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Le prix du secret

Le prix du secret

Titel: Le prix du secret Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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qu’espionne, ne visant qu’à lui nuire. Si la chance s’en présente, dit-il de cette odieuse voix grasse, assourdie en une menace, je sauverai votre âme hérétique. Et d’une manière qui ne sera pas à votre goût.
    Tout en parlant, il recula d’un pas, comme s’il mettait une distance entre nous avant de prononcer son jugement. Une flèche de lumière, filtrant à travers la tunique écarlate de Judas dans la Cène, prêta à son visage la couleur des flammes. Un instant, il parut si démoniaque qu’une terreur superstitieuse m’envahit. Les genoux tremblants, je ne pouvais parler. Ce fut Dale, trop furieuse pour le craindre, qui s’écria :
    — Comment osez-vous menacer ma maîtresse !
    — Non, Dale.
    Nous étions en France, après tout, pas en Angleterre. Je l’apaisai en posant la main sur son épaule.
    — Vous avez là une servante dévouée, dame de la Roche, remarqua Wilkins. Et vous semblez vouloir vous protéger mutuellement. Touchant spectacle ! Mais je vous conseillerais à toutes deux de surveiller votre langue et de prendre garde. J’ai foi en la justice divine. Et en mon excellente mémoire.
    Il tourna les talons et s’éloigna, le pas lourd dans ses sandales de moine. Bouleversée, je me laissai tomber sur le banc. Je savais trop bien ce que signifiait sa menace.
    — Cet homme est le mal incarné ! dit Dale avec véhémence.
    — Oui. C’est pourquoi je veux m’éloigner de lui et de cet endroit, répondis-je en me forçant à me lever. Où est donc Hélène ? Retournons à notre chambre. Elle nous y attend peut-être.
    Ces paroles se révélèrent plus ou moins prophétiques, car Hélène était bien dans notre chambre, cependant elle ne nous attendait pas. Elle était occupée à fouiller nos affaires.
     
    Nous pouvions à peine en croire nos yeux. D’indignation, j’en oubliai presque le Dr Wilkins. Nous avions emporté peu de bagages à Saint-Marc : deux sacoches de selle et un modeste panier. Hélène avait tout posé sur mon lit et farfouillait dans la sacoche de Dale. Au moment de cette interruption, elle en sortait une petite fiole de verre renfermant un liquide foncé. Elle ne nous remarqua pas, tout d’abord, et tandis que nous la fixions, stupéfaites, elle ôta le bouchon pour renifler le contenu. Outrée, je m’apprêtais à lui demander des comptes, mais elle nous vit au même instant et parla la première. Comme si elle était parfaitement en droit d’agir ainsi, elle nous interrogea :
    — Qu’est-ce donc ?
    — Reposez ça tout de suite ! ordonna Dale, pantelante. Dame Blanchard, elle fouille dans mon sac !
    — Mais qu’est-ce que c’est ? insista Hélène.
    Elle tourna vers la lumière le flacon bleuté, puis versa quelques gouttes brun-vert dans sa paume et fit mine de les goûter du bout de la langue.
    — Arrêtez ! hurla Dale. C’est une décoction d’if ! Du poison !
    Après un silence stupéfait, je demandai :
    — Du poison ? Vous transportez du poison d’if, Dale ?
    Elle était avec moi cette fameuse nuit où j’avais fait infuser la potion mortelle dans la cheminée de ma chambre. En fait, je lui avais demandé conseil, car elle était assez expérimentée dans l’extraction des essences de plantes. Elle savait préparer ce poison, soit. Ce que je ne pouvais comprendre, c’est pourquoi elle l’avait voulu.
    Elle semblait incapable de répondre.
    — Asseyez-vous, dis-je. Toutes les deux. Je veux savoir ce que fait ce flacon dans vos effets, Dale. Et vous, Hélène, vous allez me dire pourquoi, par tous les saints, vous vous permettez de fouiller nos affaires. Vous d’abord !
    J’avais beau m’exprimer avec autorité, en réalité je me sentais épuisée et malheureuse. J’en avais assez de cette tension perpétuelle. En cet instant, j’oubliai même Matthew dans mon désir de rentrer chez moi, de retrouver la sécurité. J’aurais voulu me promener avec Élisabeth dans le parc de Windsor, m’asseoir dans un berceau de verdure avec mes compagnes et me broder une nouvelle paire de manches. Ou, par-dessus tout, jouer avec Meg à Thamesbank. Il me suffisait de fermer les yeux pour voir ma petite fille aux cheveux bruns, qui ressemblait tant à son père, courir vers moi sur la pente herbue menant au débarcadère.
    La corrompre ? Non, j’avais eu tort de le redouter. Au contraire, elle serait pour moi la guérison et le salut. Je n’avais certes pas envie de rester là où les auberges flambent et

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