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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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l’esprit cette entrevue de Meaux, je me
trouvais excessivement chagriné que le chattemitique parti de la guerre
(ha ! Les beaux yeux du Guise ! si clairs ! si bleus ! si
faux !) l’eût emporté une fois encore sur l’humanité de mon maître et son
souci du pauvre peuple de ce dolent royaume. Ha ! Je le dis encore, comme
tout m’était apparu de bas et mauvais aloi chez le Magnifique ! Quelle âme
de cafard ne nichait en sa seigneuriale enveloppe ! Quel mélasseux
mensonge en son œil, sa voix, sa pensée, sa parole, lui qui avait osé supplier
le Roi de « jeter un regard sur la religion mourante ». Mourant, le
papisme ! Peut-on articuler sans battre un cil tant palpable
fallace ! Plût à Dieu que le papisme fût dans le monde moins gaillard,
corpulent et sanguin ! Il songerait moins à donner la saignée à nos
pauvres huguenots, eux que le cotel, la geôle et le bûcher ont assaillis en ce
pays depuis plus de quarante ans.
    Pressez ce beau Duc. Il n’en sort
que faussetés comme d’un aposthume du pus ! Pour un peu, vous alliez de sa
bouche d’or ouïr que c’est l’Église catholique qu’on va persécuter céans. De
reste, c’est dit déjà !
    Si vos pas, en ce juillet torride,
vous portent au cimetière Saint-Séverin où les foules se pressent, vous y
verrez un grand tableau que la Montpensier, l’ayant commandé à un barbouilleur,
a posé là tout exprès pour émouvoir à la guerre un peuple crédule. On y
représente en couleurs atroces les cruels tourments et les étranges inhumanités
qui sont prétendument exercés par la Reine Elizabeth contre ses sujets
catholiques ; les tenailles, les brodequins, l’estrapade, le pal,
l’écartèlement, la castration, la pendaison, tout y est, sans compter la menue
monnaie des filles forcées et des enfants en broche. À envisager ces horreurs
(dont je n’ai vu trace la moindre en Angleterre) nos pauvres garces de Paris
sanglotent tandis que nos bons garçons grincent des dents, et au retour au
logis, aiguisent leurs couteaux contre les huguenots, dont un guillaume,
commentant la baguette en main ce tableau sublime, leur a dit et répété comme
Évangile qu’il s’en trouve dix mille – comme bien tu sais, lecteur ! –
cachés dans les bauges du Faubourg Saint-Germain qui n’attendent qu’un signal
de Navarre (avec qui on laisse entendre que le Roi est connivent) pour se jeter
sur Paris !
     

CHAPITRE XI
    En août 1587, mais je ne saurais me
ramentevoir le jour, le Roi me dépêcha à Sedan porteur d’un message
extraordinaire au Prince de cette ville, le jeune Duc de Bouillon. Cette
mission étant fort secrète et, de par son caractère, mettant le messager à
grand péril, le Roi commanda à Fogacer de courre le bruit que je m’étais retiré
à Saint-Cloud chez le baron de Quéribus pour tâcher d’y faire les nécessaires
curations à une intempérie, laquelle portait risque d’infection, – ceci
pour détourner les mouches et les ligueux d’y venir fourrer le nez. Et par le
fait, je partis bien ostensiblement pour Saint-Cloud, quasi couché dans ma
coche et pimploché de céruse pour paraître plus pâle (Miroul contant au
voisinage que j’étais au plus mal) mais avec une forte escorte prêtée par
Quéribus, et qui était faite des hommes qui m’avaient jà accompagné à Boulogne,
et dont j’avais acquis le dévouement par les moyens que j’ai dits.
    Le Roi n’ayant pas, pour ma mission,
épargné les écus, je restai à Saint-Cloud le temps qu’il fallut pour acheter
pour tous de très bons chevaux, sachant que les alentours de Sedan
s’encontraient infestés par les troupes de Guise, lesquelles sans assiéger
précisément la ville la tenaient fort à l’étroit, alors même que le Roi lui
avait plusieurs fois mandé d’avoir à retirer ses forces de ces environs, leur
demeure plus outre en ces quartiers lui étant à ennui. Car le Roi,
ostensiblement, protégeait le Duc de Bouillon, combien qu’il fût huguenot, ne
voulant pas que son petit État tombât dans les mains du Guise, lequel avait
déjà saisi Toul et Verdun (mais failli devant Metz) dans le dessein de
verrouiller la frontière par où les princes allemands pouvaient secourir soit
les huguenots, soit le Roi de France.
    La raison pour quoi je voulais de
très saines, vives et gaillardes montures était que j’étais apensé que si nous
tombions sur des guisards à l’approche de Sedan, seule la célérité nous ferait
échapper à

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