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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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bien, répétai-je.
    Je me relevai et le laissai aux tendres soins de M. Dick.
    On avait proposé au Guinéen de s’enrôler dans l’armée continentale mais il avait refusé, préférant être prisonnier de guerre aux côtés du capitaine Stebbings, M. Ormiston et quelques autres marins du Pitt .
    Il avait expliqué simplement :
    « Je suis anglais, un homme libre. Prisonnier peut-être un temps, mais libre. Marin, mais libre. Américain ? Pas si libre. »
    Il n’avait pas tout à fait tort.
    Je sortis de l’hôpital et me rendis chez les Wellman pour vérifier mon cas d’oreillons. Douloureux mais pas dangereux. Puis je traversai à pas lents la cour illuminée par la lune naissante. La brise du soir s’était calmée mais l’air était encore frais. Je grimpai sur la batterie en demi-lune qui donnait sur l’étroit goulot du lac Champlain et, en face, sur Mount Defiance.
    J’y trouvai deux sentinelles, toutes deux endormies et empestant la vinasse. Cela n’avait rien d’inhabituel. Le moral dans le fort n’était pas au plus haut et l’alcool était facile à se procurer.
    Je me tins devant le parapet, une main sur un canon, son métal encore tiède de la chaleur de la journée. Pourrions-nous partir avant que les combats n’éclatent ? Il nous restait trente-deux jours à tirer et je trépignais déjà d’impatience. Outre la menace représentée par l’armée anglaise, la maladie et la puanteur régnaient dans le fort. C’était comme de vivre dans un cloaque et je ne pouvais qu’espérer que Jamie, Ian et moi parviendrions à partir avant d’avoir contracté une affreuse maladie ou d’avoir été agressés par un soudard.
    J’entendis de légers pas derrière moi et, me tournant, vis la silhouette grande et élancée se détacher à la lueur des feux de la cour en contrebas.
    — Je peux vous parler, tante Claire ?
    — Oui, bien sûr.
    Surprise par cet accès de formalité, je me poussai pour lui laisser de la place. Il indiqua du menton le pont à moitié construit à nos pieds.
    — Cousine Brianna aurait un ou deux mots à dire au sujet de ce chantier. Oncle Jamie aussi.
    — Je sais.
    Jamie se tuait à les répéter depuis deux semaines au nouveau commandant du fort, Arthur Saint Clair, aux autres colonels de milice, aux ingénieurs, à tous ceux qui voulaient bien l’entendre et même à ceux qui ne le voulaient pas. L’absurdité qu’il y avait à gaspiller autant d’énergie humaine et dematériaux pour ériger un ouvrage qui pouvait être si facilement détruit par quelques coups de canon tirés de Mount Defiance n’échappait à personne sauf à ceux aux commandes.
    Ce n’était pas la première fois que j’étais témoin de l’aveuglement militaire. Ce ne serait certainement pas la dernière.
    — De quoi voulais-tu me parler, Ian ?
    — Vous vous souvenez des Hurons qui sont venus au fort il y a quelque temps ?
    Effectivement, il y avait de cela deux semaines, un groupe de Hurons s’était présenté au fort. Ian avait passé une soirée à fumer avec eux et à écouter leurs histoires. Certains lui avaient parlé du général anglais Burgoyne qui les avait accueillis un peu plus tôt.
    D’après eux, Burgoyne sollicitait activement les Indiens de la ligue des Iroquois, consacrant beaucoup de temps et d’argent pour les attirer dans son camp.
    L’un des Hurons avait déclaré en riant :
    « Il dit que ses Indiens sont sa botte secrète. Qu’il les lâchera sur les Américains. Ils leur tomberont dessus comme l’orage et les foudroieront jusqu’au dernier. »
    Compte tenu de ce que je savais des Indiens en général, je trouvais Burgoyne un brin optimiste. Toutefois, je préférais ne pas penser à ce qui pourrait advenir s’il réussissait effectivement à en persuader un grand nombre de se battre pour lui.
    Perdu dans ses pensées, Ian regardait au loin la masse sombre de Mount Defiance.
    — Pourquoi viens-tu me raconter ça, Ian ? Ça concerne plutôt Jamie et Saint Clair.
    — Je le leur ai déjà dit.
    Un huard cria de l’autre côté du lac ; c’était un son étonnamment puissant et sinistre. Quand ils s’y mettaient à plusieurs, on aurait dit des fantômes chantant des tyroliennes. Avec une certaine impatience, j’insistai :
    — Alors, de quoi voulais-tu me parler ?
    Il se tourna vers moi.
    — De bébés.
    — De quoi ?
    Depuis le passage des Hurons, il m’avait paru sombre et silencieux. Je m’étais doutée qu’il y avait un rapport avec

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