Le quatrième cavalier
solide mur de pieux derrière et nos lances qui s’y dressaient en
masse, ils repartirent.
Le lendemain, je menai soixante hommes dans les terres sans
croiser l’ennemi. Nous trouvâmes de jeunes agneaux égorgés par des renards, mais
aucun Dane. De ce jour, nous nous enfonçâmes toujours plus avant, portant le
message que le roi était vivant et se battait. Parfois, nous croisions des
bandes de Danes, mais nous ne combattions que si nous les dépassions en nombre,
car nous ne pouvions nous permettre de perdre des hommes.
Ælswith donna naissance à une fille qu’Alfred et elle
baptisèrent Æthelgifu. Ælswith voulait quitter le marais. Elle savait que Huppa
tenait Dornwaraceaster, car l’ealdorman avait répondu à la missive d’Alfred en
disant que la ville était sûre et que la fyrd marcherait avec lui dès qu’il
le commanderait. Dornwaraceaster n’était point aussi vaste que Cippanhamm, mais
elle avait des murailles romaines, et Ælswith, lasse des marais, de l’humidité
et des brumes glaciales, craignait que son bébé meure de froid et que le mal d’Edward
le reprenne. L’évêque Alewold la soutenait. Il entrevoyait une vaste demeure à
Dornwaraceaster, de bons feux et un confort de prélat, mais Alfred refusa. S’il
allait à Dornwaraceaster, les Danes abandonneraient aussitôt Cippanhamm pour l’assiéger
et la famine menacerait la garnison, tandis qu’il y avait à manger dans le
marais. À Dornwaraceaster, Alfred serait prisonnier des Danes, alors que dans
le marais il était libre. Il continua de rédiger les missives annonçant qu’il
était en vie, qu’il se renforçait et qu’après Pâques, mais avant la Pentecôte, il
frapperait les païens.
Il plut toute la fin de l’hiver. Constamment. Je me rappelle
être resté sur le parapet boueux du nouveau fort à regarder l’eau tomber et
tomber. Les cottes de mailles rouillaient, les tissus pourrissaient et la
nourriture moisissait. Nos bottes se décousaient et nul ne savait les réparer. Nous
glissions dans cette boue grasse, nos vêtements n’étaient jamais secs et la
pluie tombait toujours. Le chaume détrempé inondait les huttes, et le monde
faisait grise mine. Nous mangions assez bien, même si de plus en plus d’hommes
affluaient à Æthelingæg et que la nourriture diminuait ; mais personne ne
mourait de faim et nul ne se plaignait hormis l’évêque, qui rechignait à se
nourrir de poisson toujours et encore. Il n’y avait plus de cerfs dans le
marais – nous les avions tous tués –, mais au moins nous avions poissons, anguilles
et gibier d’eau, tandis qu’à l’extérieur du marais le peuple mourait de faim. Nous
surveillions les collines et accueillions les messagers. Burgweard, le
commandant de la flotte, écrivit d’Hamtun que la ville était garnie de soldats
saxons, mais que des navires danes patrouillaient la côte.
— Tu penses bien qu’il ne les combat point, se lamenta
Leofric en l’apprenant.
— Il n’en dit rien, répondis-je.
— Il ne veut salir ses navires.
— Au moins a-t-il des navires.
Un prêtre du Kent disait que des Vikings de Lundene avaient
occupé Contwaraburg, que d’autres s’étaient installés en l’île de Sceapig, et
que l’ealdorman avait fait la paix avec eux. Le Suth Seaxa annonçait des pillages
par les Danes mais assurait qu’Arnulf, l’ealdorman, rassemblerait sa fyrd au printemps. Il envoya un Évangile en témoignage de sa loyauté à Alfred, qui
le transporta partout sous la pluie jusqu’à ce qu’il soit détrempé et que l’encre
coule. Wiglaf, ealdorman de Sumorsæte, arriva au début du mois de mars avec
soixante-dix hommes. Il prétendit s’être caché dans les collines au sud de
Badum, et Alfred ne tint pas compte de rumeurs disant qu’il avait tenté de
négocier avec Guthrum. Une seule chose comptait : l’ealdorman était venu, et
Alfred lui confia le commandement des troupes qui poursuivaient leurs
incursions dans les terres. Toutes les nouvelles ne furent pas aussi
encourageantes : Wilfrith d’Hamptonscir avait fui en Franquie, comme une
vingtaine d’autres ealdormen et thanes.
Mais Odda le Jeune, ealdorman de Defnascir, était toujours
en Wessex. Il envoya un prêtre chargé d’une missive disant que l’ealdorman
tenait Exanceaster. « Dieu soit loué, disait la lettre, il n’y a nul païen
en ville. »
— Où sont-ils, alors ? demanda Alfred au prêtre.
Nous savions que Svein, bien qu’ayant perdu ses navires,
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