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Le médecin d'Ispahan

Le médecin d'Ispahan

Titel: Le médecin d'Ispahan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Noah Gordon
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terre
l'épée dans son fourreau avant de prendre place sur le trône. L'assistance se
prosterna, tandis que l'imam Qandrasseh invoquait la protection d'Allah sur
ceux qui sollicitaient la justice du Lion de la Perse.
    Aussitôt
l'audience commença. Malgré le silence qui s'était établi dans la salle, Rob
saisissait mal les propos des intervenants ; mais des porte-parole placés
à quelques endroits stratégiques répétaient à haute voix tout ce qui se disait.
    La première
affaire opposait deux bergers qui se disputaient un chevreau nouveau-né :
l'un était le propriétaire de la chèvre, longtemps stérile et
récalcitrante ; l'autre prétendait avoir « préparé » la bête à
l'efficace saillie du bouc.
    « As-tu
pratiqué quelque magie ?
    – Excellence,
je l'ai seulement chauffée avec une plume au bon endroit. »
    La foule ravie
trépignait et la justice royale donna raison au manieur de plume. On venait là
surtout pour se divertir. Le chah ne parlait jamais, laissant apparemment
l'imam prendre les décisions, non sans lui marquer ses souhaits par quelque
signe.
    Un maître
d'école à la tenue sévère voulait ouvrir un nouvel établissement dans sa ville
sous prétexte que les autres ne valaient rien, s'étendant complaisamment sur
les qualités d'un directeur qui ne pourrait être que lui-même.
    « Assez !
Cette demande hypocrite et intéressée est une insulte au chah. Qu'on donne à
cet homme vingt coups de bâton, plaise à Allah ! »
    Les cas
suivants n'intéressaient personne : querelles de pâturages, interminables
discussions d'anciens contrats. Les gens s'étiraient, bâillaient, se
plaignaient de manquer d'air.
    « Jesse
ben Benjamin, Juif d'Angleterre ! » appela quelqu'un d'une voix
forte.
    Tandis qu'on
répétait son nom à tous les échos, Rob parcourut en boitant la longue allée
couverte de tapis, conscient de son caftan déchiré, de son vieux chapeau et de
sa pauvre mine. Devant le trône, il se prosterna trois fois, comme il avait
enfin appris à le faire. Puis, se redressant il vit l'imam, mullah noir au nez
en lame de couteau, à la barbe gris fer, au visage énergique. Le chah portait
le turban blanc des pèlerins de La Mecque et, glissée dans ses plis, une fine
couronne d'or. Sa longue tunique blanche était d'une étoffe douce et légère,
brodée de bleu et d'or, des bandes bleu foncé s'enroulaient à ses mollets et
ses chaussures pointues étaient bleues, ornées de rouge sang. Visiblement, il
s'ennuyait.
    « Un
Inghiliz ? Tu es aujourd'hui notre seul Européen. Pourquoi es-tu venu en
Perse ?
    – Pour y
chercher la vérité.
    – Tu veux
embrasser la vraie religion ?
    – Non, car
nous reconnaissons qu'il n'y a pas Allah, mais Lui, le plus miséricordieux, dit
Rob, bénissant les longues heures passées à s'instruire auprès de Simon. Il est
écrit dans le Coran : " Je n'adore pas ce que vous adorez. Vous
n'adorez pas ce que j'adore. Vous avez votre religion et moi j'ai la mienne.
 " »
    Il faut être
bref, se dit-il, et en peu de mots il raconta simplement comment, dans la
jungle de Perse occidentale, une bête sauvage avait bondi sur lui. Le chah
semblait intéressé.
    « Il n'y
a pas de panthères dans mon pays et, sans arme, je ne savais comment me
défendre. »
    Il dit qu'il
devait la vie au chah Ala al-Dawla, chasseur de fauves comme son père, le
vainqueur du lion de Kachan. La foule applaudit son souverain avec des cris
d'approbation et l'on se répétait l'histoire jusqu'au fond de la salle. L'imam
restait impassible, mais ses yeux trahissaient son irritation.
    « Achève
ta requête, Inghiliz, dit-il froidement.
    – Il est écrit
aussi que celui qui sauve une vie en devient responsable. Je demande l'aide du
chah pour accomplir la mienne du mieux que je pourrai. »
    Et il conta sa
vaine démarche pour se faire admettre à l'école de médecine d'Ibn Sina. Les
gens, enthousiasmés par l'aventure de la panthère, tapaient des pieds en
mesure, à en faire trembler les murs. Et le chah, plus habitué à être craint
qu'acclamé spontanément, semblait goûter ce bruyant hommage comme la plus douce
des musiques. Il observa Rob un moment, puis tourné vers l'imam, il parla pour
la première fois.
    « Qu'on
donne un calaat à cet Hébreu », dit-il.
    Le peuple se
mit à rire, sans que Rob comprît pourquoi.
    « Viens
avec moi, dit l'officier grisonnant, vêtu de cuir, dont les bras étaient
couverts de cicatrices, l'oreille gauche

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