Le pays des grottes sacrées
feuilles de gui et d’herbes diverses qui l’avait fait
vomir et lui avait donné des crampes douloureuses, afin d’expulser tout ce qui
avait peut-être été entamé. Mais rien de tout ce qu’elle avait entrepris
n’avait pu lui faire oublier cette affreuse sensation de Laramar la touchant,
la pénétrant.
Pourquoi avait-elle fait
ça ? Pour faire souffrir Jondalar ? C’était pourtant elle qui n’avait
pas daigné lui consacrer ne serait-ce qu’un peu de son temps. C’était elle qui
était restée debout toutes les nuits et avait passé l’essentiel de ses journées
à mémoriser les chansons, les histoires, les symboles, les mots à compter. Si
elle l’aimait tant, pourquoi n’avait-elle pas trouvé de temps à lui consacrer,
à lui aussi ?
Était-ce parce qu’elle avait bien
apprécié cette période de formation ? Car elle l’avait adorée, elle avait
adoré apprendre toutes ces choses qu’il lui fallait connaître pour devenir
Zelandoni. Toutes les connaissances qui pouvaient être révélées, et toutes
celles qui devaient être tenues secrètes. Les symboles qui avaient un sens
caché, ceux que l’on pouvait graver sur une pierre, peindre sur un tissu,
tisser dans une natte. Elle connaissait leur signification. Tous les membres de
la Zelandonia connaissaient leur signification. Elle pouvait adresser une
pierre ornée de symboles à un autre Zelandoni, et la personne qui la
transporterait ignorerait qu’elle pouvait avoir un sens, à la différence de son
destinataire.
Et puis elle appréciait
énormément toutes les cérémonies. Elle se rappelait à quel point elle avait été
émue, impressionnée, durant la première, organisée dans les profondeurs de
cette grotte, à laquelle elle avait assisté en la seule présence des membres de
la Zelandonia. Elle savait maintenant comment les rendre inoubliables,
impressionnantes. Elle avait appris tous les trucs, mais il ne s’agissait pas
seulement de trucs. La réalité, souvent effrayante, était loin d’être absente.
Elle savait que certains membres de la Zelandonia, les plus âgés en
particulier, ne croyaient plus à grand-chose. Ils l’avaient pratiquée tant de
fois qu’ils s’étaient habitués à leur propre magie. Tout le monde pouvait la
mettre en œuvre, prétendaient-ils. C’était bien possible, mais assurément pas
sans une formation préalable. Pas sans aide, pas sans les remèdes magiques.
Ayla se rappela soudain sa
cérémonie d’initiation, lorsqu’elle avait entendu Celle Qui Était la Première
annoncer qu’elle deviendrait un jour Première. Alors, Ayla n’en avait tenu
aucun compte : elle ne pouvait pas s’imaginer devenir Première, d’autant
qu’elle avait un compagnon et un enfant. Comment pouvait-on être Première et
avoir dans le même temps un compagnon et un enfant ? Certains membres de
la Zelandonia avaient certes des enfants, mais ils étaient peu nombreux.
Tout ce qu’elle avait vraiment
désiré, depuis sa plus tendre enfance, c’était avoir un compagnon et des
enfants, sa famille à elle. Iza lui avait bien dit qu’elle ne pourrait jamais
avoir d’enfants, son totem, le Lion des Cavernes, était trop puissant, mais
elle les avait tous surpris : elle avait eu un fils. Broud aurait été
furieux s’il avait su qu’en la forçant il lui avait donné la seule chose
qu’elle désirait. Mais il n’y avait pas eu de Don des Plaisirs à l’époque. Broud
ne l’avait pas choisie parce qu’il s’intéressait à elle. Il la détestait. S’il
l’avait forcée, c’était uniquement pour lui prouver qu’il pouvait lui faire
tout ce qu’il voulait, et parce qu’il savait que cela lui faisait horreur.
Et aujourd’hui, c’était elle-même
qui s’était forcée. Forcée à choisir un homme qu’elle détestait pour faire du
mal à un homme qu’elle aimait. Et voilà ce qu’elle avait fait à Jondalar à
cause de sa jalousie : il avait failli tuer un homme par sa faute à elle.
Elle ne méritait pas sa famille. Elle n’était même pas capable de prendre soin
de sa famille en tant qu’acolyte, ce serait donc encore plus difficile en tant
que Zelandoni à part entière. La vie de Jondalar serait plus simple sans sa
présence. Peut-être vaudrait-il mieux qu’elle le laisse reprendre sa liberté,
trouver une nouvelle compagne.
D’un autre côté, pouvait-elle ne
serait-ce qu’envisager de ne plus être la compagne de Jondalar ? Comment
vivre sans lui ? Cette seule
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