Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le mouton noir

Le mouton noir

Titel: Le mouton noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Langlois
Vom Netzwerk:
Il fit mine de réfléchir et proposa:
    â€” Que diriez-vous de casser la croûte demain sous les arbres d’automne, du côté du Cap-Rouge?
    â€” À demain! dit-elle.

    Il se démena ensuite pour trouver voiture et cheval, tout heureux de pouvoir l’emmener admirer les couleurs d’automne. Mais une surprise l’attendait quand il la retrouva: elle était accompagnée d’une de ses amies qui lui servait de chaperon.
    â€” Vous n’alliez pas croire, monsieur Perré, que je viendrais seule?
    â€” Vous ne m’en voyez aucunement offusqué. Tout cela va de soi. Vous ne me connaissez ni d’Ève ni d’Adam. Laissez-moi vous dire que le simple plaisir de vous voir suffit à me mettre en joie.
    Ils descendirent du côté du Cap-Rouge, se remplissant les yeux du spectacle tout en couleur que leur offrait la nature en ce temps de l’année. Ils s’arrêtèrent au bord de la rivière, là où elle se jette dans le fleuve. Assis sur des pierres près de l’eau, tout en causant de tout et de rien, ils s’intéressèrent un moment aux ébats des pluviers et des bécasseaux en quête de nourriture. Puis Clément fit soudain la réflexion:
    â€” Mon grand-père a vécu ici.
    â€” Votre grand-père?
    â€” Vous avez sans doute entendu parler du Tonsuré?
    â€” Le Tonsuré? Non, jamais.
    â€” On l’appelait ainsi parce qu’il avait été à moitié scalpé par les Iroquois, mais il a survécu. En tentant de retrouver ma grand-mère, prisonnière des Iroquois, il s’est noyé. Pourquoi j’évoque son souvenir? Vous voyez la maison là-bas, de l’autre côté de la rivière?
    â€” Laquelle?
    â€” Il y a une maison un peu en retrait, non loin du passage, c’était leur maison d’été. Eh bien! Les Iroquois ont attaqué mon grand-père devant cette maison. Mon père avait alors à peine dix ans. C’est ce qu’il m’a raconté. Il s’est réfugié dans la maison. Les Iroquois l’auraient certainement emmené captif avec sa mère, mais les hommes du seigneur Juchereau sont arrivés et ont empêché les Iroquois d’achever leur œuvre. Un Iroquois avait commencé à lever la chevelure de mon grand-père, mais n’a pas eu le temps de finir son geste. C’est pour ça que par la suite, mon grand-père Arnaud a été surnommé le Tonsuré. J’avoue qu’il y a fort longtemps que je voulais venir ici, pour voir. Je suis curieux, vous savez!
    â€” La curiosité n’est point un vice. Je la classerais plutôt parmi les qualités. N’est-ce pas elle qui fait progresser le monde? Après tout, c’est pour avoir eu la curiosité de pénétrer dans le fleuve Saint-Laurent que messire Jacques Cartier a découvert ce coin de pays. N’est-ce pas ici, au Cap-Rouge, qu’il a passé un hiver?
    â€” Je dois avouer que vous me l’apprenez.
    â€” Vous gagnerez à me connaître, monsieur Perré, j’aurai sans doute encore beaucoup à vous enseigner.
    â€” D’où vous vient cette belle assurance?
    â€” De l’expérience que j’ai de la vie. Quand vous aurez fait le tour de mon jardin, vous verrez qu’il n’y a pas poussé que des fleurs.
    â€” Il en va de même dans le jardin de chacun, renchérit Clément. Le mien est peut-être moins chargé et moins riche en expériences que le vôtre, mais il n’est pas pour autant dépourvu d’intérêt.
    â€” Vous n’allez pas nous gâter cette belle journée par des propos aussi graves, s’indigna l’amie de la jeune veuve. Allons, j’ai faim et, fort heureusement, nous avons de quoi nous mettre sous la dent.
    Elles avaient apporté un peu de nourriture. Ils s’en régalèrent puis, profitant de ce que le temps les gâtait d’une bonne chaleur, ils marchèrent le long du fleuve et, pour la première fois, il lui tint la main pour l’aider à franchir un cran de rocher. Il fit de même pour son amie. Toutes deux se moquèrent de voir que ce simple contact le faisait rougir.
    â€” En voilà un, dit Justine, qu’un simple geste émeut.
    Son amie s’écria:
    â€” J’aimerais bien savoir

Weitere Kostenlose Bücher