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Le Pont des soupirs

Titel: Le Pont des soupirs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Dandolo.
    – Elle a parlé… elle va parler encore… dès que le délire lui revient, elle expose toute la conspiration et prononce des noms…
    – Le mien ! haleta Dandolo.
    – Non ; tous excepté le vôtre. »
    Il y eut une minute de silence.
    Léonore entendit un rauque soupir. C’était son père qui si près d’elle, respirait fortement à se sentir rassuré.
    Elle comprit tout !
    Elle avait eu le délire, elle avait dit ce qu’elle savait, et Altieri s’était installé chez elle pour la surveiller !… Et maintenant, il en appelait à Dandolo, le père de la mourante, pour prendre sans doute quelque terrible résolution.
    « Peut-être, continuait Altieri, ne sait-elle pas que vous êtes des nôtres ; ou peut-être même, dans son délire, l’idée de ne pas vous dénoncer, vous, son père, demeure-t-elle vivante…
    – Ainsi, elle dit tout !… tout, excepté mon nom !
    – Tout excepté cela !
    – Mais si on l’entendait !… oh ! si on l’entendait !…
    – Il est certain que si nous étions arrêtés, vous le seriez fatalement ! »
    Encore un silence.
    Léonore percevait le frémissement des deux hommes près d’elle.
    Altieri reprit :
    « Le délire lui vient le soir, et dans la nuit ; maintenant, elle dort tranquille… Oh ! ces nuits… Quelques-unes encore semblables à celles que j’ai passées là écoutant aux portes, le poignard à la main, prêt à tuer quiconque aurait entendu, tressaillant au craquement d’un meuble, inondé de sueur au bruit d’une porte qui s’ouvre… oui, encore quelques nuits pareilles, et je sens que je deviendrai fou… Je n’en puis plus, et je vous ai fait venir… vous, son père…
    – Je vous relèverai, dit vivement Dandolo. Reposez-vous, je veillerai à votre place… »
    Altieri secoua tragiquement la tête.
    « Il n’est pas question de repos, dit-il sourdement.
    – De quoi est-il question ? » demanda alors Dandolo d’une voix où Léonore surprit la profonde angoisse de l’être qui se débat devant quelque catastrophe prochaine.
    Et tout à coup Altieri prononça :
    « Il ne faut pas qu’on l’entende !… Et pour cela il n’y a qu’un moyen… un seul…
    – Un moyen ? balbutia le père dont les cheveux se hérissèrent d’horreur.
    – Oui : il ne faut plus qu’elle parle !… Ecoutez… vous savez si j’ai aimé votre fille, et si je l’aime encore…
    – Taisez-vous ! oh ! c’est affreux…
    – Je l’aime, vous le savez bien, par l’enfer ! Je l’aime et c’est ce qui cause mon désespoir. Elle me hait, me méprise, me maudit. Et moi, je l’aime… Et je n’en puis plus. Il faut que je meure – ou qu’elle meure !
    – Taisez-vous ! gronda le père.
    – Je ne me tairai pas ! Car je vous ai fait venir à bout de forces, pour vous dire cela, pour que vous preniez votre part de la fatalité qui m’accable. C’est vous qui me l’avez donnée… Donnée ! Dérision ! Vous ne savez pas que depuis le jour de notre mariage, nous vivons étrangers l’un à l’autre ! Mille fois j’ai été sur le point de la tuer ! Mille fois je me suis approché d’elle pour en finir avec une telle torture, en faisant disparaître la cause même de la torture ! C’en est assez, vous entendez ! Je ne puis plus ! Je n’irai pas plus loin… Je l’aime, j’en deviens insensé… et depuis cinq jours, j’ai souffert plus qu’en cinq ans. Je l’ai entendue appeler son fiancé, le supplier, lui demander pardon, lui crier son amour, et chacune de ses paroles a été un coup de poignard pour moi… Et voici que pour comble, elle devient une menace de mort… C’en est assez, vous dis-je ! Voulez-vous vivre désormais dans une perpétuelle terreur, être à la merci d’un caprice de femme, d’un mouvement de vengeance ! Dites… voulez-vous finir, vous aussi, sur l’échafaud ?…
    – Ma fille ! ô ma fille !… » murmura Dandolo.
    Et la terreur, une fois de plus, l’emporta dans l’âme misérable de ce père. Seulement, pour sauver sa fille, il essaya d’une faible tentative.
    « Peut-être, bégaya-t-il, ne parlera-t-elle jamais plus de ces choses !… Peut-être, quand elle sera guérie, obtiendrez-vous d’elle l’assurance d’un silence absolu… Oh ! grâce… attendez… je suis sûr que ma fille se taira… »
    A cet instant, Léonore fit un mouvement.
    Les deux hommes, pantelants, se turent et la regardèrent.
    Elle se tourna vers eux, ouvrit

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