Le pays des grottes sacrées
le foyer plus
vaste réservé à ces prétentieux de la Zelandonia, où on continuait de ne le
considérer que comme un simple acolyte, même s’il racontait à qui voulait
l’entendre qu’il avait été appelé.
Brukeval n’appréciait guère les
hommes dont il avait choisi de partager le toit, une bande d’oisifs sans
ressort qui avaient peu de choses à offrir et semblaient ignorer le sens du mot
« respect ». Il se savait plus intelligent et plus capable que la
plupart d’entre eux. Il était lié aux familles de personnes qui devenaient
souvent des meneurs, ou des meneuses, et il avait grandi en compagnie de gens
responsables, brillants, souvent talentueux. Ceux dont il partageait la tente
étaient pour l’essentiel paresseux, faibles, lents d’esprit, dénués de
générosité et de toute autre qualité susceptible de racheter leurs défauts.
En conséquence, afin de raffermir
leur propre estime de soi et de trouver un exutoire à leurs frustrations, ils
nourrissaient leur vanité et leur prétention à être plus qu’ils n’étaient en
manifestant leur profond mépris pour des êtres auxquels ils pouvaient se sentir
supérieurs : ces animaux sales et stupides que l’on appelait Têtes Plates.
Ils se racontaient entre eux que si ces derniers n’avaient rien d’humains ils
étaient capables de faire preuve de ruse. Parce que les Têtes Plates
présentaient une certaine ressemblance avec les vraies personnes, ils étaient
parfois suffisamment malins pour troubler les esprits qui rendaient une femme
enceinte de sorte qu’elle donnait naissance à une abomination, ce qui était parfaitement
intolérable. Pour des raisons qui lui étaient propres, la seule chose que
Brukeval avait en commun avec les hommes dont il partageait le toit était une
haine profonde, viscérale, pour les Têtes Plates.
Certains de ces individus
n’étaient que des brutes épaisses et, au début, un ou deux avaient même essayé
de le provoquer en prétendant que sa mère était une Tête Plate. Mais après
qu’il eut piqué quelques-uns de ses fameux accès de colère irraisonnée et
exhibé sa force physique, aucun n’avait plus osé l’ennuyer avec cela, la
plupart le traitant même avec plus de respect que tout autre occupant de la
tente commune. Il avait par ailleurs une certaine influence auprès des chefs de
la Caverne dans la mesure où il connaissait la plupart d’entre eux, et il avait
plaidé à plusieurs reprises l’indulgence pour tel ou tel qui s’était retrouvé
dans des ennuis plus graves qu’à l’ordinaire. Au point que nombre de ces hommes
le considéraient comme une sorte de leader. C’était également le cas de
certains membres des différentes Cavernes, qui estimaient qu’il pouvait avoir
sur ses camarades une influence bénéfique au point que dès le milieu de l’été,
si l’un de ces derniers faisait preuve d’une attitude particulièrement
agressive, c’était à Brukeval que l’on venait s’en plaindre.
Lorsqu’il fit son apparition au
campement principal de la Neuvième Caverne, ostensiblement pour rendre visite
aux gens de sa Caverne et partager avec eux le repas de midi, les conjectures
allèrent bon train. Ayla était partie tôt. Elle avait beaucoup de choses à
faire au sein de la Zelandonia et avait emmené Jonayla pour la laisser en
passant chez Levela. En fait, la plupart des femmes n’étaient plus là. Avec son
talent désormais bien connu d’organisatrice, Proleva avait rassemblé toutes
celles sur qui elle avait pu mettre la main, assignant telle tâche à celle-ci,
telle autre à celle-là, tout cela dans le cadre des préparatifs d’un grand
festin susceptible de combler tous les participants à la Réunion d’Été. Les
seules femmes demeurant dans le campement étaient celles qui allaient se
joindre à la chasse.
Proleva avait laissé de la
nourriture pour le repas de midi des chasseurs, qui étaient en train de se
rassembler au campement de la Neuvième Caverne. Par la suite, il leur faudrait
se débrouiller pour trouver leur pitance au cours de la chasse. La plupart des
participants avaient emporté des aliments séchés qu’ils avaient ajoutés à leur
équipement : tentes, nattes à dormir, mais ils comptaient bien se nourrir
du gibier qu’ils abattraient ou des végétaux qu’ils récolteraient au cours de
leur expédition.
Brukeval étant réputé pour être
un chasseur plus que convenable, Joharran l’invita à se joindre à eux.
Weitere Kostenlose Bücher