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Le pas d'armes de Bordeaux

Le pas d'armes de Bordeaux

Titel: Le pas d'armes de Bordeaux Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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maigrement :
    – Si mon père n’était pas au bout de son chemin, vous feriez en sorte qu’il y parvienne afin de jouir en hâte d’une vie que j’imagine béate…
    – Tu nous prêtes des intentions impures !
    – Dis-moi, Aliénor… Combien d’hommes sont entrés dans ton… buisson ardent pendant toutes ces années ?
    – Que t’importe !
    Ainsi, elle ne niait pas. Tandis qu’elle ouvrait toutes grandes ses cuisses, Thoumelin, sereinement cocu, fermait les yeux. Qu’eût-il pu faire d’autre ?
    – Et maintenant, qui a l’honneur de te chevaucher ? Un chevalier de Carcassonne, un manant de Limoux à moins que ce ne soit un huron de Bouriège ou de Roquetaillade.
    – J’ai ce qu’il me faut sous la main : un gars jeune, robuste, qui vient à ma demande et fornique comme un dieu.
    Tristan n’osa demander : « Olivier ? » bien que ce nom brûlât sa langue. L’inceste tourmentait moins Aliénor que des appétits peut-être insatiables à mesure que l’âge passait.
    « Le beau monstre », songea-t-il, imaginant l’enfant qui pourrait naître d’un pareil baudouinage (406) .
    –  Sauve ton âme, Aliénor, dit-il. Dis adieu à mon père pour moi… J’ai troublé votre vie et m’en repens.
    Et plus fort, afin d’être entendu d’Olivier et de ses hommes :
    – Pour moi, vous êtes morts. Adichiats (407) .
    Il rejoignit ses compagnons. Leur ébahissement lui fit mal.
    – Je vous raconterai, dit-il en se juchant en selle.
    Alcazar s’ébroua. On eût dit que les miasmes du château l’avaient contaminé. Il se réjouissait d’y échapper.
    –  J’espère, dit Paindorge, qu’on ne retourne pas en Normandie.
    – Certes non !
    – Où allons-nous ?
    – Limoux… J’y sais une bonne hôtellerie.
    – On vous y reconnaîtra, messire, dit Lebaudy. On vous demandera pourquoi vous ne voulez pas rester dans votre famille.
    – J’ai vieilli, j’ai changé. Je parle la langue d’oïl…
Ils ne nous ont même pas donné à boire ! dit Lemosquet.
    C’était vrai. Tristan se retourna, laissant Alcazar le conduire.
    Sur le seuil du logis éclairé par les flammes, Aliénor et Olivier, côte à côte, assistaient à son départ. Si proches étaient-ils l’un de l’autre que seule une épée les eût séparés : ils se tenaient par les hanches avec une espèce d’avidité nerveuse, et l’on eût dit un couple regardant s’éloigner des gêneurs avant que de revenir se mettre au lit.
    – Et votre père ? dit Paindorge.
    Tristan broncha. Son père ? Il ne devait point avoir bougé de son siège. La honte plus que le feu devait rougir son front. Il avait mérité et méritait encore les tourments dans lesquels un mariage absurde l’avait précipité. À trop vouloir protéger le nom des Castelreng, il n’avait fait que le corrompre. Seule la mort le délivrerait des carences d’un esprit naguère audacieux. Il avait meshaigné maints ennemis. Il s’était asservi à une femme sans en tirer le moindre bénéfice ! On pouvait être un guerrier valeureux, un chevalier de grand mérite et devenir, l’âge venant, un pauvre homme.
    Ils quittèrent le village. Devant eux, la campagne réapparut avec ses prés, ses vignes, ses forêts lointaines et le Cougain aux eaux bruissantes qu’ils franchirent sur un petit pont de pierre.
    – Soyez sans crainte, amis, grommela Tristan, malade de rancœur. C’est tout plat jusqu’à Limoux.
    C’était une réflexion des plus fade. La plus fade qu’il eût exprimée depuis qu’il les avait à son service.
    « Tiens », songea-t-il, « la pluie. »
    Il écrasa sur sa joue une goutte froide, gênante comme une mouche l’été. Mais il le savait : il ne pleuvait pas. C’était un ciel serein qui pesait sur sa tête.
    – La pute ! enragea-t-il. Plus pute encore à mesure qu’elle prend de l’âge. Toutes des putes… ou presque, milladious !
    Et pour vaincre sa peine, il se mit à chanter :
    Ah ! velhas tricharitz
    Putan, per qué m seguitz ?
    Totz en soi vergonhos.
    No aiatz sospeissos
    Que’us renda guierdos
    Des vostres cunhs froncitz ;
    E se no’us partitz
    Totz en soi esperdutz
    Que ja per cunhs canuts
    No darai mon argent
    A contrast de jovent (408) .
    –  Merdaille ! s’exclama Paindorge. Vous chantez bien messire, après tout ça !
    – Qu’est-ce que ça veut dire ? s’étonna Lemosquet.
    – C’est de la langue d’oc, dit Lebaudy. Alors, va-t’en savoir…
    Tristan porta

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