Le pays des grottes sacrées
avaient peu à voir avec le Clan, principalement dans la préparation
de la boisson, laquelle était destinée à sa propre personne et non aux Mog-ur.
Elle n’était pas Mog-ur, aucune femme du Clan ne pouvait l’être, et elle
ignorait les rituels qu’ils observaient pour se préparer à la cérémonie qui
allait suivre. Mais elle était une Zelandoni et elle espérait que cela ne
serait pas indifférent lorsqu’elle aurait atteint le Monde des Esprits.
Elle sortit une petite bourse de
son sac à remèdes. Les nombreuses lampes disposées dans la salle diffusaient
une lumière suffisante pour que l’on puisse distinguer sa couleur, ocre rouge
profond, la plus sacrée aux yeux de ceux du Clan. Puis elle prit dans son sac à
dos en cuir un bol en bois, qu’elle avait façonné quelque temps plus tôt dans
le style du Clan et montré à Marthona. Avec son sens de l’esthétique très sûr,
celle-ci en avait apprécié à la fois le travail et la simplicité. Sur le
moment, Ayla avait pensé le lui offrir mais elle était maintenant bien contente
de l’avoir gardé. Ce n’était certes pas le bol spécial qui avait été utilisé
pour cette racine, et uniquement pour elle, par Iza et les innombrables
générations qui l’avaient précédée, mais c’était en tout cas un bol en bois
réalisé avec tout le soin que mettaient ceux du Clan pour confectionner les
leurs.
— J’aurais besoin d’un peu
d’eau, dit Ayla en défaisant les nœuds de la bourse rouge vif puis en vidant le
sachet de racines dans sa main.
— Je peux les voir ?
demanda Zelandoni.
Ayla les lui tendit, mais elles
n’avaient rien de particulier, ce n’étaient que des racines séchées.
— Je ne sais pas exactement
combien il en faut, dit-elle en en prenant deux et en espérant qu’il n’y en
aurait ni trop ni trop peu. Je n’ai pratiqué que deux fois cette cérémonie, et
je ne possède pas les souvenirs d’Iza.
Un petit nombre de membres de la
Zelandonia présents dans l’assistance l’avaient entendue parler de la mémoire
du Clan, mais la plupart n’avaient aucune idée de ce qu’elle évoquait. Elle
avait bien essayé d’expliquer à Zelandoni Qui Était la Première en quoi cela
consistait, mais comme elle-même était incapable de se montrer très précise sur
la question, elle avait eu beaucoup de mal à se faire comprendre.
Quelqu’un versa de l’eau dans son
bol en bois, et Ayla en but une gorgée pour s’humecter la bouche. Elle se
rappelait à quel point les racines étaient sèches et difficiles à mâcher.
— Je suis prête,
annonça-t-elle.
Avant d’avoir pu revenir sur sa
décision, elle fourra les racines dans sa bouche et commença à les mâcher.
Il lui fallut un certain temps
pour les ramollir suffisamment afin de pouvoir les mastiquer. Elle s’efforçait
bien de ne pas avaler sa salive mais cela n’allait pas de soi. Et puis, se
disait-elle, comme c’est moi qui vais devoir boire le résultat, cela n’a sans
doute pas vraiment d’importance. Elle mâcha, broya, mastiqua, encore et encore.
Elle eut l’impression que l’opération n’en finissait pas mais, en fin de
compte, elle obtint une sorte de bouillie pâteuse, qu’elle cracha dans le bol.
Elle remua le liquide avec son doigt et constata que celui-ci devenait d’un
blanc laiteux.
Zelandoni avait suivi toute
l’opération en regardant par-dessus l’épaule d’Ayla.
— C’est donc cela le
résultat ? demanda-t-elle, essayant visiblement de détecter une odeur
quelconque.
— Oui, confirma Ayla, qui
sentait toujours dans sa bouche le goût primitif des racines. Tu veux
sentir ?
— C’est un arôme qui me fait
penser à une forêt pleine de mousse et de champignons après la pluie, indiqua
la Première. Je peux y goûter ?
Ayla faillit refuser. Pour le
Clan, cette opération était si sacrée qu’Iza n’avait jamais accepté de lui
montrer en quoi elle consistait et, l’espace de quelques secondes, Ayla fut
effrayée par la requête de Zelandoni. Mais elle se rendit compte très vite que
l’expérience était si éloignée des pratiques du Clan que le fait que Zelandoni
goûte à la décoction n’avait probablement aucune importance. Elle porta donc le
bol aux lèvres de la Première et la regarda absorber du liquide. Beaucoup plus
d’une gorgée… Elle s’empressa de le lui retirer avant qu’elle ait pu en boire
trop.
Cela fait, elle porta le bol à sa
bouche et avala rapidement ce qu’il
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