Le pays des grottes sacrées
Brukeval
n’hésita qu’un moment. Il s’interrogeait sur les relations entre Ayla et
Jondalar et se dit que, à l’occasion des rapprochements qui accompagnaient
toujours ce genre d’expédition, il serait peut-être en mesure d’en apprendre un
peu plus.
Il n’avait jamais oublié la façon
dont Ayla les avait tous affrontés lorsque Marona l’avait incitée à porter des
vêtements parfaitement inappropriés à l’occasion de la fête organisée pour
l’accueillir – or il avait remarqué que les femmes portaient toutes
les mêmes, désormais. Il se rappelait avec quelle chaleur elle l’avait
accueilli la première fois qu’ils s’étaient rencontrés, le sourire dont elle
l’avait gratifié, comme si elle le connaissait depuis toujours, sans les
hésitations ni la réserve que manifestaient la plupart des femmes à son égard.
Il rêvait d’elle dans son si beau et si étrange costume matrimonial, se voyait
souvent le lui ôter pièce après pièce… Même après toutes ces années, il
s’imaginait encore par moments que c’était lui, et non plus Jondalar, qui
s’étendait auprès d’elle sur ces douces fourrures.
Ayla s’était toujours montrée
agréable avec lui, mais après cette première soirée il avait senti une certaine
réticence à son égard, bien loin de ses premières manifestations de bienvenue.
Au fil des années, Brukeval s’était replié sur lui-même, ce qui ne l’empêchait
pas de connaître beaucoup de choses sur la vie commune d’Ayla et de Jondalar,
jusqu’à des détails des plus intimes. Il savait entre autres que Jondalar
s’accouplait depuis un certain temps avec Marona. Étrange choix… Il savait
également qu’Ayla ne frayait avec personne d’autre, pas même lors des Fêtes
pour honorer la Mère, et qu’elle n’était pas au courant pour Jondalar et
Marona.
Brukeval retourna à sa lointaine
pour y prendre ses sagaies. Le temps qu’il revienne au campement de la Neuvième
Caverne, l’idée de cette expédition de chasse l’excitait plutôt. Depuis qu’il
avait décidé de s’installer avec les compagnons dont il partageait la
lointaine, on ne lui avait jamais demandé d’y participer. En règle générale, la
plupart des responsables de ces parties de chasse ne se donnaient pas la peine
de demander aux hommes de cette tente de se joindre à eux, et ceux-ci
n’organisaient que très rarement leurs propres expéditions, à la seule
exception de Brukeval, qui partait souvent seul et avait appris au fil des
années à trouver sa propre subsistance lorsque le besoin s’en faisait sentir.
Les autres se contentaient
d’ordinaire de quémander leur pitance à telle Caverne ou à telle autre, en
retournant souvent au campement de leur Caverne d’origine. Madroman, lui,
n’avait aucun souci pour les repas. Il les partageait en général avec les
membres de la Zelandonia, qui étaient d’ordinaire fort bien approvisionnés par
les différentes Cavernes, la plupart du temps en échange de tel ou tel service,
mais également parfois de requêtes particulières. Laramar lui aussi disposait
de ressources qui lui étaient propres : il troquait son barma, et n’avait
aucun mal à trouver son content de clients.
Il n’était pas inhabituel que les
jeunes hommes résidant dans les locaux qui leur étaient réservés se procurent
de la nourriture ou des repas dans un campement ou dans un autre, mais ils
s’efforçaient d’ordinaire d’apporter en échange leur contribution, comme la
participation à une expédition de chasse, à la récolte d’aliments comestibles,
ou à d’autres travaux pour la communauté. Et même s’il était assez courant que
ceux qui avaient depuis peu acquis le statut d’hommes adultes créent des
problèmes, on attribuait en général cela à de forts tempéraments et on avait
tendance à les tolérer, en particulier les hommes plus âgés qui se rappelaient
leur propre jeunesse. Mais s’ils causaient trop de tracas, ils recevaient
parfois la visite de responsables de la Caverne ayant le pouvoir de leur
infliger une punition, qui pouvait aller, dans le pire des cas, jusqu’au
bannissement du campement de la Réunion d’Été.
Tout le monde savait que les
hommes partageant la lointaine de Brukeval n’étaient plus tout jeunes, et que
l’on ne pouvait qu’exceptionnellement leur mettre la main dessus lorsqu’il
fallait effectuer de gros travaux. Mais on ne manquait jamais de nourriture
lors des Réunions
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