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Le petit homme de l'Opéra

Le petit homme de l'Opéra

Titel: Le petit homme de l'Opéra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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l'observa tandis qu'il s'avançait vers son banc. Il s'arrêta, se pencha en avant et demanda :
    — Tu peux me voir ?
    — Oui.
    — C'est pour M. Kenji Mori.
    Il posa sur ses genoux un paquet enveloppé de papier de soie rose.
    — De la part d'un ami, madame.
    — Quel est ton nom, petit homme ?
    —C'est un secret. Adieu.
    Il disparut au-delà d'un massif de fleurs. Elle s'apprêtait à déposer le cadeau sur les genoux de Kenji lorsqu'une main gantée le lui arracha.
    — N'y touchez pas, madame, je vous en conjure !
    — Que se passe-t-il ? s'écria Kenji tiré de sa torpeur et prêt à se colleter avec l'importun, un gandin flegmatique aux yeux bleu ardoise d'environ la quarantaine, les cheveux noirs calamistrés séparés par une raie médiane, élégamment habillé d'un manteau de vigogne.
    — Monsieur Mori, Augustin Valmy, inspecteur de police au quai des Orfèvres.
    Il tira un mouchoir de sa poche, dépouilla le paquet de son papier de soie et en exhuma un cochon en pain d'épice qui portait le prénom Kenji en lettres de guimauve.
    — J'en étais sûr, murmura-t-il.
    — Que signifie ? Vous avez effrayé ma compagne !
    — Je m'en excuse, mais ce que j'ai à vous révéler est d'une importance primordiale. Pouvons-nous avoir une conversation privée ?
    — Je n'ai rien à cacher à madame, je vous écoute. En quelques mots, l'inspecteur Valmy mit Djina Kenji au courant de l'affaire.
    — Votre fils et votre gendre sont impliqués jusqu'au cou et j'appréhende qu'ils ne sèment davantage la pagaille. Il y a eu mort d'hommes, à présent c'est vous qui êtes visé, je tenais à vous prévenir. Je vais faire analyser ce cochon, dès que j'aurai les résultats je vous en informerai.
    Kenji ne dit mot. Son désarroi devait se lire sur figure pourtant, après quelques secondes de réflexion il conclut :
    — Ils sont allés de nouveau se fourrer dans un guépier. Hein ? Mort d'hommes ? Comment ?
    — Empoisonnés. Aconit.
    — C'est une fleur, non ?
    — Exact, une fleur toxique, un poison à retardement, pas de souffrances, des désordres anatomiques inconstants, une simple envie de dormir. Quatre grammes de racines provoquent le décès, quant aux feuilles, quatre-vingt-dix à cent grammes suffisent. Les symptômes sont un ralentissement du pouls et de la respiration, une dilatation de la pupille, une énorme dépression des forces. Ils apparaissent une demi-heure, trois quarts d'heure après l'ingestion. On ne peut tabler que sur l'analyse médico-légale pour détecter le poison.
    — Depuis quand le savez-vous ?
    — Un certain temps.
    — Et vous ne m'avez pas averti !
    — N'ayez crainte, monsieur Mori, mes collaborateurs veillent au grain, nous pensons avoir identifié le coupable, celui-là même qui a remis le paquet à Madame.
    — Ce petit bonhomme ? Mais il semble inoffensif !
    — C'est à voir, rétorqua Augustin Valmy en secouant son mouchoir entre le pouce et l'index comme s'il avait été contaminé. Si vous voulez m'excuser, je fonce au laboratoire. Où puis-je vous joindre par téléphone ?
    — Chez moi, rue des Saints-Pères, pourquoi ?
    — Nous avons pris vos fils et gendre en filature, s'il se produit quoi que ce soit de suspect, je vous appelle.
    Djina glissa son bras sous celui de Kenji, elle avait les yeux pleins de larmes.
    — Dire que j'aurais pu te perdre, souffla-t-elle.
    — Mais non, tu vois bien que non, l'inspecteur est arrivé à temps, tu te fais du souci pour tout. Quant à ces deux galapiats, ils vont m'entendre !
    Ils se dévisagèrent, interloqués ; ils ne s'étaient encore jamais tutoyés.
    — Viens, ma chérie, rentrons, j'ai faim de toi.
    — Moi aussi, j'ai faim de toi.
    Djina dormait. Il écoutait son souffle régulier, tandis qu'une averse fouettait les carreaux.
    Il plongea son visage dans sa chevelure. Elle ouvrit les yeux, tout ensommeillée.
    — Djina, es-tu heureuse ? demanda-t-il doucement, en posant sa tête sur sa poitrine.
    — Oui. Depuis que je t'ai rencontré, je vis dans la joie, je n'ai plus d'âge. Avant, j'accomplissais cet acte parce que c'était un devoir conjugal. Oh, mon époux était gentil, mais... Avec toi, je découvre le plaisir, c'est une sensation enivrante.
    Il laissa courir sa main le long de ses reins. Il lui était obligé de n'avoir jamais exigé de lui qu'il lui dise de grands mots tendres, qu'il lui serve les lieux communs des amoureux, car tout le monde abuse des mots. Combien de nuits n'avait-il pas passées auprès d'une

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