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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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périr !
    My Lord Stafford m’emmena avec lui
en sa coche de voyage toutes tapisseries rabattues et, comme il l’avait prévu,
il n’y eut au passage de la porte Saint-Honoré ni embûche ni tracasserie du
fait des ligueux de la milice bourgeoise, le Comte de Brissac que l’ambassadeur
avait prévenu de l’heure de notre départ nous y attendant pour graisser l’huis,
afin qu’il ne nous fût pas claqué au nez par d’aucuns de ces sanguinaires
zélés. Cependant, quel que fût mon appétit de revoir mon bien-aimé maître et de
le servir derechef, là où il lui plairait de m’employer, quand je vis que la
coche prenait, pour gagner Chartres, la route de Montfort-l’Amaury, mû par
l’impulsion du moment, je quis mon hôte de m’y laisser, ardant fort à embrasser
Angelina et mes beaux enfants que de si longtemps n’avais vus. En quoi je fis
bien, pour ce que j’appris en la suite qu’un fort parti de ligueux, agissant de
soi et sans mandat, avait arrêté ladite coche à Rambouillet, et dans les dents
des véhémentes protestations de l’ambassadeur, avait présumé la fouiller, ne
m’y trouvant point par la bonne heure : sans cela, lecteur, tu n’eusses
pas eu l’occasion de lire les présentes lignes, ni aucune de celles qui les ont
précédées, ma grande amour pour les miens me sauvant la vie en cette occasion.
Cependant, avant que de prendre congé de mon hôte, je l’avais quis de dire à
mon Roi que je serais à son côté à Chartres au premier appel, lequel ne vint
qu’en août, comme je dirai.
     
     
    S’agissant d’un moment de si grande
conséquence pour l’avenir du royaume, mon propos n’est pas de raconter ici les
félicités que je trouvai en mes douces retraites champêtres et conjugales après
tout le remuement où j’avais été en Paris, et hélas, tout le péché aussi, ma
conscience me poignant toujours, non pour prévenir ledit péché, ni pour m’en
guérir, mais après coup et toujours vainement, tant est que je me demande s’il
n’est pas dans le remords quelque chattemite ambiguïté grâce à laquelle on se
plaît à se contenter l’âme, dès lors qu’on a satisfait la chair. Et que
d’aucuns sujets du Roi éprouvassent aussi, touchant les affaires publiques, de
grands scrupules à l’avoir chassé de Paris, même s’ils inclinaient à la Ligue,
c’est ce que j’entendis bien à parler avec l’un et avec l’autre en
Montfort-l’Amaury, et en particulier avec le curé Ameline, lequel n’étant ni
tout à plein guisard, ni tout à fait royaliste (comme beaucoup de Français en
ces temps incertains) se demandait s’il devait se féliciter de la victoire de
la Ligue ou déplorer qu’on eût réduit le Roi à telle extrémité et indignité que
de fuir sa capitale.
    Le curé Ameline qui savait les
nouvelles comme j’ai dit déjà par l’abbé De Barthes, confesseur du ministre
Villequier, m’apprit que non pas une, mais plusieurs délégations de ligueux
parisiens étaient allées trouver le Roi à Chartres, pour le prier et supplier
de regagner son Louvre, mais que le Roi, tout en les recevant avec sa
coutumière bénévolence et les assurant même de son pardon, n’y avait voulu
consentir. Il me dit aussi qu’Henri avait employé le révérend docteur médecin
Marc Miron comme truchement entre les princes lorrains et lui-même pour tâcher
de s’accommoder à eux, et qu’un accord s’était fait, le Roi, en l’extrême
faiblesse où il se trouvait, ayant acquiescé à toutes les demandes du Duc de
Guise, lequel obtint de lui que Navarre fût forclos de sa succession comme
hérétique, d’Épernon disgracié, et lui-même nommé lieutenant-général des
armées ; et enfin que les États Généraux fussent convoqués en automne pour
rhabiller les abus dudit royaume, lesquels, s’il eût fallu les ôter à commencer
par le plus gros, on eût bien fait, en mon opinion, par supprimer d’abord le
Guise.
    Mon Quéribus, suivi de sa fastueuse
escorte, me vint voir à la fin août et, à sa façon gaussante et légère, me
conta les nouvelles de la petite Cour de Chartres où il n’y avait pas presse,
comme bien on pense, le soleil déclinant attirant moins de monde que l’astre à
son aurore qu’on voyait monter en Paris.
    Chose vraiment étrange, cette fin
d’août où Quéribus advint en ma seigneurie du Chêne Rogneux n’était guère de
saison, s’encontrant pluvieuse, venteuse et tracasseuse, lequel continuel
orage, disait

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