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Le neuvième cercle

Le neuvième cercle

Titel: Le neuvième cercle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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façon, nous pûmes à quelques-uns, correspondre clandestinement avec nos familles.
    — Ce jeune homme s’appelait Tisler Janko. Et, par la suite, il prit contact avec notre camarade Granger en prenant des risques énormes, dont leur vie était l’enjeu. Ils essayèrent la mise au point d’une évasion collective, aidés par les partisans qui occupaient les montagnes avoisinantes. Mais les choses ne purent être conduites à leur fin.
    — C’est à partir de ce moment qu’Huret, Pagès et moi, nous avons pris la décision de risquer l’évasion individuelle, et cette idée ne nous a plus quittés. Il fallait faire vite, nous étions en septembre 1944 et il ne fallait pas se laisser prendre par la neige qui tombe en abondance, très tôt, dans cette région. La mise au point était difficile et il n’était pas question d’échouer, les risques étant trop grands. Nous savions la direction à prendre pour retrouver, avec pas mal de chance, les partisans dans la montagne.
    — Nous avons préparé les matériaux nécessaires pour faire un double fond au wagon que nous chargions tant de fois par jour. Nous ne manquions de rien pour cela : parpaings en agios, planches, etc. La difficulté était de les bien cacher sur les lieux de travail, sans attirer l’attention des kapos et même de nos camarades de travail, qui étaient devenus très nombreux à cette époque.
    — Le xxxvi petit chemin de fer était formé d’une machine et d’une dizaine de wagonnets circulant sur une voie unique et faisant la navette du tunnel au ravin pour décharger le matériel, 7 à 800 mètres plus loin. Pendant que nous remplissions les wagonnets vides, d’autres travaillaient au marteau piqueur, etc.
    — Nous xxxvii étions convenus (avec l’aide de Selena) que Stephan viendrait en premier ouvrir notre wagon avant tous les autres, ceci pour gagner du temps, car nous n’aurions que quelques minutes devant nous avant que l’alerte ne fût donnée. Il restait un terrible obstacle à la sortie du tunnel : un S.S. montait sur le train et fouillait les wagons à l’aide d’une grande tige d’acier qu’il faisait pénétrer au plus profond, à la limite de ses forces. Pierres, planches, tout était prêt. Jouannic et Stephan aussi connaissaient la date de notre évasion (nuit du 15 au 16 septembre). J’avais dit dans le camp : « La fin de la guerre c’est dans dix jours. » Je leur ai dit ça vers le 5 ou 6 septembre de sorte que quand nous croisions les mineurs de la relève, la plupart m’indiquaient avec leurs mains le nombre de jours restants pour la fin de la guerre. Le 14 septembre, Selena me fit passer un mot me confirmant à nouveau que les partisans lui auraient fait savoir que c’était convenu pour la nuit du 15 au 16, à un kilomètre de la décharge.
    — Nous étions gonflés à bloc : tout avait été minutieusement préparé. Au premier voyage, Stephan me dit : « Le S.S. qui fouille va très profond, ça va être très dur. » J’ai suivi chaque convoi qui sortait jusqu’à 30 mètres de l’entrée. Je voyais parfaitement le S.S. fouiller : c’était une espèce de brute, un athlète qui mettait toute sa force… Il allait en effet très profondément dans la caillasse. Il aurait, à coup sûr, touché le bois de notre abri et c’eût été le massacre. Jusqu’au dernier convoi il a mis le même zèle. C’était la catastrophe. Impossible de partir.
    — Ce matin-là, en croisant la relève : « Alors « Grande », entendis-je, et la guerre c’est fini tu crois ? » et d’autres quolibets de cet ordre. J’avais dit à Stephan : « Tu diras à Selena ce qui nous a empêché de partir. » Je me remémore son visage quand nous sommes passés devant sa petite fenêtre. Elle était livide. Sûrement elle n’avait pas dû dormir de la nuit, se demandant comment ça allait tourner, et il faut avouer qu’elle avait pris et prenait d’énormes risques, ce qui se confirma par la suite.
    — Nous décidâmes naturellement de remettre ça à la nuit prochaine. Quelle tension ! Dès le premier convoi, même scénario que la nuit précédente, j’allai inspecter le S.S. fouilleur. Je remarquai qu’il était bien moins saignant que celui de la veille. Disons qu’au début il en fouillait convenablement un sur deux et, après minuit, un sur trois. Il était environ 4 heures du matin, le 17 septembre 1944. Nous décidâmes de tenter l’aventure au prochain convoi.

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