Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le prix du sang

Le prix du sang

Titel: Le prix du sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
pièce lambrissée de noyer, elle lui désigna l’un des fauteuils près de la cheminée et s’approcha d’un petit meuble en demandant :
    â€” Je peux vous offrir quelque chose à boire?
    â€” … Si vous m’accompagnez.
    â€” Je prendrais volontiers un porto.
    â€” Dans ce cas, un whisky… sans rien ajouter.
    Eugénie lui tendit un verre avant de s’asseoir dans le second fauteuil. Alors que son compagnon avalait la moitié de sa boisson d’une lampée, elle lissa le tissu de sa robe sur ses cuisses. Fernand contempla un moment le visage très pâle, les cheveux d’un blond un peu fade noués sur la nuque.
    â€” Acceptez-vous de m’épouser?
    Puis, il s’empressa d’ajouter :
    â€” Je m’excuse de demander cela de but en blanc. Je suppose qu’il existe des usages en la matière, mais je ne les connais pas.
    â€” Ma belle-mère pourrait vous le dire. Je suis aussi néophyte que vous. Personne ne m’a jamais posé la question.
    Elle marqua une pause, avala la meilleure part de son verre de porto, puis prononça enfin d’une voix mal assurée :
    â€” Oui, j’accepte… avec plaisir.
    Dans un mois, jour pour jour, ce serait son vingt-cinquième anniversaire. Ou elle se mariait très vite ou elle compterait parmi les personnes célébrées lors de la prochaine Sainte-Catherine. La poitrine de Fernand se dégonfla lentement. Aucun prétendant, après avoir reçu une réponse positive à cette question, ne devait demeurer calé dans un fauteuil, à cinq pieds de l’heureuse élue.
    Tous deux se levèrent en même temps et parcoururent chacun la moitié de la courte distance les séparant. Les mains de l’homme se posèrent sur la taille fine et ses lèvres sur la bouche un peu crispée. Le contact n’émut ni l’un ni l’autre. En allait-il de même chez tous les couples, en pareille circonstance? Le poids des émotions anesthésiait sans doute les sens.
    Ils reprirent leur place. Eugénie posa ses mains dans son giron pour demander :
    â€” Avez-vous songé à une date?
    â€” Pas vraiment, mais nous avons tellement attendu… Qu’en pensez-vous?
    â€” Vous me feriez un grand plaisir si la cérémonie se déroulait avant le 23 octobre. C’est un vendredi.
    La surprise laissa Fernand bouche bée. Comment expliquer un empressement aussi soudain? Son regard se porta furtivement sur la taille de sa… promise. Se pouvait-il qu’encore une fois?… Non, pareil soupçon frisait le ridicule.
    â€” Que penseront les gens d’une pareille hâte?
    â€” Les gens nous voient ensemble un jour sur deux depuis trois mois. Tous savent que nous nous connaissons depuis l’enfance. Ils penseront sans doute que nous avons bien tardé… ce dont je suis la seule responsable, j’en conviens.
    Pourquoi lui expliquer l’importance de devancer un peu ses vingt-cinq ans? Au contraire, cette coquetterie lui paraissait trop puérile pour l’étaler.
    â€” Si je compte rapidement, commença son compagnon, le samedi 17 octobre serait le plus opportun. Cela donne un peu plus de trois semaines. L’Église devra accorder une dispense pour la publication des bans.
    â€” Mais nous le savons tous, votre père bénéficie d’un accès facile au palais cardinalice. Cela ne lui posera certainement aucune difficulté.
    â€” Un délai aussi court rend impossible la tenue d’une grande cérémonie.
    â€” J’accepte avec joie de vous épouser, mais je vous demande encore une faveur : une célébration discrète, puis une réception se limitant à la famille immédiate, dans cette maison ou dans celle de vos parents.
    Les mariages à la sauvette tenaient souvent aux privautés entre les fiancés. Dans ces cas, les commères scrutaient leur calendrier et comptaient les jours entre la cérémonie et la première naissance. Encore une fois, le jeune homme secoua la tête pour chasser le soupçon tenace.
    â€” Vous savez, insista Eugénie, de mon côté, la famille se réduit vraiment à mes parents et à Édouard. Mon seul oncle, Alfred, a été enterré en juin. À part cela, j’ai des cousins et des cousines que je reconnaîtrais difficilement si je les croisais dans la rue.
    â€”

Weitere Kostenlose Bücher