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Le Pont des soupirs

Titel: Le Pont des soupirs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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soudain.
    Dans la nuit, des ombres confuses apparaissaient immobiles… des gens qui se dissimulaient, des sbires.
    Doucement, sans bruit, il s’aplatit sur le mur, et chercha à compter les sbires. Ils étaient nombreux, et placés sur une ligne qui se perdait dans l’obscurité à droite et à gauche. Roland se laissa retomber dans le jardin.
    Il le coupa diagonalement et, retrouvant le mur d’enceinte, se hissa à la force du poignet, ne laissant dépasser que sa tête. Un coup d’œil lui suffit pour se convaincre que ce côté-là aussi était gardé. Il renouvela l’expérience sur un troisième point, et les mêmes ombres lui apparurent, silencieuses, immobiles.
    Le jardin était cerné de toutes parts !… Roland comprit alors.
    A cet instant, il retrouva tout son sang-froid. Les visions disparurent ; les songes s’effacèrent. Il n’y eut plus en lui de vivant que l’instinct de la bête traquée qui veut fuir.
    Songeur, très calme, il marcha vers le centre du jardin, vers le cèdre.

    *
    * *

    Mais au moment où il se mettait en marche, il entendit derrière lui un léger bruit. Il se retourna et vit une tête qui dépassait la crête du mur ; l’instant d’après, une autre apparut, puis une autre, de place en place. Les ombres de tout à l’heure s’étaient mises en mouvement et elles escaladaient le mur.
    Tout autour de lui, Roland vit la crête du mur se hérisser de choses mouvantes et silencieuses ; il y eut des glissements mous, puis tout à coup plus rien : les sbires, sans bruit, étaient retombés vers le jardin.
    La pensée de Roland, à cette minute, fut :
    « Qui a pu leur faire savoir… me dénoncer ?… »
    Il eut un sourire et murmura :
    « Imperia !… »
    Il atteignit le cèdre. Son ombrage de feuilles, que l’hiver n’arrache pas, faisait là, une nuit plus épaisse. Roland s’arrêta. Il vit les ombres qui maintenant rampaient, formant un large cercle infranchissable. Les sbires guettaient.
    Quelques minutes encore et ils seraient sur lui.
    Roland tira son poignard et s’apprêta à mourir.
    Mourir ! Là !… Sous ce cèdre où il avait tant aimé !…
    A ce moment, minuit sonna…
    Et comme le dernier coup tintait dans la nuit, Roland, de sa voix extasiée de mourant, répéta :
    « Léonore ! Léonore !…
    – Me voici, Roland ! » dit une voix faible comme un souffle.
    Roland demeura sur place, figé par la surprise.
    Léonore était là, aimante, fiancée de son âme !
    Et comme hier, elle allait lui dire :
    « Minuit, mon cher seigneur… quittons-nous jusqu’à demain !… »
    Elle allait, comme hier, prendre sa main et l’accompagner jusqu’à la porte du jardin !… Et il frissonna éperdu, flottant sur les vertigineux abîmes où sombre la raison, lorsqu’il vit Léonore habillée telle que jadis, de ses vêtements de jeune fille, belle, plus belle encore, belle comme un rêve d’amour, svelte et harmonieuse… Seulement, le sourire n’était plus sur ses lèvres figées !… oui, il vit Léonore,
comme hier,
lui prendre la main, et elle l’entraîna !
    Il se laissa conduire, épouvanté seulement d’une délicieuse épouvante, à cette sensation inouïe que la main moite et parfumée qui était dans sa main fût vraiment la main de Léonore !
    Tout à coup, il se trouva dans la maison Dandolo, devant cette porte que tout à l’heure il n’avait pas ouverte. La chambre que Léonore, jeune fille, avait occupée…
    La nuit était profonde.
    Mais il continuait à la voir comme en plein jour. Il lui semblait qu’elle dégageait une lumière radieuse…
    Il la vit qui ouvrait la chambre et qui faisait un signe…
    Il entra… la porte se referma… Léonore disparut…
    Alors il tomba à genoux, ses bras se tendirent et les sanglots furieux roulèrent dans sa poitrine et montèrent à sa gorge oppressée. Léonore était descendue au rez-de-chaussée.
    Avec la morbide tranquillité d’une personne en état de somnambulisme, elle alluma un flambeau et attendit !…
    q

Chapitre 25 ELLE ET LUI
    A près sa lutte avec Imperia, Léonore avait quitté sans hâte le palais Altieri. Dehors, l’air vif et léger rafraîchit son front brûlant, serré comme dans un étau. Elle put réfléchir. Elle se dirigeait instinctivement vers le palais Dandolo. Mais lorsqu’elle fut devant la maison qu’habitait son père, une répugnance lui vint à se trouver en présence du Grand Inquisiteur qui, sans aucun doute, à ce même

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