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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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à cet ordre. Pauvre John !
    Sa voix se fit plus forte à mesure que la colère prenait le pas sur la douleur.
    — Alexandre de Lisbonne et ses Noctales, souffla-t-il. J’en tirerai vengeance. Je les verrai pendre jusqu’au dernier.
    Bertrand s’approcha de lui.
    — Du calme. Laissez Lisbonne aux templiers. Il est corrompu et destiné à périr par l’épée. Plus important : votre frère était de la région, il habitait York, je crois ?
    Lanercost acquiesça.
    — Il guidait les autres, continua Demontaigu. Ausel, un de mes camarades, me l’a dit. Par conséquent, votre frère connaissait le Trou du Diable ; vous a-t-il touché mot de ce qu’il faisait ?
    Lanercost se mordit les lèvres, l’esprit en ébullition. Le chagrin se lisait sur ses traits à mesure que les souvenirs affluaient dans sa mémoire. Il comprenait ce que sous-entendaient les remarques de Demontaigu. Il aurait dû être franc envers nous, mais, bien entendu, il se sentait fort honteux et coupable.
    — Il m’en a parlé, avoua-t-il à voix basse. Oui, il m’en a parlé.
    — Et l’avez-vous confié à quelqu’un ?
    Il bondit, en proie à une vive agitation.
    — Que nenni ! Je… je… bégaya-t-il, il se peut que je l’aie répété à l’un ou à l’autre. Je ne puis…
    Il fit mine de s’éloigner. Je lui pris le bras et il ne résista pas. Il se contenta de me fixer avec un regard de complet désespoir.
    — En avez-vous parlé… ?
    — Parlé ? grommela-t-il. Je ne l’ai dit à personne.
    Il se libéra de mon emprise et partit à grandes enjambées.
    Nous ne pouvions rien faire de plus. Demontaigu et moi échangeâmes un baiser dans l’ombre et nous nous séparâmes. Je le vis peu les jours suivants. Il s’absentait de la chancellerie de la reine sous un prétexte quelconque pour s’affairer avec ses frères. C’est du moins ce que j’appris après. La plupart avaient échappé aux Noctales, mais on ne revit jamais trois d’entre eux. Que Dieu ait pitié de leurs pauvres âmes ! Sans doute étaient-ils tombés dans une chausse-trape et on avait dû jeter leurs corps dans une tourbière. Les cadavres qui se trouvaient dans le Trou avaient eux aussi disparu, acte de revanche malveillante de Lisbonne qui s’était servi d’eux comme appâts. Lanercost revint interroger Bertrand au sujet de la dépouille de son frère et quand il apprit ce qu’il en était, sa douleur s’accrut. Pourtant d’autres nouvelles firent oublier ces tragédies.
    Les grands barons avaient rassemblé leurs hommes, piétaille et cavaliers, et avançaient lentement vers le Nord. Je voyais rarement ma maîtresse qui s’entretenait en privé avec Édouard et Gaveston. Nous nous retrouvions à la fin de la journée et je m’enquérais alors avec inquiétude de sa santé. Mais Isabelle, bien que belle et gracieuse, était solide. Âgée de seize ans, elle était grande, raffinée et élégante dans tous ses traits. La grossesse avait donné un nouvel éclat à ses yeux bleus et à son visage parfait ; sa chevelure semblait encore davantage tissée d’or et son corps, quand je la baignais, resplendissait de bien-être. Le ventre de la reine avait un peu gonflé jusqu’à acquérir un « un léger embonpoint », comme elle le décrivait en riant. Elle se souciait surtout des dangers menaçants. Elle ne perdit son calme qu’une fois alors que, vitupérant la veulerie de son époux et les efforts dérisoires de Gaveston pour éviter l’exil, elle s’en prit à moi avec fureur.
    — Mgr Gaveston, maugréa-t-elle un soir entre ses dents, assise au bord du lit d’apparat, devrait recommencer ses voyages et rester là-bas. Écoutez, Mathilde.
    Elle tirailla les glands frangés d’or de la courtepointe.
    — Les barons vont nous tendre un piège. Nous devons, à tout instant, être prêts à fuir.
    — Qu’en est-il de vos rencontres avec le roi ? m’enquis-je.
    — C’est dialoguer avec des fols, rétorqua-t-elle. Des plans pour amener les seigneurs à se battre, pour s’allier avec les rebelles écossais, voire…
    Elle s’interrompit.
    — Oui, Édouard a même demandé à mon bien-aimé père des troupes de France. Sottise !
    Elle agita la main.
    — Je suis enceinte*, Mathilde. Je devrais me reposer sous des tonnelles fleuries à Sheen, à Windsor ou à Westminster, et non courir la lande comme conil s’élançant de terrier en terrier.
    Elle me regarda bien en face.
    — Le miroir se ternit ; nous

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