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Le neuvième cercle

Le neuvième cercle

Titel: Le neuvième cercle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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continua sa route à travers les voies et les aiguillages du chantier sud, déserts cette nuit-là, comme je l’ai signalé plus haut, et ne s’arrêta qu’arrivé à la décharge où il dérailla d’ailleurs, tellement la peur paralysait les mouvements de son conducteur.
    — Les trois évadés prirent alors, dans la nuit, le sentier de montagne qui leur avait été indiqué lors de la mise au point de l’opération, emmenant de force avec eux l’Italien d’abord pour le soustraire au châtiment qui lui aurait été réservé malgré son absence de complicité volontaire, ensuite et plus encore pour retarder le moment où leur fuite serait découverte.
    — Elle ne le fut, en réalité, que trois heures plus tard, au moment de l’appel qui, sur le chantier même, suivait immédiatement l’arrêt du travail. Le sous-officier S.S., chef de l’escorte, s’y reprit à plusieurs fois dans son contrôle. L’absence des trois prisonniers fut, par lui, mise dès l’abord sur le compte du sommeil. Il resta un long moment persuadé que les trois Russes s’étaient endormis à leur place de travail, et sur son ordre, deux soldats rentrèrent dans le tunnel, furieux et vociférants, pour retrouver les dormeurs et leur apprendre à coups de crosses ce qu’il en coûtait de ne pas avoir le cœur et les bras au travail. Ils revinrent au bout d’une demi-heure, suivis de leurs camarades qu’ils avaient découverts dans une triste posture et qu’ils avaient débarrassés de leurs liens. Déconfits et furieux tout à la fois. Force était bien, dès lors, de se rendre à l’évidence : les trois prisonniers s’étaient enfuis.
    — La règle militaire est la même dans tous les pays : elle interdit toute initiative à ceux qui ne détiennent pas le pouvoir supérieur. Deux soldats en armes furent placés à la sortie nord du tunnel, et le kommando rentra au camp.
    — Alerté par téléphone, le commandant se fit conduire avec une partie de son état-major au tunnel, qu’il tint à visiter lui-même, dans l’espoir que ses subordonnés avaient mal dirigé leurs recherches, car il ne parvenait pas à comprendre de quelle façon les trois manquants avaient pu tromper la vigilance des sentinelles qui gardaient les issues de l’ouvrage. Ce n’est qu’après ces nouvelles investigations qu’il donna l’ordre de mettre en mouvement le service des recherches.
    — Des camions chargés de troupiers en armes sillonnèrent la route en amont et en aval de la percée alpestre. Les chiens policiers se ruèrent en aboyant sur les pentes de la montagne. Les gendarmes eux-mêmes fournirent des patrouilles qui s’insinuèrent dans les forêts d’alentour.
    — La chasse aux hommes se poursuivit durant toute la journée du dimanche, et toute la nuit jusqu’au matin du lundi. Elle ne ramena aucun gibier humain. Les Russes avaient eu devant eux quatre heures bénéfiques grâce auxquelles ils avaient pu se mettre hors d’atteinte et prendre le contact avec la patrouille des partisans qui les attendait sur la hauteur.
    — La colère de la chiourme, durant ce dimanche, ne connut pas de bornes. Les deux cents hommes qui composaient le kommando, et qui avaient réintégré le camp nord exténués par le travail de la nuit, durent rester immobiles et au garde-à-vous durant douze heures consécutives, redressés à coups de schlague lorsque le sommeil et la faim les faisaient vaciller sur leurs jambes.
    — Quant aux autres Russes du kommando, et à ceux mêmes qui étaient de l’équipe du jour, ils furent roués de coups tout au long de ce dimanche exceptionnel, et passèrent, debout, encore la nuit suivante. Et le lundi, sur les ordres reçus téléphoniquement de Mauthausen, tous les Russes des deux camps furent rassemblés et reconduits sans douceur vers la gare de Neumarktl, où des wagons les emportèrent vers la sinistre centrale, ses blocks de représailles, sa chambre à gaz et son crématoire.
    — Ce fut l’occasion pour le commandant de se livrer à une de ces harangues dont il était coutumier, pour nous informer – par le truchement des interprètes – que la discipline allait encore être renforcée et que dorénavant toute évasion serait matière à des sanctions collectives de la dernière rigueur.
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    — Les xxxiv quarante ou cinquante camarades russes restants ont été renvoyés à Mauthausen et destinés à la chambre à gaz. J’ai, d’ailleurs, rencontré chez les partisans un

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