Le pays des grottes sacrées
nous aurions un peu plus de temps devant nous pour nous
préparer.
— Je ne comprends pas, dit
Ayla en fronçant une fois de plus les sourcils. J’aurais pensé que les hommes
seraient contents de savoir qu’on avait besoin d’eux pour qu’une nouvelle vie
commence, qu’ils étaient aussi indispensables que les femmes, et que c’était
pour cette raison que la Mère les avait créés.
— Ils seront peut-être
contents, mais une fois qu’ils auront compris ce qui en découle, ils voudront
sans doute s’assurer que les enfants de leur foyer sont plus que ceux de leur
compagne. Ils souhaiteront peut-être avoir la certitude que les enfants aux
besoins desquels ils pourvoient viennent bien d’eux.
— Mais pourquoi cela
aurait-il de l’importance ? Ça n’en a jamais eu jusqu’à présent. Les
hommes ont toujours veillé à procurer ce dont ils avaient besoin aux enfants de
leurs compagnes. La plupart étaient satisfaits quand celles-ci apportaient des
enfants à leurs foyers. Pourquoi voudraient-ils soudain ne s’occuper que des
leurs ? s’étonna Ayla.
— Cela peut très bien
devenir une simple question d’orgueil. Ils risquent de se croire propriétaires
de leurs compagnes et de leurs enfants.
Ayla but une gorge de tisane et
réfléchit un moment, le front plissé.
— Comment pourraient-ils
avoir la certitude que ce sont bien les leurs ? C’est la femme qui donne
la vie. La seule chose qu’un homme puisse savoir avec certitude, c’est qu’un
bébé est l’enfant de sa compagne.
— La seule façon dont un
homme peut avoir cette certitude, c’est si sa compagne ne partage les Plaisirs
qu’avec lui, expliqua Zelandoni. Comme toi, Ayla.
Les plis se creusèrent plus
profondément sur le front de la jeune femme.
— Mais les Fêtes de la Mère,
alors ? La plupart des femmes les attendent avec impatience. Elles
souhaitent honorer la Mère, partager le Don des Plaisirs qu’Elle leur a
accordé, avec plus d’un homme.
— Oui, c’est en effet le cas
de la plupart des femmes, ainsi que des hommes, d’ailleurs. Cela ajoute du
piment et de l’intérêt à leur existence. Et dans leur grande majorité, les
femmes souhaitent également avoir un compagnon qui aide à prendre soin de leurs
enfants, ajouta Zelandoni.
— Mais certaines n’ont pas
de compagnon, fit remarquer Ayla. Leurs mères, leurs tantes, leurs frères leur
apportent leur aide, en particulier lorsqu’elles ont un nouveau-né. Même la
Caverne aide les femmes à prendre soin de leurs enfants. On a toujours pourvu
aux besoins des enfants.
— C’est vrai, mais les
choses peuvent changer. On a connu dans le passé des années difficiles, où les
animaux se faisaient plus rares et les plantes dont on pouvait se nourrir moins
abondantes. Quand il commence à y avoir pénurie, certaines personnes sont
parfois moins enclines à partager. Si tu n’avais assez de nourriture que pour
un unique enfant, auquel souhaiterais-tu la donner ?
— Je serais prête à donner
ma propre nourriture à n’importe quel enfant, répondit Ayla.
— Durant un moment,
peut-être. La plupart des gens en feraient autant. Mais pendant combien de
temps ? Si tu ne mangeais rien, tu deviendrais faible, et malade. Qui
alors s’occuperait de ton enfant ?
— Jonda… commença Ayla avant
de s’arrêter net et de porter la main à sa bouche.
— Eh oui.
— Mais Marthona nous
viendrait en aide, Willamar aussi, et même Folara. Et l’ensemble de la Neuvième
Caverne apporterait aussi son soutien ! lança la jeune femme avec force.
— C’est vrai. Marthona et
Willamar donneraient un coup de main, en tout cas aussi longtemps qu’ils
seraient capables de le faire. Mais tu sais que Marthona ne va pas très bien,
quant à Willamar, il ne rajeunit pas. Folara va devenir la compagne d’Aldanor à
l’occasion des dernières Matrimoniales de cette saison. Lorsqu’elle aura un
bébé à elle, qui nourrira-t-elle en premier ?
— Jamais la situation ne se
présente aussi mal, Zelandoni. Il arrive que l’on manque de certaines choses au
printemps, mais l’on trouve toujours de quoi se nourrir, rétorqua Ayla.
— J’espère que ce sera
toujours le cas, il n’empêche qu’une femme se sent en général plus en sécurité
si elle a un compagnon pour lui venir en aide.
— Il arrive que deux femmes
partagent un foyer. Dans ce cas, elles s’aident mutuellement pour leurs
enfants, poursuivit Ayla, qui pensait au peuple
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