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Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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vous aiderai, promit Charles.
     
    Murray réclama un grand verre de gin, le vida et, exténué, s'endormit. « Heureuse nature », se dit Desteyrac, promu garde-malade.
     
    À l'aube, le vent mollit, la pluie cessa, la houle se fit plus accommodante et le Phoenix entra dans l'avant-port de Ponta Delgada, capitale des Açores. Murray, la jambe enfermée dans une gouttière faite d'attelles de carton et de bandelettes badigeonnées de colle d'amidon destinée à solidifier le pansement, avait été reconduit dans sa chambre. En présence de Charles, venu aux nouvelles, il spéculait encore sur un impossible débarquement avec son valet, quand le major Carver apparut.
     
    – Alors, mon garçon, vous voilà contraint de rester avec nous, dit-il, narquois.
     
    – Je voudrais seulement me rendre en ville, avec l'aide de M. Desteyrac et de Mortimer, pour faire des emplettes, risqua Murray.
     
    – Soyez sérieux au moins une fois dans votre vie, Malcolm ! Votre idée de nous quitter ici pour regagner l'Angleterre, idée préparée comme une évasion, n'est plus réalisable dans l'état où vous êtes. Vous le sentez vous-même.
     
    – Le Français m'a trahi ! fulmina Murray en fixant Charles d'un regard furibond.
     
    – M. Desteyrac est un homme d'honneur. Il ne vous a pas trahi. Pensez plutôt à votre stupide valet qui a tenté d'acheter notre charpentier. C'était bien inutile, car ni le commandant Colson ni moi-même ne nous serions opposés à votre fuite, même sans la mise en scène que vous aviez imaginée. Vous êtes majeur et responsable de vos actes, en tout temps et en tout lieu, mon garçon, précisa le major d'un ton sec.
     
    – Puisqu'il en est ainsi, rien ne m'oblige à poursuivre ce stupide voyage, dit Murray.
     
    Il fit mine de se lever, mais la douleur consécutive au mouvement le rejeta, grimaçant, sur sa couche.
     
    – Votre jambe vous y oblige, et moi aussi maintenant, hélas ! Vos parents et lord Simon seraient en droit de me reprocher de vous avoir laissé quitter le bord dans un tel état. Il n'est donc pas question que vous bougiez d'ici jusqu'à ce que le chirurgien le permette. Votre cousine, qui, comme toutes les femmes, doit avoir une vocation d'infirmière, se fera un plaisir de vous tenir compagnie jusqu'à Soledad, conclut le major avec un regard de biais à Charles Desteyrac.
     
    Murray demeura un long moment silencieux, comme terrassé par l'adversité. Il attendit que le major eût quitté la pièce pour s'adresser à Desteyrac.
     
    – Pensez-vous que ce maudit Carver a aussi éventé la décision d'Ottilia de quitter le Phoenix aux Bermudes ?
     
    – Je l'ignore mais, comme je commence à le connaître, il ne s'y opposera pas plus qu'il ne se serait opposé à votre fugue si vous aviez été ingambe. Mais il serait peut-être mieux que lady Ottilia restât près de vous jusqu'à ce que vous puissiez vous déplacer avec des béquilles. Après tout, elle est votre cousine, émit Charles, un rien moqueur.
     
    – Vous ne connaissez pas Ottilia ! Quand elle a pris une décision, rien ne l'arrête. Serais-je à l'article de la mort qu'elle suivrait sa voie sans se retourner. Elle n'a jamais manifesté de compassion à quiconque, dit Malcolm, irrité.
     
    – Votre dévoué valet saura sans doute prendre soin de vous.
     
    – Je vais le congédier, ce traître ! Il va débarquer et retourner en Angleterre. Il portera à ma mère une lettre expliquant ce qui m'est arrivé. Peut-être pourra-t-elle fléchir mon père et le convaincre de me laisser rentrer à Londres dès que je serai en état de voyager. Soledad n'est qu'à trois ou quatre jours de New York, où l'on trouve tous les navires qu'on veut pour l'Europe. D'ici là, je resterai seul et sans ami, murmura Murray d'une voix lamentable.
     
    – Eh bien, en attendant que vous puissiez vous tenir debout et manier une épée pour vider notre querelle, considérez-moi comme un ami, et cessez de vous lamenter. Vous auriez pu vous casser le dos, ou être enlevé par une lame. À l'heure qu'il est, vous serviriez de hors-d'œuvre aux requins, dit Charles, sincèrement cordial.
     
    – Oublions ce duel, monsieur, j'étais ivre à demi. Vous avez le cœur généreux et j'accepte l'amitié que vous m'offrez non sans mérite, car je ne suis pas d'un caractère facile, dit Malcolm, ému, en tendant à Charles une main potelée de fillette, que le Français serra.
     
    Comme prévu, Mortimer débarqua

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