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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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gravit quatre à quatre l’étroit escalier menant au chemin de ronde. Appuyé contre la courtine, la sueur lui piquant les yeux, il banda l’arbalète et plaça le carreau avec force jurons. Il entendit alors un concert d’aboiements frénétiques : deux mastiffs arrivaient lourdement au coin de l’enceinte, en contrebas. Il prit la torche et la jeta. Les bêtes s’arrêtèrent, levèrent la tête et grondèrent. Dans la lueur tremblotante, Corbett eut le temps de voir leurs mufles maculés de sang.
    — Salauds ! beugla-t-il. Fils de Satan !
    Les chiens se jetèrent sur le portail. Corbett se mit soudain à rire.
    — Très bien, salauds ! hurla-t-il. Ne bougez pas !
    Il arma l’arbalète et, penché sur la courtine, relâcha la détente. Le carreau fila en vrombissant et atteignit le chef de meute à la nuque, s’enfonçant profondément dans la chair et tranchant la colonne vertébrale. Corbett poussa un cri de joie. La bête bondit en l’air en un dernier spasme terrifiant avant de s’écrouler, s’étouffant dans son sang. Maugréant, Corbett réarma l’arbalète. Cette fois-là, il se montra maladroit. Le trait partit en sifflant et alla égratigner l’arrière-train de l’autre chien qui s’enfuit dans l’obscurité en glapissant. Le clerc s’accouda à la courtine et vomit immédiatement. Puis, au bout d’un moment, il reprit ses esprits et redescendit d’un pas mal assuré jusqu’à la loge du portier.
    Ranulf était assis près de la porte, dos au mur, le visage blême et couvert de sueur, le devant de son surcot taché de vomissures. Le portier, accroupi à ses côtés, était trop ivre pour leur être d’un quelconque secours. Corbett se versa du vin, en but, puis mit le gobelet de force entre les lèvres de son serviteur, ordonnant d’un ton rogue au portier d’apporter une couverture.
    On frappa à la porte. Dame Amelia, accompagnée de Dame Catherine et de Dame Frances, entra d’un pas vif. Elles s’étaient emmitouflées de couvertures, mais leurs visages étaient pâles et leurs paupières lourdes de sommeil.
    — Que se passe-t-il, Messire ?
    — Rien ! répondit-il, grinçant, hors de lui.
    Il vit que Ranulf reprenait des couleurs et se leva.
    — Je suis désolé, murmura-t-il. En revenant de Woodstock, nous avons été poursuivis par des chiens de guerre.
    Dame Amelia le regarda sans comprendre.
    — Des chiens, expliqua lentement Corbett, dressés à pourchasser et à tuer des êtres humains.
    N’ouvrez pas les portes cette nuit ! Ils nous auraient massacrés ! Je vais vous dire quelque chose : nous devons notre salut à un malheureux – un colporteur ou un vagabond. Lui l’a payé de sa vie, là-bas, dans la nuit !
    Comme pour tourner ses paroles en dérision, un hurlement rauque et lugubre s’éleva dans les ténèbres derrière le mur d’enceinte. Dame Amelia se tourna froidement en direction du bruit.
    — Dame Catherine, s’exclama-t-elle avec autorité, alertez les paysans ! Sonnez le tocsin ! Que l’on vérifie toutes les issues : il faut qu’elles soient solidement fermées et barrées. Que personne ne sorte du prieuré ! Corbett, suivez-moi !
    Tandis que résonnaient le tocsin et le bruit de courses précipitées, elle conduisit Corbett et Ranulf à l’infirmerie, harmonieux bâtiment d’un étage à côté du réfectoire. La soeur infirmière, un vieux dragon, les enveloppa d’épaisses couvertures et les força à boire du vin chaud épicé. Ce n’est que lorsqu’il ferma les yeux et s’abandonna au sommeil que Corbett comprit que la boisson avait dû être légèrement additionnée d’une potion destinée à les endormir.
    Il se réveilla le lendemain matin, les idées claires. Ranulf, déjà levé et débarbouillé, se tenait accroupi près du lit. Il s’était changé et avait apporté à Corbett des chausses et un pourpoint propres.
    — C’était un cauchemar, Messire !
    — Oui, Ranulf, un cauchemar.
    Il rejeta la couverture et constata avec plaisir qu’il ne se ressentait en rien de l’épouvantable poursuite de la veille.
    — Bon, dit-il, je vais me laver, me raser, me changer et prendre un petit déjeuner copieux. Puis, en avant pour Woodstock, armé et à cheval ! Je suis bien décidé à en découdre avec ce foutu pervers.
    Ranulf grimaça un sourire. Corbett sortait rarement de ses gonds, mais quand cela se produisait, c’était un vrai bonheur !
    — Est-ce prudent, Messire ?
    — Que cela le

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