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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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de gaieté quelque chose de morne et de pesant se fut insinué parmi eux.
    – La salaude ! dit Morsang. Savez-vous qu’il a fallu que je la trousse et la boutecule un matin qu’elle m’avait vu entrer dans l’une des tours portières ?… Je l’ai fait, puisque je savais que vous vous détestiez.
    – Et moi, dit Buzet, j’ai vu le Panazol, un soir, à l’écurie, la foutre debout contre une grosse poutre de la sellerie…
    – Cessez de discourir, compères ! Je ne veux plus que nous en parlions…
    Afin d’annihiler tout autre désagréable confidence, Tristan changea immédiatement de propos :
    – Je ne sais, les gars, ce que nous ferons avant que le roi décide de me recevoir… Il me faut des lettres de rémission et un brevet 125 pour le pape. Mon mariage doit être dissous.
    – Il l’est, messire, grâce à la Providence.
    – Que veux-tu dire, Callœt ?
    – Rien… Rien d’autre que ce que je dis… Vous êtes à Paris, elle est là-bas… Une chose est sûre : nous demeurerons près de vous… Vous êtes pauvre, dites-vous… On saura bien trouver de quoi nous vêtir et manger… Le roi vous reprendra parmi ses hommes liges.
    Disant cela, Callœt remuait, sur le faucre de son étrier, le manche au bout duquel sa feuille de boucher scintillait au soleil.
    – Guerre aux Goddons ! s’écria Paindorge. Guerre aux routiers ! Voilà, me semble-t-il, de belles chevauchées. Si c’est le roi ou le dauphin Charles qui nous les commande, nous serons tout de même à butin !
    – À la bonne usance, précisa Buzet qui, bien que jeune, révélait ainsi son appétit 126 .
    – Au prix d’une esguillette, rectifia. Beltrame.
    – Eh bien, sourit Tristan, vous êtes moins unis que je ne le croyais !
    – Unis comme les doigts d’une main, dit Callœt. Aucun ne ressemble à son voisin, et pourtant si quelques-uns viennent à manquer, ceux qui demeurent ont une rude tâche !… Qu’en penses-tu, Morsang ?
    – Je pense bonnement que la Seine est à dextre… Et que vos parlures m’emmerdent !
    Ils obliquèrent à travers champs, se suivant à la queue leu leu, passant de l’ombre des ormes et des frênes aux clartés du plein midi ; répondant aux saluts des hurons et manants qui à pied, à cheval ou en charrette à bœufs semblaient revenir de Paris. Quelques maisons aux toits d’essentes, entourées d’enclos, parsemaient la colline. À travers les trouées de leurs hezes (456) , on voyait, alignées, des plantations de raves, de choux, de fèves. Invisibles, mais vigilants, des chiens aboyaient. Aucune friche, quelques bosquets de chênes et des haies d’aubépine : cette contrée avait la netteté des lieux épargnés par la guerre.
    – Je ne suis jamais venu jusqu’ici, dit Tristan. Toute ma vie, du temps que j’étais à Paris, se réduisait à des séjours au palais royal et à Vincennes… Certes, je suis allé batailler à Poitiers, puis j’ai dû me rendre en Bourgogne, mais je m’ennuyais… Et je comprends seulement pourquoi, compères : je préfère mon pays natal à tous ceux que j’ai traversés.
    – Revenez-y, messire, et nous vous y suivrons.
    – Le roi, Paindorge, me dira ce que je dois faire…
    Vous savez pourquoi je crains de le revoir… Mais n’y pensons plus… Nous approchons de la Seine. Un bon bain nous fera du bien… Callœt, tu seras à nouveau mon barbier… et celui des autres : il nous faut être propre, les gars… Voyez, l’eau nous attend.
    En bas, l’on devinait, sous des peupliers et des saules, le cours sinueux du fleuve sur lequel passait une hourque tirée par deux chevaux.
    Ils s’engagèrent entre des maisons plantées de guingois où, sur les appuis des fenêtres, des narcisses cernaient les lames des glaïeuls.
    Puis ce furent des champs et une grande vigne ceinte d’un bourrelet de pieux et de rochers au-delà duquel ils virent enfin Paris, sur leur gauche : une étendue de bâtiments grisâtres, coiffés de tuiles et de bardeaux, derrière des murailles d’où surgissaient les tours de Notre-Dame et celles de maintes autres églises dont, justement, les voix de bronze s’interpellaient.
    – Midi juste, dit Tristan.
    « Me voici enfin à Paris !… Où est-elle ? Où Tiercelet l’a-t-il emmenée ? Chez mon père, sans doute… Il faut que ce soit à Castelreng ! »
    –  Aurions-nous des chableaux 127 ou des chaînes de toue, dit Morsang, que nous aurions pu gagner quelques pièces en attelant

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