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Le petit homme de l'Opéra

Le petit homme de l'Opéra

Titel: Le petit homme de l'Opéra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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au plus bas. Il n'eut pas le courage de se laver les mains, il se borna à les frotter avec un mouchoir imbibé d'eau de Cologne. Un greffier étriqué se glissa derrière un pupitre. La porte s'ouvrit. Lambert Pagès, encadré de deux plantons, maintenait tant bien que mal son pantalon. Augustin Valmy l'invita à s'asseoir et d'un signe du menton congédia les accompagnateurs.
    — Désolé pour la ceinture, monsieur Pagès, c'est le règlement, au cas où...
    — Au cas où ?
    — Vous désireriez attenter à vos jours.
    — Pourquoi ferais-je une chose pareille ? Je suis innocent. Je voudrais savoir pourquoi vous appelez ce réduit un bureau alors que ce n'est qu'un placard à balais.
    — Ça ne vous ennuie pas si c'est moi qui pose les questions ?
    — Monsieur l'inspecteur, je note ? s'enquit timidement le greffier.
    — Si ça vous chante, monsieur Delorme, je vous signale que nous n'en sommes qu'au préambule. Quant à vous, Pagès, ne le prenez pas à la légère, vous êtes suspecté d'avoir tranché la gorge de M. Broussard Anicet, quincaillier rue de la Voûte. Vous pouvez noter, monsieur Delorme. Pagès, je vous écoute.
    Lambert Pagès haussa les épaules.
    — C'est un accident, j'ai dû me défendre, il voulait me tuer.
    — Un accident ? Pourquoi avez-vous pris la fuite au lieu d'alerter la police
    — Je me suis affolé.
    — M. Broussard était un de vos amis ?
    — On se saluait régulièrement à l'Opéra. Il me demandait des conseils pour des placements en Bourse.
    — Il en voulait à votre vie ?
    — Il était fou de jalousie parce qu'Olga Vologda, la danseuse étoile des ballets de Saint-Pétersbourg, me préférait à lui, il m'a agressé deux fois, voyez ces cicatrices sur mon cou tailladé par une de ses lames de rasoir. Il est le seul à en avoir, c'est une invention qui vient d'Amérique, elle n'est pas encore commercialisée, vous pourrez vérifier. De plus, j'ai un témoin. M. Legris, libraire rue des Saints-Pères, était à mes côtés quand ça s'est produit. Il nous a assommés et il a tenté de... J'en ai des frissons.
    — Et cela s'est produit quand ?
    — Jeudi dernier.
    Augustin Valmy feuilleta son carnet, soupira et le referma d'un coup sec.
    « Le 15 avril, le jour où ils m'ont semé dans les embouteillages. »
    — Vous bénéficiez d'une mémoire prodigieuse, monsieur Pagès. Moi, je ne sais même plus ce que je faisais avant-hier.
    — C'est le métier qui veut ça, je fréquente assidûment le palais Brongniart. Je mémorise les cotations.
    — Pour quelle raison étiez-vous à Passy en compagnie de M. Legris ?
    — C'est une longue histoire. Je crois que ce libraire est toqué, il m'a affirmé que plusieurs de mes relations avaient été empoisonnées par des cochons en pain d'épice, moi-même je venais d'en recevoir un. Ni une ni deux, j'ai filé chez lui afin qu'il vienne le constater de visu.
    —En effet, c'est étrange. Vous ne l'aviez pas sur vous, ce cochon ?
    — Non, le libraire avait fini par me flanquer la frousse, j'ai paniqué.
    — Vous paniquez souvent, monsieur Pagès. Le hic, c'est que cette fameuse lame était en votre possession lorsqu'on a retrouvé le corps sans vie de M. Broussard. Comment vous l'êtes-vous procurée ?
    Augustin Valmy avait déplié un feuillet. Il contemplait une fine lame de deux centimètres et demi sur quatre centimètres et demi, évidée en son milieu
    — Curieux objet, extrêmement coupant.
    — Broussard m'a menacé verbalement, puis il m'a foncé dessus. Je lui ai saisi le poignet et je l'ai violemment repoussé. La lame s'est fichée dans son cou.
    — Au point de lui trancher la carotide, je vois, je vois. Vous vous êtes rencontrés incidemment à la foire du Trône ?
    — Non, il avait tout combiné, du moins je le suppose. Le matin, on m'avait délivré un pneumatique émanant d'Olga Vologda.
    — Que disait-il ?
    — Il était question d'une affaire aux développements imprévus. C'était signé votre Olga. Pas du tout son style. Quand j'ai vu Anicet Broussard, j'ai compris, ce message était de lui.
    — Ensuite ?
    — Il m'a montré un pneumatique identique au mien, mais je me suis gardé de lui révéler que j'avais reçu le même. J'ai justifié ma présence en ce lieu en prétextant avoir passé la nuit chez ma maîtresse, la reine Mab. Elle donne un spectacle de magie à la foire du Trône. Je lui ai appris qu'Olga Vologda avait quitté son ami M. Rozel au profit d'un Anglais propriétaire d'un castel à

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