Le pays des grottes sacrées
prête à se
défaire de son nom, telle fut la première pensée de la Zelandoni. Elle se
rendit compte ensuite que la jeune femme s’était exprimée avec un accent
inhabituel et elle sut que c’était la personne dont on lui avait parlé. La
plupart des membres de sa Caverne trouvaient que tous les visiteurs parlaient
le zelandonii avec un accent qu’ils croyaient être du nord, mais la façon de
parler de cette femme était tout à fait différente. Elle s’exprimait bien,
connaissait manifestement la langue, mais la façon dont elle formait certains
sons différait de tout ce qu’elle avait entendu auparavant. Elle venait sans
aucun doute de très loin.
Elle regarda la jeune femme plus
attentivement.
Oui, pensa-t-elle, elle est
séduisante, mais elle a un air étranger, des traits différents, le visage moins
long, les yeux plus écartés. Ses cheveux ne sont pas fins comme ceux de tant de
femmes zelandonii et, bien qu’elle soit blonde, leur couleur est particulière,
plus foncée, plus proche de celle du miel ou de l’ambre. Étrangère et pourtant
acolyte de la Première. Il est assez rare qu’une étrangère fasse partie de la
Zelandonia, plus encore qu’elle soit acolyte de la Première. Mais peut-être
compréhensible, du fait que c’est elle qui se fait obéir des chevaux et d’un
loup. Et c’est elle qui a arrêté les hommes qui ont causé tant d’ennuis pendant
tant d’années.
— Tu es la bienvenue au Site
Sacré le Plus Ancien, Ayla, Acolyte de la Première, dit la Zelandoni en lui
serrant les mains. Je devine que tu as parcouru plus de chemin pour voir ce
site que personne ne l’a jamais fait.
— Je suis venue avec les
autres… commença Ayla.
Voyant un sourire s’épanouir sur
le visage de son interlocutrice, elle comprit. C’était son accent. La Gardienne
évoquait la distance qu’elle avait parcourue lors de son Voyage avec Jondalar,
et avant cela en venant de son Clan et peut-être même avant encore.
— Il se peut que tu aies
raison, mais Jondalar a peut-être voyagé encore plus loin. Il est allé de chez
lui au bout de la Grande Rivière Mère tout là-bas à l’est et au-delà, où il m’a
rencontrée, puis il est revenu avant d’entreprendre ce Périple de Doniate avec
nous.
Jondalar s’approcha à la mention
de son nom et sourit en entendant Ayla décrire ses pérégrinations. La Gardienne
n’était ni jeune et immature ni vieille, mais assez âgée pour posséder la
sagesse apportée par l’expérience et la maturité, à peu près de l’âge des
femmes qui lui plaisaient avant de connaître Ayla.
— Salut, respectée Gardienne
du Site Sacré le Plus Ancien, dit-il, les mains tendues. Je suis Jondalar, de
la Neuvième Caverne des Zelandonii, Tailleur de Silex de cette Caverne, uni à
Ayla de cette même Caverne, qui est Acolyte de la Première. Fils de Marthona,
ancienne Femme Qui Commande de la Neuvième Caverne. Né au foyer de Dalanar,
Homme Qui Commande et fondateur du peuple des Lanzadonii.
Ainsi énuméra-t-il ses noms et
liens familiaux importants. Les membres de la Zelandonia pouvaient simplement
énoncer leurs attaches principales, mais il eût été trop désinvolte et peu
courtois de se montrer si bref lors de présentations rituelles, surtout à une
Zelandoni.
— Tu es le bienvenu,
Jondalar, de la Neuvième Caverne des Zelandonii, dit-elle en lui prenant les
mains et en le regardant dans les yeux, ces yeux d’un bleu incroyablement vif
qui semblaient voir dans son esprit même et émouvaient sa féminité.
Elle ferma les yeux quelques
instants pour retrouver son équilibre intérieur.
Pas étonnant que sa compagne ne
soit pas encore prête à renoncer à son nom, pensa la Gardienne. Elle est unie à
l’homme le plus fascinant que j’aie jamais rencontré. Je me demande si
quelqu’un a prévu une Fête de la Mère en l’honneur de ces visiteurs du Nord…
Dommage que mon temps de garde ne soit pas encore fini. On peut avoir besoin de
moi ici et je ne puis assister aux Fêtes de la Mère.
Willamar, qui attendait de se
présenter à la Gardienne, baissa la tête pour dissimuler un sourire. C’est une
bonne chose que Jondalar ne remarque pas l’effet qu’il produit encore sur les
femmes, pensa-t-il, et qu’Ayla, aussi perspicace soit-elle, ne semble pas s’en
apercevoir. La jalousie avait beau être considérée d’un mauvais œil, il savait
qu’elle habitait le cœur de beaucoup.
— Je suis Willamar, Maître
du Troc
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