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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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entremise, me permet de te quitter.
    – Dieu ! Dieu ! Tu n’as que cela en bouche.
    – J’ai eu bien d’autres choses, ces temps derniers… Et je la rincerai à la première source.
    Paindorge, Jean et Beltrame avaient armé leur arbalète. Callœt brandissait gaiement sa feuille de boucher. Morsang, de son épieu, menaçait le ventre de Panazol, pâle d’indignation.
    – Jabeuf ! cria le Breton, entre à l’écurie et sors nos chevaux. Ils sont sellés.
    Comme Herbulot faisait un mouvement, un carreau décoché par Jean se ficha dans son épaule – et la traversa. L’homme tomba sans un cri et se convulsa sur le sol.
    – Que cela vous serve de leçon, dit Paindorge… Vous, Ydoine, allez aider Jabeuf !
    Tristan se délectait. Ils étaient moins fiers, tout à coup, ceux avec lesquels il avait bu et mangé deux fois par jour en leur donnant sa déchéance en spectacle. Unis dans une répugnance qui convergeait sur sa personne – d’autant plus ulcérante qu’elle était muette et d’autant plus affirmée qu’elle recevait l’agrément de Mathilde –, ils étaient encore unis, cette fois, mais désarmés, incapables de se revancher sans exposer leur vie.
    – Aquoisez-vous (451) , les garçons, comme vous m’avez enseigné à le faire.
    – On t’aconsuira 120 , Castelreng, promit Panazol. Je t’aurai !
    – Défie-toi de ta jactance. Elle ressemble à celle de ton maître ! Pourquoi, dis, l’as-tu quitté ? Pour foutre la baronnesse de temps en temps ?
    Tristan sentit frémir Mathilde. Il la serrait de près, une fois encore, mais différemment. Il remarqua qu’Itier, le conduiseur de litière, semblait se réjouir qu’il y eût enfin quelque chose de nouveau à Montaigny : il souriait de biais tout en clignant de l’œil sans que l’éclat du soleil en fût cause. Les autres rongeaient leur frein. Les feux à demi éteints de leurs regards exprimaient, davantage encore que de la fureur, l’ignominie de leur servitude et l’abêtissement de leur cervelle. Il y avait les gros : Roussel, Olivon, Lafourcade ; les maigres : Fouchard, Jalloux, Haudecœur, Vouillon ; les barbus à l’odeur hircine : Fèvre, Gaudin, Plumet. Pradeau. Les tors : Lalou, Marcigny, Fresquin, Bouteville. D’autres encore, au second rang, tous ébahis de ce qui leur advenait : celui qu’ils appelaient le bec-jaune ou le damoiseau, celui qu’ils observaient en se poussant du coude, les avait en quelque sorte vaincus. Meute ignoble, elle aussi, ni moins ni pire que celle des veautres : elle ne dévorait point, mais trouvait sans doute dans le viol, les tourments, l’occision, des jouissances aussi délicieuses que celles de leur maîtresse en ses copulations.
    Tristan se tourna vers les soudoyers de Guillonnet de Salbris et ne se soucia point des griffes de Mathilde sur le revers de sa dextre :
    – Je vous regracie, compères, du secours que vous m’avez apporté.
    – Vous devriez nous laisser la baronnesse, dit Callœt. Non pas pour que nous la contentions, quoique, d’après ce que je vois, elle est encore bonne à quelque chose, mais pour avoir vos aises. Malaquin, sans son poids, galoperait bien mieux !
    – Ne me laisse pas ! supplia Mathilde après qu’un frisson l’eut parcourue de la croupe aux épaules.
    Tristan glissa son tranchelard dans sa ceinture tout en talonnant Malaquin. Le tablier du pont trembla sous les sabots alertes, et ce furent enfin les arbres et les champs. Il serra plus fort Mathilde, prenant un âcre plaisir à sentir contre sa main le branlement des seins offerts au vent et au soleil. Elle ne le trou blait point. Bien que son ventre touchât à ce dos et ce râble dont les tressautements n’étaient point tous innocents, il demeurait indifférent à ce qui n’était pas cette forêt dans laquelle ils avaient chevauché ensemble, en époux, sous haute surveillance. Il fut près de chanter quand les eaux du Serein miroitèrent parmi les fourrés et les troncs d’une hêtraie.
    – Où allez-vous ? demanda Mathilde d’une voix faussement feutrée.
    – Maintenant, je ne sais, mais demain à Paris.
    – Même si vous y parvenez, jamais vous n’obtiendrez le divorce.
    – Peut me chaut, présentement, de l’obtenir ou non. De bonnes lettres de rémission feront de moi le plus heureux des hommes… et des chevaliers.
    Tristan aperçut une berge déclive. Il y mena Malaquin. Si la meute était lâchée, elle perdrait leurs traces à partir de ce

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