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Le peuple du vent

Le peuple du vent

Titel: Le peuple du vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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remontèrent. Celles d’un monde perdu, lointain et chargé de beauté, un monde auquel il avait renoncé. Il soupira.
    Un « han » bruyant ramena son attention vers les combattants. D’un coup, le jeune Tancrède avait attaqué, entaillant profondément la veste matelassée de son adversaire. Celui-ci poussa un rugissement de rage et chargea.
    À ce moment, les trompes des guetteurs retentirent, couvrant le glas et le fracas des épées.
    Les lames restèrent suspendues, les combattants s’étaient immobilisés.
    Un second appel résonna : c’était l’alerte !
    Les soldats se précipitaient sur le chemin de ronde. Sergents et hommes de garde entrèrent en courant dans la salle des plaids, pour saisir faisceaux de lances et de flèches.
    Au sommet du donjon et des six tours surplombant les remparts prenaient place hommes d’armes et de trait.
    En quelques instants, le manoir se transforma en machine de guerre. Hugues et Tancrède rejoignirent Serlon, Sigrid et Ranulphe au sommet de la tour.
    Tancrède remarqua les foulards bleu du deuil aux bras des sires de Pirou et de l’Épine. Sigrid avait gardé sa tenue masculine et une épée pendait au baudrier qu’elle portait à la taille. Elle échangea un bref regard avec lui, puis se détourna.
    Tous les yeux étaient braqués sur la route de Coutances où étaient apparus des cavaliers. Une troupe nombreuse et armée arrivait par la lande de Lessay et piquait droit vers Pirou.
    — Les bannières ne sont pas encore visibles ! lança l’un des guetteurs.
    Ordre fut donné de relever les pont-levis isolant le château au milieu de ses douves successives. En ces temps troublés, alors que le duc-roi était en Angleterre et que son jeune frère réclamait son dû, tout était possible.
    Les trompes continuaient à donner l’alerte et leurs mugissements rauques résonnaient sur la plaine où fuyaient les paysans.
    Seules les ailes du moulin de Pirou continuaient de tourner. Les archers, leurs arcs braqués vers le sol, attendaient le signal.
    Tancrède retint son souffle, contenant difficilement l’excitation qui le gagnait. Jamais encore il n’avait eu l’occasion de se battre autrement que contre des marauds qui en avaient après leurs bourses et que leurs cimeterres avaient sans mal mis en fuite. Peut-être était-ce là l’occasion qu’il attendait ? Une bataille, une vraie, où il trouverait réponse aux questions qu’il se posait.
    Enfin, la troupe fut suffisamment proche pour que l’on puisse distinguer ceux qui la composaient. En tête chevauchaient des porte-bannières précédant trois chevaliers aux riches destriers caparaçonnés, aux naseaux protégés par des cornes rehaussées d’or et d’argent. Il y avait là une trentaine de chevaliers, écuyers et hommes d’armes. Ils s’immobilisèrent à quelque distance de la barbacane, la défense avancée qui protégeait le premier pont-levis.
    Un héraut, escorté des porte-bannières, s’approcha et sonna du cor avant de clamer les noms des barons normands qui demandaient à être reçus par le sire de Pirou :
    — D’Aubigny, Bricquebec, Saint-Sauveur !
    De porte en porte les noms furent répétés, et enfin, en haut du donjon, le sergent d’armes en informa Serlon.
    — Ouvrez ! ordonna aussitôt celui-ci avant de se tourner vers Hugues.
    — Les barons s’agitent, sire de Tarse. Voilà une visite qui n’augure rien de bon.
    — Saint-Sauveur, est-ce là le fils de ce Roger dont vous m’avez parlé, qui a fini égorgé dans une embuscade ?
    — Non, celui-là est Jourdain Taisson. Roger est mort sans descendance. Sa nièce Liesse a épousé Jourdain. Les autres bannières sont celles des Bricquebec et des d’Aubigny. Ils font partie des seigneurs du Cotentin avec lesquels il faut compter. Venez ! Allons les accueillir.

17
    Les vantaux avaient été repoussés et la troupe passa successivement les cinq portes fortifiées et les ponts-levis avant de s’arrêter devant celui qui menait au château.
    Dans un brouhaha de voix et de hennissements, chevaliers et soldats mirent pied à terre sur l’esplanade à l’extérieur des remparts. Alors que les garçons d’écurie se précipitaient, les trois seigneurs traversèrent la dernière douve, entrant au trot de leurs destriers, les fers arrachant des étincelles aux pavés.
    Des écuyers saisirent les rênes qu’on leur jetait. Les barons descendirent de cheval et ôtèrent leurs heaumes, rejetant sur leurs épaules

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