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Le Pont des soupirs

Titel: Le Pont des soupirs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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pensées qui toutes, à ce moment, se concentraient sur Léonore.
    Son retour dans Venise avait ravivé les souffrances qui s’étaient apaisées pendant ces quelques jours de route.
    Lorsqu’il avait vu Bembo, il avait eu un moment de fureur. Mais il s’était calmé. Il n’entrait pas dans son plan de tuer cet homme sur-le-champ.
    Bembo ayant quitté l’Arétin, comme on a vu, Roland était sorti de la pièce où il s’était caché.
    « Ai-je parlé selon vos intentions, maître ? avait demandé l’Arétin.
    – Oui.
    – Et quant à la proposition que m’a faite Bembo de le prévenir si vous reveniez chez moi, que faudra-t-il faire ?
    – Eh bien ! mais il faudra le prévenir. Je ne vois pas pourquoi je vous priverais de la forte somme qui vous est promise. »
    L’Arétin avait ouvert de grands yeux ébahis.
    « Seulement, avait ajouté Roland, je me réserve de vous indiquer le jour où il sera bon que vous préveniez votre excellent ami. D’ici là, silence. »
    Là-dessus, Roland était sorti à son tour.
    Son intention était de retrouver Scalabrino et de courir aussitôt à la Grotte Noire.
    Il se rendit donc à la maison du port.
    Mais Scalabrino ne s’y trouvait pas.
    « Pourtant, songea Roland, les huit jours sont écoulés. Que se passe-t-il !… Bembo délivré… Scalabrino absent, tué, peut-être !… Allons à la Grotte Noire. »
    Il s’habilla, se fit un nouveau visage, sortit et gagna le Grand Canal.
    Un grand trouble agitait ses pensées.
    Si près du palais Altieri, si près de Léonore, il ne pouvait se résoudre à quitter encore Venise. Ce vague espoir qui conduit les passionnés lorsque l’amour se trouve surexcité en eux le retenait hésitant sur les bords du canal.
    Il eut un geste de découragement, s’en alla rôder pendant quelques heures dans l’île d’Olivolo, puis il se retrouva aux abords du palais Altieri sans qu’il eût décidé quoi que ce soit de positif.
    Maintenant, il en venait à douter de la nécessité d’une vengeance.
    « A quoi bon, puisque jamais plus il ne reverrait Léonore ! Ou du moins, s’il la revoyait, ce serait de loin, et pour souffrir encore. »
    Oui ! à quoi bon se venger ! à quoi bon agir ! à quoi bon vivre !
    Et il eut cette étrange sensation que la vie pesait sur lui d’un poids formidable et que ce qui pouvait lui arriver de mieux, c’était de mourir !… Renoncer !… Oublier tout dans la mort !
    Il était dans cette situation d’esprit lorsqu’il s’aperçut que la nuit venait peu à peu : il s’éloigna, marcha au hasard, passa non loin du palais d’Imperia, puis, las d’une immense lassitude, se dirigea vers la maison du port comme vers une sorte de refuge où il cherchait un peu de repos pour le corps, un peu de calme pour l’esprit.
    Arrivé dans cette chambre où était morte sa mère, où rien n’avait été changé depuis des années, il retrouva en effet un peu de calme.
    Toute son exaspération de la journée, toute sa douleur se fondit et quelques larmes brûlantes glissèrent sur ses joues.
    Il se mit à se promener lentement, songeant parfois à ce Foscari à qui il venait de porter un si rude coup, tantôt à ce Bembo qui lui échappait.
    Tout à coup, il perçut un léger craquement à la porte et s’arrêta court.
    Presque au même instant, un deuxième craquement retentit, mais plus fort ; il y eut un violent déchirement, la porte s’ouvrit toute grande, et les quatre sbires firent irruption dans la chambre.
    D’un coup de poing, Roland renversa le flambeau qui éclairait la chambre, et, sans un mot, s’accula d’un bond dans l’angle le plus lointain de la porte, c’est-à-dire près de la fenêtre.
    Les quatre sbires s’avancèrent de front, le poignard à la main.
    L’un d’eux gronda :
    « Rends-toi, allons ! »
    Roland assura dans sa main le large poignard qu’il avait tiré. Dans l’ombre, il compta les sbires. Ils étaient quatre.
    Leurs attitudes ramassées, leur démarche ferme et prudente, leur manœuvre, tout prouva à Roland qu’il avait affaire à des hommes déterminés.
    Il comprit qu’il était perdu.
    En effet, il pouvait bien porter deux ou trois coups décisifs, mais il était certain qu’il serait atteint lui-même.
    Ces quatre sbires qui, en plein air, eussent été une force insignifiante pour Roland, devenaient, dans cet espace resserré, une véritable machine prête à le broyer.
    Il s’apprêta à mourir en se défendant

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