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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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lui avait donné une fille, Beatrice, qu’il aimait plus que tout au monde. Oui, ils avaient été heureux et tranquilles, de vrais coqs en pâte, jusqu’à l’arrivée de ces Frères du Libre Esprit.
    Au début, Claypole s’était méfié, mais même lui avait succombé à leur charme, et à celui, surtout, de la jeune Ève avec son visage ovale, ses beaux yeux et ses longs cheveux blonds tombant sur ses épaules. Il se remémora le plaisir coupable qu’il avait pris aux festivités de la foire aux cerises. Il faisait bon en ce dimanche soir ; les vêpres avaient sonné. Claypole s’était trouvé seul avec elle, loin des autres, au fond de la cerisaie. Il avait bu beaucoup de clairet. Il avait dégrafé son corselet pour  tâter et caresser ses seins généreux, tandis que, les lèvres posées sur le visage du maire, elle lui susurrait des mots doux alors qu’ils étaient étendus ensemble, comme des amants. Ensuite Claypole avait voulu la payer, mais Ève, moqueuse, s’était contentée de rire, en prétendant que ses pièces ne valaient pas ce qu’elle lui avait donné. Que les chiens ne font pas des chats. Il n’avait pas compris ce qu’elle voulait dire jusqu’à ce qu’il entende les ragots après la messe matinale ou aux réunions, ici, à l’échevinage : la rumeur courait que sa Béatrice était fort éprise du jeune Seth. Il avait surveillé son innocente fille comme un matou surveille un trou de souris. Il avait constaté, horrifié, qu’elle se glissait hors de la maison dès potron-minet, sous prétexte d’aller voir une telle ou une telle, mais il avait appris de quoi il retournait. Beatrice rencontrait son amoureux dans le verger. Les commérages allaient bon train. Puis Lord Scrope, cette ombre noire planant sur sa vie, l’avait convoqué au manoir pour lui montrer les menaces et avait, à voix basse, évoqué le danger que représentaient les Frères du Libre Esprit...
    Troublé, Claypole se frotta les lèvres d’un revers de main. Il n’osait pas mécontenter Scrope – si ce dernier mourait sans héritier, Claypole avait l’intention de faire valoir ses droits. Scrope ne lui avait jamais avoué la vérité, mais n’avait cessé de l’agiter comme un leurre au bout d’une corde. Alice de Tuddenham avait-elle été légalement son épouse ? Si c’était le cas, alors Claypole était son héritier légitime. Oui, mais comment pourrait-il le prouver ? Les registres établissant la parenté à l’époque de sa naissance avaient disparu du coffre paroissial. Était-ce l’oeuvre de Scrope ? Ou du père Thomas, qui onc ne les avait vus, affirmait-il ? Ou de Dame Marguerite, que ses prétentions avaient toujours contrariée ? Pourquoi Scrope n’avait-il pas proclamé la vérité ? Était-ce ce qu’il voulait, appâter son supposé fils illégitime pour l’entraîner dans d’infâmes projets, comme, par exemple, s’acoquiner avec Le Riche ou ses semblables ? Claypole frissonna. C’était là le péril. L’avidité de Scrope pouvait encore les faire accuser de trahison.
    — Messire ?
    Claypole tressaillit et lança un regard par-dessus son épaule. En demi-armure, le capitaine des gardes de la ville attendait. Il annonça que les hommes étaient rassemblés en bas, que les chevaux étaient harnachés et prêts.
    — Nous devrions partir à présent, Messire !
    Le maire soupira, jeta sa chape sur ses épaules, fit claquer le fermail et desserra d’un cran son ceinturon. Seuls des morts les attendaient à Mordern, mais il devait néanmoins se montrer prudent ! Il regarda par la fenêtre. Un cavalier était entré dans la cour et mettait pied à terre. Maître Benedict était arrivé. Il était temps de s’en aller. Claypole descendit, adressa un signe de tête au capitaine des gardes et se jucha sur un socle de pierre.
    — Nous devons nous rendre à Mordern ce matin. Pour achever le travail, déclara-t-il. Vous savez que les envoyés du roi sont ici. Nous sommes chargés d’enterrer de façon décente ou de brûler les dépouilles des félons que nous avons tués. Elles disparaîtront, d’une façon ou d’une autre.
    Le silence accueillit ses paroles. Il nota regards torves et murmures tout en saisissant la bride de sa monture et en se mettant en selle. La tâche inspirait de la répugnance. Il en avait averti Scrope dès le début. Ils auraient dû ensevelir les cadavres et les oublier. Et voilà qu’il leur fallait retourner de sang-froid là où le

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