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Le médecin d'Ispahan

Le médecin d'Ispahan

Titel: Le médecin d'Ispahan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Noah Gordon
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de
sorcellerie ou j'oublierai de baptiser un nouveau-né.
    – Si vous ne
voulez pas de moi, dites-moi au moins à qui m'adresser ?
    – Je le
répète, je n'ai personne à recommander. Mais l'Angleterre est grande, je ne
connais pas tout le monde. »
    Rob serra les
lèvres et mit la main au pommeau de son épée.
    « Quel
est le meilleur médecin que vous connaissiez ? fît-il avec brutalité.
    – Arthur Giles
de Saint-Ives », répondit Merlin, froidement, en reprenant son déjeuner.
    Rob n'avait
jamais eu l'intention de dégainer, mais Mme Merlin, fascinée par son arme,
laissa échapper un gémissement de terreur comme si elle voyait se réaliser ses
craintes. Les enfants le regardaient d'un air sombre et le plus jeune se mit à
pleurer. Malade de honte d'avoir si mal reconnu leur hospitalité, et sans même
réussir à marmonner une excuse, il tourna le dos et quitta là maison.

21. LE VIEUX CHEVALIER

 
    Quelques semaines plus tôt, Rob aurait noyé sa honte et sa colère au fond d'une chope,
mais il avait appris à se méfier : moins il buvait, plus il ressentait
intensément l'influx des gens dont il prenait les mains entre les siennes. Son
don lui paraissait sans prix et, renonçant à l'alcool, il passa journée avec
une femme dans une clairière au nord de la Severn, non loin de Worcester. Le
soleil avait échauffé l'herbe presque autant que leur sang. C'était une
apprentie couturière aux pauvres doigts criblés de piqûres, un petit corps dur
qui lui échappait dans le courant.
    « Myra,
cria-t-il, tu glisses comme une anguille ! » et il se sentit mieux.
    Telle une
truite, elle était vive et lui gauche comme un monstre marin quand ils
nageaient ensemble dans l'eau verte. Elle jouait à passer entre ses jambes, qui
venaient battre ses flancs étroits. La rivière était froide. Ils firent l'amour
au soleil sur la berge, tandis qu'un peu plus loin, Cheval broutait et que Mme
Buffington les regardait, impassible. Myra avait de petits seins aigus et un
buisson soyeux de fourrure brune. Plus enfant que femme, bien qu'elle ait à
coup sûr l'expérience des hommes.
    « Quel
âge as-tu, poupée ? demanda-t-il nonchalamment.
    – Quinze ans,
je crois. »
    Juste l'âge de
sa sœur Anne Mary, se dit-il, et c'était triste de penser que, quelque part,
elle avait grandi loin de lui. Une idée lui vint brusquement, si monstrueuse
qu'il en défaillit et que le soleil en perdit son éclat.
    « Tu t'es
toujours appelée Myra ?
    – Bien sûr,
c'est mon nom : Myra Felker. Que veux-tu que ce soit ?
    – Où es-tu
née ?
    – Larguée par
ma mère à Worcester, et c'est là que j'ai vécu », répondit-elle gaiement.
    Il hocha la
tête en lui caressant la main, et se jura d'éviter à l'avenir toutes les
gamines qui pourraient avoir l'âge d'Anne Mary. Mais c'en était fini de son
humeur légère. Il commença à ramasser ses vêtements.
    « Alors,
il faut partir ? dit-elle d'un ton de regret.
    – Oui, car
j'ai une longue route à faire jusqu'à Saint-Ives. »
     
    Arthur de
Saint-Ives le déçut cruellement : un vieux bonhomme, gros et sale, un peu
fou, dont la maison empestait la chèvre.
    « C'est
la saignée qui guérit, jeune étranger. Retiens bien cela. Quand tout à échoué,
un bon drainage du sang pour purifier, puis un autre, et encore un. Voilà
comment il faut soigner ces brutes ! » criait-il.
    Il répondit
volontiers aux questions, mais, quant aux traitements autres que la saignée, le
jeune barbier comprit vite qu'il aurait pu lui-même lui donner des leçons.
Giles n'avait rien à transmettre à un disciple. Il lui proposa de le prendre en
apprentissage et se mit en colère devant son refus poli.
    Rob le quitta
sans regret : plutôt rester barbier que de finir comme cet homme-là.
    Pendant
plusieurs semaines, il crut avoir renoncé à son rêve impossible. Il travaillait
dur à ses spectacles, vendait beaucoup de Spécifique Universel et se
réjouissait de voir grossir sa bourse. Mme Buffington aussi prospérait et
devenait une grosse chatte blanche à l'insolent regard vert. Se prenant pour
une lionne, elle cherchait à se battre ; à Rochester, elle disparut
pendant le spectacle et revint à la nuit, mordue, l'oreille gauche déchirée et
la fourrure tachée de sang. Il lava ses blessures et la pansa avec amour.
    « Eh !
Jeune miss, il va falloir apprendre, comme moi, à éviter la bagarre ; ça
ne te vaut rien. »
    Il lui donna
du lait et la prit sur ses genoux

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