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Le Mont-Saint-Michel et l'énigme du Drangon

Le Mont-Saint-Michel et l'énigme du Drangon

Titel: Le Mont-Saint-Michel et l'énigme du Drangon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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des fins matérielles, quotidiennes, comme
lieu de défense aussi, il a surtout été consacré. À qui ? À quelque
divinité de lumière apportant l’espoir pour tous ceux qui avaient le courage de
grimper jusque-là et de contempler le vaste horizon autrefois occupé par une
impénétrable forêt depuis lors engloutie. Lieu sacré, c’est certain, et que les
Druides gaulois ont régénéré avant de laisser leur place à ces saints
missionnaires qui venaient d’Irlande ou du Pays de Galles sur des auges de
pierre dérivant sur la mer sans que personne ne les guidât. Mais, entretemps, il
dut y avoir en ce même lieu des cérémonies en l’honneur de Mithra, ce dieu
oriental qui ressemble tellement à saint Michel, qui est le dieu brillant, jeune
et fort qui s’attaque au Taureau de la Terre, le tue et verse le sang de l’animal
sur ses fidèles assemblés en un étrange baptême de sang. On a retrouvé deux
autels tauroboliques, dans la colline du Mont-Dol. Et la chapelle actuelle
érigée au sommet du Mont se trouve à l’emplacement exact d’un temple de Diane. Les
cultes se perpétuent, même s’ils changent d’appellations ou de prêtres. La chapelle
est sous le vocable de Notre-Dame-de-l’Espérance. On sait que la Diane antique,
la Diane d’Éphèse, lieu supposé de la retraite de la Vierge Marie, est l’Artémis
grecque, la déesse solaire des Scythes, autrement dit la Déesse des
Commencements, celle qui est à l’origine de tout et qui peut tout procurer à
ses enfants, les humains. Notre-Dame-de-l’Espérance ? Comme le dit si magnifiquement
Gérard de Nerval, « la treizième revient, c’est encore la première ».
    Il va sans dire que le Mont-Dol excitait ma curiosité. J’y
sentais des présences qui m’aideraient à franchir le chemin qui me restait à
faire pour parvenir au Mont-Saint-Michel. Et j’avais l’impression qu’un
pèlerinage au sanctuaire de l’Archange ne pouvait être entrepris qu’en passant
par l’étape du Mont-Dol. Le Christianisme est, qu’on le veuille ou non, l’héritier
du paganisme, quel que fût l’aspect de celui-ci, et notamment dans ces régions
occidentales qui ont été des lieux de confrontation. Chaque fois que je me
trouve en présence de vestiges d’un culte païen, je sens croître mon exaltation.
Suis-je donc païen  ? C’est très possible.
Mon insistance à passer par le Mont-Dol en est une preuve. Mais je sais qu’on
ne pourra jamais comprendre le Christianisme, avec sa théologie complexe, ses
textes sacrés incomplets ou maltraités, ses pratiques cultuelles parfois aberrantes,
sans se référer à ce qui l’a précédé et à ce qui l’a constitué .
En ce sens, le Mont-Dol est la porte qu’on doit ouvrir avant de se diriger vers
ce qu’on appelait autrefois le Mont-Tombe.
    D’ailleurs, l’Archange n’est pas absent du Mont-Dol. Sur le
sommet, près de la chapelle dédiée à Notre-Dame, s’amoncellent des rochers
déchiquetés, comme s’il s’agissait de plaies ouvertes dans la pierre. La
tradition locale prétend que ces plaies sont les traces des griffes de Satan et
des pieds de saint Michel lorsqu’ils se livrèrent à cet endroit le combat que
nous rapporte l’Apocalypse. Il est infiniment probable que le Diable et l’Archange
sont les aspects christianisés de deux héros celtiques que le clergé, ne
pouvant les faire disparaître de la mémoire du peuple, a ainsi récupérés en les
parant de couleurs nouvelles. Et le Mont-Dol, comme le Mont-Saint-Michel, comme
l’îlot de Tombelaine, sont des cailloux jetés, comme chacun sait, par Gargantua,
le grand dieu-géant de la mythologie celtique, lui aussi grand chasseur de
monstres, et pourtant monstrueux lui-même. Et puisque nous sommes en Bretagne –
là, aucune contestation n’est possible –, n’oublions pas non plus que le
fondateur de Dol, le célèbre saint Samson, a son mot à dire dans cette bataille
entre l’Archange et le Diable : sans son intervention, saint Michel n’aurait
jamais pu être vainqueur. Si vous ne le croyez pas, consultez les vieilles
chroniques. Et quelque part, vers le sud, en direction de Combourg, non loin d’un
village du nom de Carfantin – déformation évidente d’un ancien toponyme breton
qui serait actuellement Kerfeunten ou Kerfetan –, se trouve un menhir haut de 9,50 mètres,
l’un des plus grands de la région, au milieu d’un champ traditionnellement
nommé le Champ-Dolent.
    Il est plus que probable

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