Le retour de la mariée
bleu dans la poche de sa chemise. La vérité, il savait où la trouver.
Il se remit en marche en pressant le pas. D’un coup d’œil jeté dans la salle à manger de l’hôtel, il vit que Caroline n’y était pas. Tant mieux ! Il préférait lui parler sans témoins.
Il gravit l’escalier quatre à quatre, ne frappa qu’un léger coup à la porte de leur chambre et entra sans attendre la réponse. Caroline était là, entièrement vêtue, debout près de la fenêtre. Elle avait dû le voir venir.
Il ouvrit la bouche et la referma, hésitant. En principe, après la nuit qu’ils venaient de passer ensemble, il aurait dû traverser la pièce en trois enjambées, l’étreindre passionnément et lui prendre sauvagement la bouche. Mais le télégramme lui brûlait la peau à travers sa chemise, et Caroline semblait plutôt embarrassée. Il s’en tint donc au minimum.
— Bonjour !
— Bonjour, Logan.
— Tu as bien dormi ?
— J’ai bien dormi, merci, dit-elle en rougissant. Je vois que tu es sorti.
— Tu dormais quand je me suis réveillé. J’avais des courses à faire.
Après trois secondes de silence, ils ouvrirent ensemble la bouche, pour dire à peu près la même chose.
— J’ai à te parler, Caroline.
— Logan, il faut que je te parle.
Elle ferma les yeux et se prit la tête à deux mains.
— Ne parlons pas de cette nuit, je t’en supplie, gémit-elle. Je ne veux pas en parler, pas maintenant.
Logan sentit s’éveiller sa colère. Cette vexation, il ne la méritait pas. On aurait dit qu’elle regrettait d’avoir fait l’amour avec lui, qu’elle déplorait une faiblesse de sa part, ou une violence qu’elle aurait subie.
— D’accord, parlons d’autre chose, dit-il en jetant le télégramme sur le lit.
— Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-elle.
— Un message. L’employé du télégraphe me l’a confié ce matin.
Les bras croisés sur la poitrine, il se tint en attente.
— Hier j’ai télégraphié aux gens… à des gens que j’aime bien, dit-elle en cherchant ses mots, pour leur faire savoir que… qu’ils n’avaient pas à s’inquiéter.
— C’est bien naturel.
En prenant le message, elle se rendit compte qu’il avait été ouvert.
— Tu l’as lu ?
— J’ai craint que Whitaker n’ait eu un accident. Comme l’aurait fait tout bon mari, j’ai voulu t’éviter un choc.
Caroline pinça les lèvres. Elle réprouvait visiblement l’indiscrétion, quelles que soient les intentions du coupable. Mais à l’instant où elle posa les yeux sur le texte, ce fut une autre affaire. Le visage blême et décomposé, elle se convulsa, foudroyée.
— Seigneur… Oh mon Dieu !
— J’aimerais bien savoir ce qui se passe, gronda Logan.
— Will ! C’est Will !
— Quel Will ? Lequel ?
Elle laissa tomber le papier et se précipita vers la porte.
— Il faut que j’y aille… tout de suite…
Logan voulut l’attraper par le bras pour la retenir.
— Non ! Laisse-moi passer ! cria-t-elle en se dégageant.
Elle dévalait déjà l’escalier. Logan la suivit en jurant. Une fois sorti de l’hôtel, il la vit relever le bas de sa robe et courir.
— Si elle croit que je vais lui courir après…, grommela-t-il.
Sans courir, il pressa pourtant le pas. Quand il entra dans le bureau, Caroline tendait un formulaire à l’employé.
— Ajoutez « Réponse immédiate », je vous prie ! Combien de temps faut-il compter pour qu’il arrive à Artesia ?
— Je dirais bien… un quart d’heure, vingt minutes.
— Vingt minutes ! Vous auriez dû m’apporter la réponse immédiatement, j’aurais gagné du temps.
Le nommé Bill étendit sa main ouverte, prêt à plaider l’innocence.
— Je suis tout seul de service, madame, et votre mari a dû venir lui-même chercher ses messages, rappela-t-il.
Caroline haussa les épaules et se mit à arpenter nerveusement l’espace étroit réservé aux clients, pleine d’une fureur impuissante.
— J’aurai au moins la réponse d’Ellen dès son arrivée, murmura-t-elle aigrement. Je ne sors pas d’ici avant de l’avoir reçue.
Logan commençait lui aussi à s’impatienter.
— Nous avons à discuter, ma femme et moi, déclara-t-il en homme habitué à s’imposer. Vous ne disposez pas d’une pièce où nous pourrions être seuls ?
— Si c’est pour rester seuls, je n’ai qu’à m’en aller, décida Bill, déjà debout, la main levée vers la patère
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