, jeune blanc-bec. On remet ça. Cette fois, je vais vous avoir, dit Aedan en reprenant position.
    Beau joueur, Louis releva de nouveau le défi. Il serra solidement la main d’Aedan, qui dit :
    — À trois. Un… deux… trois. Merde !
    Le bras de l’Écossais s’abaissait dangereusement. Les joues rouges, il parvint à le ramener à la verticale et même à l’incliner un peu dans l’autre direction. Pendant ce temps, Sam rentra et se dépêtra fébrilement de ses vêtements d’hiver. Et soudain, toc !
    — Bon sang de merde, mais qu’est-ce que j’ai qui ne va pas aujourd’hui ? dit le vieil homme dont la barbe se hérissait.
    — Moi ! Moi, je veux essayer ! s’exclama Sam.
    Même à deux mains, le garçon n’en vint pas à bout. Jehanne se glissa plus près et chatouilla discrètement le flanc du colosse. Toc ! fit l’avant-bras de Louis contre la table.
    — J’ai gagné, j’ai gagné ! hurla Sam.
    — Tricheur, dit Margot.
    — Je n’ai pas triché. Je n’ai rien fait.
    Louis finit son gobelet de vin et se leva. Il enfila son floternel* et dit :
    — Margot, mets de l’eau à chauffer. Je vais prendre un bain.
    — Tout de suite, maître.
    Il ressortit. Nul n’eut besoin de regarder dehors pour savoir où il allait. Sam et Jehanne n’en firent pas de cas. Ils continuèrent à jouer ensemble au bras de fer sous les regards amusés du père Lionel, de Thierry et de Toinot. Pendant ce temps, Margot installa dans la cuisine la grande cuve et la tapissa d’un fond de bain*. Le souper allait en être quelque peu retardé, car Louis avait l’étrange manie d’exiger pour son bain quotidien une intimité qui n’était connue que des seuls reclus et ermites.
    L’intérieur du moulin avait été dépoussiéré et débarrassé de ses vestiges. Bientôt, il allait pouvoir revivre. Mais c’était à tout autre chose que son propriétaire pensait, sa signole* à la main et le regard rivé sur les engrenages reliés à l’axe. Quelque chose l’agaçait. Les dents de bois s’imbriquaient parfaitement l’une dans l’autre jusqu’à l’une d’elles, qui s’était ébréchée. Un bout de planche brisée s’était glissé dans les rouages et empêchait l’axe de tourner. Louis n’ignorait pas que, même s’il parvenait à retirer ce bout de bois d’entre les engrenages, le moulin ne serait pas pour autant fonctionnel. Trop de pièces étaient endommagées et le mécanisme devait être complètement

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