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Le piège de Dante

Le piège de Dante

Titel: Le piège de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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Et pour moi, qu’est-ce qu’on fait ? demanda Casanova.
    Pietro prit le bras de Campioni.
    — Votre Excellence... Voici ce que je vous propose. Nous ne serons pas écoutés sur nos seules conjectures, à l’heure où chacun a les siennes, où le Conseil est privé d’Emilio, et où vous et moi risquons très gros. Allez à San Biagio et essayez de parler à Arcangela, nous verrons si cela rime à quelque chose. Ensuite – je vous demande, pour cela, de me faire confiance – favorisez en mon nom la possibilité que j’obtienne une dernière audience auprès du Doge. Si informations il y a, vous me sauverez en me laissant les négocier avec lui. Ne protestez pas, je vous en prie, je sais que je vous demande beaucoup, mais c’est ma seule chance. Et je vous donne ma parole d’honneur que je mettrai tout en oeuvre pour vous soutenir. Certes, je n’ai plus guère de crédit auprès de la République, mais je peux vous être utile de bien d’autres manières. J’ai besoin de votre protection, Votre Excellence, je m’en remets à vous. Mon sort est entre vos mains.
    — Le Doge saura que j’ai...
    — Nous sommes dans le même navire, Votre Excellence. Il nous faut faire alliance nous aussi, sans quoi Venise est perdue.
    — Mais... C'est que... Vous rendez-vous compte que... ma position... En venant ici, j’ai déjà...
    — Giovanni ! Luciana est morte, le Doge risque le pire, nous ne pouvons rester sans rien faire! Vous êtes venu me trouver et vous aviez raison. Il faut...
    Viravolta se tut.
    Giovanni hésita longuement, plongeant ses yeux dans ceux du prisonnier.
    — Bien, finit-il par dire. Je vais aller à San Biagio. Pour le reste... nous verrons.
    Il s’écarta. Anna Santamaria se coula de nouveau entre les bras de l’Orchidée Noire.
    — Allons, nous devons partir, dit-elle.
    — Et toi ? Que vas-tu faire ?
    — Je me tiendrai prête. Je serai prudente, je te le jure. Et Landretto veillera sur moi. Mais je ne partirai pas sans toi, mon amour.
    — Anna...
    Campioni se retourna et s’écria :
    — Gardien !
    Pietro entendit bientôt les pas lourds de Lorenzo qui revenait vers eux.
    — Anna !
    Leurs mains se quittèrent à regret. Ils échangèrent un dernier regard...
    Puis elle s’en fut hors de la cellule.
    Le sénateur considéra lui aussi Viravolta une dernière fois, puis tourna les talons.
    — Amen ! dit Fregolo depuis sa cellule.
    — Hé ! ne partez pas ! s’écria Casanova. Est-ce que quelqu’un va m’expliquer ce qui se passe ?
    La porte se referma sur le cachot. Et tandis que Campioni s’éloignait, Viravolta songea : Allons, Giovanni. Il faut parfois savoir compter sur les autres : tu es mon seul espoir.
    Mentalement, il corrigea :
    Notre seul espoir.

CHANT XVII
    Arcangela
    Giovanni Campioni se rendit au couvent de San Biagio, sur la Giudecca, alors que la nuit tombait. Vêtu d’un manteau et de sa robe noire, beretta sur la tête, il sortit de sa gondole, accompagné de deux hommes. Ils traversèrent ensemble quelques ruelles avant de contourner la masse sombre de l’édifice de San Biagio. Le silence était absolu. Giovanni se signala à l’entrée de San Biagio et demanda à être annoncé auprès d’Arcangela Torretone. La Mère supérieure du couvent, une femme d’une soixantaine d’années au teint pâle et ridé, le considéra un instant avec méfiance, derrière la petite grille qu’elle avait ouverte ; mais la vue de la robe sénatoriale dissipa rapidement ses craintes. Elle ouvrit la porte, trois bonnes soeurs se tenaient avec elle. Une cloche sonna; l’une des soeurs se pressa dans les couloirs. La Mère supérieure enjoignit aux soldats d’attendre Giovanni dans l’entrée du bâtiment; puis elle marcha avec lui à l’intérieur de San Biagio. Ils s’engagèrent bientôt dans le cloître, ouvert sur la nuit étoilée, et traversèrent le réfectoire avant de gagner de nouveaux couloirs.
    — Vous savez, Votre Excellence, qu’Arcangela n’a plus toute sa tête. Elle est des nôtres depuis longtemps maintenant. Son fils venait la voir, de temps en temps; elle ne le reconnaissait pas toujours, vous rendez-vous compte ? Elle a beaucoup vieilli et grossi, son invalidité l’empêche de se déplacer comme elle le voudrait. De temps en temps, ses nuits sont agitées de cauchemars. Triste sort que le sien, Votre Excellence ! Nous faisons de notre mieux pour adoucir ses peines et sa folie. Mais parfois, ce couvent tient aussi de l’asile ; et rien n’est

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