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Le médecin d'Ispahan

Le médecin d'Ispahan

Titel: Le médecin d'Ispahan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Noah Gordon
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l'été ; il eut aussi des souliers en peau de vache.
    A l'église
Saint-Marc, il alla un jour demander le père Ranald Lovell, qui avait emmené
son frère William. Finalement, personne ne semblait le connaître et ses
questions furent inutiles. Le seul conseil qu'on lui donna fut de chercher dans
quelque abbaye : les prêtres leur confiaient les orphelins, qui devenaient
acolytes après avoir reçu un nouveau nom.
    Sur l'étang
gelé, Rob essaya de glisser, avec une brunette, fille de fermier, qui lui
raconta les potins de la ville ; il fut surpris de tout ce que les gens
savaient sur eux. Mais, quand il se présenta à la ferme et demanda à la voir,
un homme brun, le père sans doute, lui déclara qu'il n'avait pas de chance, car
elle était partie, « la petite garce », et le pria grossièrement de
quitter les lieux.
    Le Barbier,
lui, passait son temps au lit, à siroter de l'hydromel. Un soir qu'une fois de
plus il avait ramené une fille de la taverne, Rob essaya de les observer, dans
l'espoir de démêler certains détails qui lui restaient obscurs dans les
rapports entre les sexes. Mais la lueur du feu n'éclairait que les visages. Au
matin, quand la femme fut partie, il amassa un charbon devant le foyer et se
mit à dessiner sur le sol une figure féminine.
    « Je
connais ça... Mais c'est Hélène », s'écria le Barbier, qui le regardait
faire.
    Il encouragea
son élève à continuer : ce talent pourrait être utile. Et le gamin en fut
ravi.

11. LE JUIF DE TETTENHALL

 
    Il ne restait plus qu'à attendre le printemps. La nouvelle réserve de Spécifique
prête, ils étaient las des exercices de jonglerie ou de magie et le Barbier,
qui ne supportait pas le Nord, s'épuisait à boire et à dormir.
    « Ce
foutu hiver a trop duré, dit-il un matin de mars, ne traînons pas
davantage. »
    Ils quittèrent
donc Carlisle un peu trop tôt et leur progression vers le sud fut lente car les
chemins étaient encore en mauvais état. Ils trouvèrent à Beverley un temps plus
doux et un public accueillant. Tout se passa bien jusqu'au moment où Rob,
introduisant le sixième patient, prit les douces mains d'une femme élégante.
    « Venez,
madame », dit-il, sentant son pouls s'accélérer.
    Les mains
moites, il se retourna et croisa le regard du Barbier, qui pâlit et le prit à
part, presque brutalement.
    « Tu es
sûr ? Pas de doute ?
    – Elle va
mourir très vite. »
    Le Barbier
revint vers la dame, qui paraissait jeune et saine. Elle ne se plaignait pas de
sa santé mais voulait acheter un philtre.
    « Mon
mari vieillit, son ardeur faiblit et pourtant il m'adore. »
    Calme,
réservée, elle portait des vêtements de voyage de belle qualité. Une femme
riche.
    « Je ne
vends pas de philtres, madame. C'est de la magie, non de la médecine. »
    Elle était
déçue et, comme elle insistait, il eut peur d'être compromis dans la mort d'une
personne de la noblesse. Ce serait sa perte.
    – Un peu
d'alcool produit souvent l'effet désiré, dit-il. Fort et pris chaud avant le
coucher. »
    Il n'accepta
pas de paiement et s'excusa dès qu'elle fut partie auprès de ceux qui
attendaient encore. Rob chargeait déjà le chariot et ils s'enfuirent une fois
de plus. Ils roulèrent sans dire un mot jusqu'à l'étape du soir.
    « Dans
les cas de mort subite, dit enfin le Barbier, rompant le silence, le regard se
vide, le visage perd toute expression, ou parfois s'empourpre ; le coin
des lèvres s'affaisse, une paupière se ferme, les membres se pétrifient. On
n'en réchappe pas. »
    Il soupira et
Rob ne répondit pas. Ils essayèrent de dormir. Le Barbier se releva pour boire.
« Non, je ne suis pas sorcier », se disait Rob et, ne sachant d'où
lui venait ce don inexplicable, il se mit à prier : « Retirez-moi ce
terrible don, d'où qu'il vienne. » Il sentait monter sa révolte sans
pouvoir la calmer. Ce ne pouvait être qu'un cadeau de Satan et il le refusait.
    Sa prière
semblait exaucée : le printemps se passa sans incidents. Le Barbier, se
rappelant la Saint-Swithin, offrit à Rob de la poudre d'encre et une pierre
ponce « pour griffonner des portraits mieux qu'avec un charbon »,
dit-il. En retour, son élève lui apporta le pourpier tant recherché, qu'il
avait enfin découvert dans un champ.
     
    A Leicester,
il aida à percer un furoncle, à éclisser un doigt cassé, administra le fameux
pourpier à une matrone fiévreuse et de la camomille à un enfant affligé de
colique. Puis il

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