Le Pré-aux-Clercs
importance à faire.
Lui, comprenant qu’il n’y avait pas un instant à perdre, s’était mis aussitôt en quête de cette corde qu’elle lui avait demandée.
« Ainsi, dit Beaurevers, quand il eut entendu ces explications, vous êtes sûr qu’il n’est rien arrivé de fâcheux à cette brave enfant ?
– Oh ! tout à fait. Elle s’est dirigée vers la porte de Nesle. Donc, elle est rentrée à Paris. Or, comme j’ai pu constater qu’il n’y avait ni trouble ni désordre dans la ville je suis tranquille.
– Tant mieux », fit distraitement Beaurevers.
Et en lui-même, il se disait :
« Que diable Fiorinda avait-elle donc de si important à faire dans Paris, qu’elle a préféré confier à Ferrière la mission dont elle-même avait voulu se charger ?… »
Cependant, Beaurevers avait, pour l’instant, d’autres soucis en tête pour s’attarder plus longtemps à s’occuper de Fiorinda. Il n’y pensa plus.
Ils étaient arrivés au pied du mur. Nous avons dit qu’il n’était pas très haut. Ce fut un jeu pour eux de l’escalader. Et ils se trouvèrent dans la partie des jardins qui dépendaient des maisons en bordure sur le Chemin-aux-Clercs.
Nous avons dit que ces maisons ne se touchaient pas, pour la plupart du moins, et étaient reliées entre elles par le mur de clôture qui était très haut celui-là. Ils ne se dirigeaient pas vers les maisons. Ce fut vers un de ces pans de mur qu’ils allèrent, dans l’intention de franchir, de sauter sur le chemin et de faire une trouée dans le cordon des gardes qui se tenaient sur ce chemin.
Dans leur course à travers ces jardins, ils n’avaient rencontré personne. Ils pouvaient croire que leur évasion avait passé inaperçue.
Ils se trompaient.
Au moment où ils approchaient du mur, un homme était arrivé en courant rue des Marais et avait glissé quelques mots à l’oreille de Guillaume Pentecôte, qui avait lâché un juron retentissant. À ce moment, sa bande était réduite à une vingtaine d’hommes tout au plus. Mais il avait encore autour de lui une cinquantaine d’individus louches dont la moitié au moins n’hésiterait pas à se joindre à lui s’il faisait appel à eux :
En effet, il n’eut qu’à crier :
« Les damnés parpaillots ne sont pas grillés !… Sus ! Ne les laissons pas échapper ! »
Il entraîna ainsi avec lui une vingtaine de volontaires du meurtre. Ce qui doublait à peu près ses forces. Des autres, une partie, patients et tenaces dans l’espoir d’un mauvais coup productif, ne voulut pas quitter la place. Les autres, découragés, s’en allèrent par petits paquets.
Le départ de Guillaume Pentecôte et de ses acolytes permit aux voisins, directement menacés par le sinistre, de s’activer pour éteindre le feu, ou tout au moins de l’empêcher de se propager, ce qu’on leur avait interdit de faire jusque-là.
Guillaume Pentecôte et sa meute de forcenés s’étaient élancés sur la prairie qu’on appelait le petit Pré-aux-Clercs pour gagner de là le Chemin-aux-Clercs.
Pendant ce temps, comme nous l’avons dit, Beaurevers et ses compagnons étaient arrivés au pied du mur. Beaurevers les avaient conduits presque à l’angle de droite, c’est-à-dire au côté le plus rapproché de la prairie. Le côté, par conséquent, par où devaient déboucher Guillaume Pentecôte et sa meute. Là, le chevalier leur dit froidement :
« Messieurs, puis-je toujours disposer de vous à ma guise ?
– Monsieur, répondit l’un des deux officiers, je ne me tiendrai pour dégagé que lorsque vous m’aurez rendu ma parole, ou lorsque nous serons tous hors de danger. Et voici ces messieurs qui, j’en suis sûr, vous diront comme moi. »
En effet, les quatre autres approuvèrent.
Beaurevers remercia d’un léger signe de tête. On eût dit qu’il était gêné, presque honteux. Et ce fut avec une certaine hésitation qu’il prononça comme s’il éprouvait le besoin de s’excuser :
« Ce que je vais vous demander, messieurs, vous paraîtra peut-être singulier… Je vous assure pourtant qu’il ne m’est pas possible d’agir autrement. »
Il s’arrêta embarrassé.
Mais les deux officiers huguenots s’étaient pris pour lui d’une admiration enthousiaste. Voyant son embarras, ils l’encouragèrent :
« Monsieur, dit l’un, nous sommes des soldats. C’est vous dire que nous savons obéir sans discuter. Donnez donc vos ordres sans crainte
Weitere Kostenlose Bücher