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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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côte dans la paix de la montagne.

    Il vint me chercher quelques jours plus tard alors que je fouillais les ruisseaux en quête de sangsues. Celles-ci commençaient juste à sortir de leur hibernation, assoiffées de sang. Elles étaient faciles à trouver : il suffisait de marcher lentement dans l’eau, près de la berge.
    Les premiers temps, l’idée de servir d’appât à ces créatures était rebutante mais, après tout, c’était encore le moyen le plus simple de s’en procurer. Je demandais à Jamie, Ian, Bobby ou n’importe qui parmi la dizaine de jeunes hommes disponibles de patauger dans le courant puis je les leur retirais. Une fois que vous vous étiez habitué à voir les sangsues se gorger de votre sang, ce n’était pas si terrible.
    Tout en glissant l’ongle de mon pouce sous la ventouse de l’une d’elles pour la déloger, j’expliquai en grimaçant :
    — Il faut que je les laisse s’alimenter suffisamment pour qu’elles survivent, mais pas trop, autrement elles deviennent comateuses et ne me servent plus à rien.
    — Je fais confiance à ton bon jugement, observa Jamie.
    Je laissai tomber la sangsue dans un bocal plein d’eau et de lenticules.
    — Quand tu auras fini de nourrir tes petites chéries, viens avec moi. Je voudrais te montrer la grotte de l’Espagnol.
    Ce n’était pas la porte à côté. Elle se trouvait à plus de six kilomètres de Fraser’s Ridge. Il fallait traverser de nombreux torrents boueux, grimper des pentes escarpées, se faufiler dans la brèche d’une paroi en granit qui me donna la sensation d’être emmurée vivante avant d’émerger de l’autre côté dans un chaos de rochers couverts de vignes sauvages.
    Jamie écarta un rideau de feuilles et s’effaça pour me laisser passer :
    — On l’a découverte, Jem et moi, un jour qu’on chassait par ici.
    Les sarments rampaient sur les rochers, aussi épais qu’un bras d’homme et rendus noueux par l’âge. Le feuillage vert sombre du printemps ne les cachait pas encore complètement.
    — C’était notre secret. Nous sommes convenus de n’en parler à personne, pas même à ses parents.
    — Ni même à moi.
    Je n’étais pas vexée. J’avais perçu la pointe de tristesse dans sa voix quand il avait évoqué son petit-fils.
    L’entrée de la grotte n’était qu’un trou dans le sol. Jamie avait poussé dessus une grosse pierre plate. Il la dégagea non sans mal et je me penchai au-dessus de l’orifice. Mes entrailles se nouèrent en entendant le bruit de l’air se déplaçant doucement à travers la fissure. Toutefois, l’air en surface était chaud. La grotte inspirait, elle ne soufflait pas.
    J’avais encore en mémoire l’angoissante grotte d’Abandawe qui avait semblé respirer autour de nous et il me fallut rassembler mon courage avant de suivre Jamie dans le trou. Une échelle en bois, rudimentaire mais récente, en remplaçait une autre beaucoup plus ancienne qui s’était désagrégée et dont il restait quelques échelons pourris pendant au bout de tiges de métal rouillé.
    Il ne devait pas y avoir plus de trois à quatre mètres de profondeur mais le goulot était étroit et la descente me parut durer une éternité. Quand j’atteignis le fond, je constatai toutefois que la grotte s’évasait comme un ballon de chimie. Jamie était accroupi dans un coin. Je le vis sortir une fiole de sa poche et sentis une forte odeur de térébenthine.
    Il avait apporté une torche en pin dont la tête enduite de goudron était enveloppée dans un chiffon. Il imbiba ce dernier de térébenthine puis ouvrit le briquet que Bree lui avait confectionné. Une pluie d’étincelles illumina ses traits concentrés. Il dut s’y reprendre à deux fois avant que la torche s’embrase. La flamme traversa le tissu inflammable et atteignit le goudron.
    Il leva sa torche et me montra le sol derrière moi. Je me retournai et manquai hurler.
    L’Espagnol était assis adossé à la paroi, ses jambes osseuses étirées devant lui, son crâne retombant en avant comme s’il s’était assoupi. Des touffes de cheveux roux étaient encore accrochées ici et là mais la peau avait entièrement disparu. Une bonne partie de ses mains et de ses pieds également, les petits os emportés par des rongeurs. Cependant, aucun gros animal n’avait pu l’atteindre et, si son torse et ses os longs portaient des traces de dents, ils étaient en grande partie intacts. Sa cage thoracique était visible à travers une

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