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Le médecin d'Ispahan

Le médecin d'Ispahan

Titel: Le médecin d'Ispahan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Noah Gordon
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de plus du Juif étranger, après le carcan et le calaat. Et puis,
dans la société musulmane, où chacun pouvait avoir quatre femmes, un mariage
n'avait rien d'exceptionnel.
    Mais la perte
de son ami l'affectait profondément. Quant à Karim, dont le nom était sur
toutes les lèvres depuis le chatir, il le voyait à peine car le vainqueur
passait ses jours et ses nuits aux fêtes de la cour. Ainsi Rob et sa femme
vivaient une solitude à deux dont ils s'accommodaient fort bien. Mary avait
rendu la maison intime et confortable ; très amoureux, il passait avec
elle tous ses moments de liberté, et le reste du temps se surprenait à rêver de
sa chair accueillante, de la tendre ligne de son nez, de ses yeux pleins
d'intelligence et de vivacité.
    Ils se
promenèrent à cheval dans les collines et firent l'amour dans les eaux chaudes
et sulfureuses de la grotte secrète du chah. Il avait laissé en évidence le
vieux livre de dessins indiens et, en essayant des variantes qui y étaient
décrites, il s'aperçut qu'elle l'avait étudié. Ils s'en amusaient souvent et
prenaient plaisir ensemble à des jeux sensuels étranges. Ils échangeaient leurs
curiosités : elle osait toutes les questions, auxquelles il répondait
toujours en scientifique.
    « J'aime
ton sexe aussi quand il redevient souple et doux comme de la soie. Mais
qu'est-ce qui le fait changer tout à coup ? Une nourrice m'a dit autrefois
que c'était l'air qui le gonflait et le rendait si dur. C'est vrai ?
    – L'air, non.
Il se remplit de sang artériel ; et cela a sans doute un rapport avec
l'odorat et la vue. Un soir, je ramenais mon cheval à bout de force après une
journée épuisante. Il flaira l'odeur d'une jument et, la trique dure comme du
bois, il se précipita avant même de la voir, avec une telle ardeur qu'il fallut
le retenir. »
    Rob se sentait
bien près de Mary et son amour valait tout le reste. Pourtant, il fut très ému
quand un visage familier parut à sa porte.
    « Entre,
Mirdin. »
    Présentée au
visiteur, Mary le dévisagea avec curiosité, puis elle apporta du vin et des
gâteaux et s'en fut nourrir les bêtes, laissant seuls Rob et son ami, avec
cette remarquable intuition qui la lui faisait chérir.
    « Tu es
vraiment chrétien ?
    – Oui.
    – Je peux t'emmener
à Fars, où le rabbenu est mon cousin. Si tu veux te convertir avec les sages
là-bas, peut-être accepteront-ils. Alors, tu n'auras plus à mentir. »
    Rob le regarda
et secoua la tête. Mirdin soupira.
    « Si tu
avais été une canaille, tu aurais accepté tout de suite ; mais tu es un
homme honnête et loyal, et un médecin exceptionnel. C'est pourquoi je ne peux
pas te tourner le dos.
    – Merci.
    – Jesse ben
Benjamin n'est pas ton nom ?
    – Non, je
m'appelle...
    – Tais-toi,
qu'il n'en soit plus question entre nous. Tu dois rester Jesse ben Benjamin. Tu
as réussi à te mêler au Yehuddiyyeh. Il y avait quelque chose qui sonnait
faux ; je me disais que c'était à cause de ton père, Juif européen
apostat, qui s'était égaré et avait négligé de transmettre notre héritage à son
fils. Mais prends garde, si les mullahs découvraient la tromperie, ce serait la
mort, sans doute. Et les Juifs d'ici risqueraient d'en pâtir. Ils n'y sont pour
rien, mais, en Perse, on fait volontiers payer les innocents.
    – Es-tu sûr
que tu ne cours aucun danger ?
    – J'ai bien
réfléchi. Je reste ton ami.
    – J'en suis
très heureux.
    – Oui, mais je
pose mes conditions. »
    Rob attendit.
    « Tu dois
comprendre ce que tu prétends être : il ne suffit pas pour être juif de
porter la barbe et le caftan. Il faut apprendre les commandements du Seigneur.
    – Je connais
les Dix Commandements.
    – Ce n'est
qu'une partie des lois de la Torah. Elle en contient six cent seize. C'est ce
que tu dois étudier, avec le Talmud, qui donne les commentaires de chaque loi.
    – Mais c'est
pire que le Fiqh ! Je vais étouffer...
    – Ce sont mes
conditions, dit Mirdin sérieusement.
    – D'accord.
Que le diable t'emporte ! »
    Alors, Mirdin
sourit pour la première fois. Il se versa du vin et, laissant de côté table et
chaises européennes, il s'assit par terre.
    – Allons-y. Le
premier commandement dit : " Croissez et multipliez.
 " »
    Rob se sentit
très heureux de voir là, chez lui, ce bon visage chaleureux.
    « J'essaie,
Mirdin, dit-il en riant, je fais tout ce que je peux ! »

52. LA FORMATION DE JESSE

 
    «  Elle s'appelle Mary, comme la

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