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Le prix de l'hérésie

Le prix de l'hérésie

Titel: Le prix de l'hérésie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: S.J. Parris
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gardes.
    « Oui, je vais parfaitement bien. Allons-y. »
    Nous marchâmes en silence dans St Mildred Lane en direction
de High Street. Même si Thomas faisait une bonne tête de plus que moi, il se
tenait tellement voûté que nous avions l’air de la même taille. Les manches de
sa robe miteuse retombaient par-dessus ses mains et sa mine de chien battu
rendait impossible de ne pas éprouver de pitié pour lui. Comme s’il lisait dans
mes pensées, il tourna brièvement le visage vers moi.
    « C’est très aimable à vous de prendre un peu de votre
temps pour m’écouter, messire. Étant donné la différence de nos positions, je
veux dire.
    — En ce qui concerne nos positions, Thomas, n’oublions
pas que vous êtes le fils d’un docteur de l’université alors que je suis fils
de soldat. Mais ce genre de distinctions ne m’intéresse guère. J’ose espérer
qu’un jour on jugera les gens par leur caractère et par leurs actes plutôt que
par le nom de leur père.
    — Voilà qui ne manque pas d’audace. Mais pour la
plupart des gens de cette ville, je serai toujours le fils d’un hérétique en
exil.
    — Ma foi, je suis un hérétique en exil, donc je
l’emporte. »
    Je vis pour la première fois un vrai sourire s’épanouir sur
le visage du jeune homme. Mais il s’éteignit aussitôt et son visage se referma.
    « Quoi qu’il en soit, vous êtes l’ami des rois et des
courtisans, messire, me rappela-t-il.
    — Une vogue dont je bénéficie. Si vous parlez du roi
Henri de France, il aime s’entourer de philosophes, cela flatte sa vanité
intellectuelle. Les rois n’ont pas d’amis comme nous en avons, vous et moi.
    — Je n’ai pas d’amis du tout, messire. »
    Il y eut un long silence durant lequel nous cherchâmes tous deux
comment renouer la conversation.
    « En tout état de cause, reprit-il finalement, vous
êtes l’ami de Philip Sidney. Ça n’est pas rien.
    — Oui, lui accordai-je. J’ai la bonne fortune de
compter Sidney parmi mes amis. Est-ce de cela que vous souhaitiez me parler ?
Afin que je plaide en faveur de votre père ? »
    Thomas garda le silence un instant puis s’immobilisa au beau
milieu de la rue.
    « Pas en faveur de mon père, non. En ma faveur. Je
voudrais vous avouer quelque chose, si vous promettez de le garder pour
vous. »
    Je hochai la tête, intrigué. Au croisement de St Mildred
Lane et de High Street, je tournai la tête à droite et à gauche pour étudier
les maisons à colombages et les façades en pierre des collèges universitaires.
À cette heure, la rue était presque déserte. La pluie continuait à agiter la
surface des flaques d’eau dans les ornières creusées par les roues des
charrettes.
    «  La Fleur de Luce est plus loin dans la rue,
indiqua Thomas en faisant un signe sur notre gauche. Mais c’est cher,
messire. »
    Il tirait sur sa robe avec anxiété.
    « Peu importe, tranchai-je avec légèreté en soupesant
dans ma paume la masse rassurante de la bourse de Walsingham. Je ne connais pas
les tavernes d’Oxford. Dites-moi, avez-vous déjà entendu parler d’une auberge
qui s’appelle La Roue de Catherine  ?
    — Je crois que c’est un endroit mal famé. De toute
façon, nous autres n’avons pas le droit de franchir l’enceinte de la ville. Si
nous étions pris sur le fait, la sanction serait sévère.
    — Vraiment ? C’est étrange. En me promenant hier,
je suis certain d’avoir vu un étudiant sortir par l’une des portes. »
    Thomas haussa les épaules.
    « Probablement quelqu’un de fortuné, dans ce
cas. »
    Sa voix n’était pas amère, seulement résignée. Il avait
accepté depuis longtemps que les lois ne s’appliquaient pas de la même façon
aux riches et qu’il ne servait à rien d’espérer que cela changerait.
    « Comme votre maître Gabriel Norris ? demandai-je.
    — Je préférerais que vous ne parliez pas de lui comme
de mon maître, messire. Bien sûr il l’est, je suppose, mais je me sens humilié
chaque fois qu’on me le rappelle. »
    Il s’était arrêté devant un bâtiment blanc de deux étages
qui donnait sur High Street et dont la façade était entretenue avec soin. À
l’intérieur, la salle était elle aussi très propre et pleine de vie, tout
l’inverse de La Roue de Catherine , et une odeur délicieuse de viande
rôtie nous accueillit dès notre entrée. Souriant, un tablier noué autour d’un
ventre si rond qu’il donnait l’impression d’être prêt à

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