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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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rétorqua William, piqué au vif.
    Il avait toujours eu honte de sa barbe. Alors que ses cheveux et la toison de son torse et de ses membres étaient d’un châtain foncé acceptable, son menton et ses parties intimes étaient couverts de poils d’un roux mortifiant. Il se rasait toujours minutieusement, même en voyage, mais, naturellement, son rasoir avait disparu en même temps que son cheval.
    — Je devais être distrait, répondit simplement Murray.
    Il se tut, concentré sur sa tâche pendant que William essayait de se détendre dans l’espoir de dormir un peu. Il était épuisé mais des images du marais défilaient derrière ses paupières closes, des visions qu’il ne pouvait ignorer ni repousser.
    Des racines aux boucles ressemblant à des collets, de la boue, des amas de déjections de cochons, si semblables à des excréments humains… des feuilles mortes déchiquetées…
    Des feuilles mortes flottant sur l’eau tels des éclats de verre brun, des reflets qui se dissipent autour de ses tibias… des mots dans l’eau, les pages de son livre, s’effaçant, le narguant en s’enfonçant sous la surface.
    Et le ciel, aussi vertigineux que le lac, qui lui donnait l’impression qu’il pourrait tomber vers le haut et se noyer dans cet air saturé d’humidité… se noyer dans sa transpiration… Une jeune femme léchait la sueur sur ses joues, le chatouillait ; son corps était lourd, chaud, écœurant… Il se tourna et se tortilla mais ne put échapper à ses oppressantes attentions…
    La sueur sourdait derrière ses oreilles, épaisse et grasse dans ses cheveux ; elle perlait lentement dans le chaume de sa barbe… glacée sur sa peau ; ses vêtements n’étaient plus qu’un linceul dégoulinant… la femme était toujours là, morte à présent, un poids mort sur sa poitrine, le clouant contre le sol froid…
    Le brouillard froid s’infiltrant partout… ses doigts blancs qui s’enfoncent dans ses orbites, ses oreilles. Il devait garder la bouche fermée autrement il entrerait en lui… Rien que du blanc.
    Il se roula en boule en frissonnant.
    Il finit par sombrer dans un sommeil plus profond et paisible dont il se réveilla quelque temps plus tard en sentant le fumet riche du rat musqué grillé. L’énorme chien était couché contre lui et ronflait.
    Des souvenirs déconcertants de la jeune femme de son rêve lui revinrent et il repoussa faiblement le chien.
    — Qu’est-ce que cet animal fiche ici ?
    — Cet animal s’appelle Rollo, répondit Murray d’un ton de reproche. Je lui ai demandé de se coucher contre vous pour vous tenir chaud. Vous grelottez de fièvre, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué.
    — Merci, je sais.
    William se leva péniblement et se força à manger. Il se recoucha ensuite avec soulagement, à une distance raisonnable du chien qui dormait à présent sur le dos, les pattes en l’air, ressemblant à un gigantesque insecte velu et mort. William passa une main sur son visage moite, essayant d’effacer cette vision troublante avant qu’elle ne se fraye un chemin dans ses rêves fébriles.
    Le ciel nocturne était dégagé, immense et sans lune mais rempli d’étoiles. Il songea au père de son père, disparu longtemps avant sa propre naissance, un astronome amateur. LordJohn l’avait souvent emmené, parfois avec sa mère, sur les pelouses de Helwater où, étendus dans l’herbe, ils contemplaient la voûte céleste et nommaient les constellations. Cette infinité bleu-noir offrait un spectacle froid qui agitait son sang fiévreux mais la vue des étoiles était toujours réconfortante.
    Murray regardait le ciel, lui aussi, perdu dans ses pensées.
    William, à demi adossé au tronc couché, essaya de réfléchir. Que devait-il faire à présent ? Il avait encore du mal à admettre que Henry Washington et donc sans doute le reste de ses contacts à Dismal Town étaient des rebelles. Cet étrange Mohawk écossais avait-il dit vrai ? Peut-être cherchait-il seulement à le fourvoyer ?
    Pour quelles raisons agirait-il ainsi ? Murray ne pouvait savoir qui il était réellement. Il ne connaissait que son nom et celui de son père. Quand ils s’étaient rencontrés des années plus tôt, à Fraser’s Ridge, lord John était un simple civil. Il ne pouvait avoir deviné qu’il était soldat, et encore moins un officier effectuant une mission de renseignements.
    Mais s’il avait dit vrai… William déglutit. Il l’avait échappé belle. Que lui

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