Le retour de la mariée
penser, son unique prestation avait été une réussite exceptionnelle. Ceci compensait cela.
A cette pensée, il ouvrit les yeux en souriant de satisfaction. Il savait comment réveiller la belle endormie. Elle ferait ainsi une nouvelle découverte, la première d’une série dont il avait le secret.
En inclinant la tête il la contempla, tout attendri. Tant de beauté. Tant d’énergie. Tant de bravoure.
Le souvenir de la catastrophe lui revint à l’esprit, et avec lui ses préoccupations familières. Les morts, Cade et les autres blessés. Will chez les hors-la-loi. Rappelé à son devoir, toute velléité gaillarde l’abandonna.
Il avait dormi plus longtemps qu’il ne l’avait prévu. A cette heure, il aurait dû déjà être passé au bureau du télégraphe, où l’attendaient peut-être les réponses aux messages envoyés la veille. Il fallait absolument que le jeune médecin de Fort Worth, le plus compétent de tous ceux qu’il connaissait, s’engage à soigner Cade Hollister dans les meilleures conditions possibles, sans regarder à la dépense.
Il était particulièrement fâcheux de se trouver tiraillé entre deux directions, l’ouest et l’est, et deux obligations, celle de sauver Cade et celle de sauver son fils. En d’autres circonstances, il serait revenu sur le lieu du drame, mais pour l’instant il fallait bien qu’il accorde la priorité à son fils. Cade ne lui en voudrait pas, il l’approuverait au contraire.
Le canyon du Fantôme noir. Ce lieu de légende, défendu par un désert, aux limites du Texas, méritait bien son nom puisque, depuis des générations, il était le repaire des plus grands criminels du pays. En pensant à son fils, presque un enfant encore, évoluant dans cet enfer, parmi ces démons, Logan ne put s’empêcher de proférer un juron. Chaque heure perdue pouvait être fatale !
Il enroula autour de son index une mèche dorée qui caressait son épaule. Son fils. Sa femme. Des responsabilités nouvelles. Lui aussi faisait des découvertes. Il n’était plus le même homme. Il allait avoir d’autres obligations, d’autres charges allaient peser sur lui. Mais un vide s’était comblé en lui, un vide dont il n’avait encore jamais pris conscience.
Réflexion faite, il décida de laisser dormir Caroline.
Une demi-heure plus tard, Logan était prêt à quitter l’hôtel. Il était encore très tôt, mais Parkerville bruissait déjà d’animation. Il salua le pasteur, qui venait de la gare.
— Vous venez aux nouvelles, monsieur Grey ? Vous apprendrez avec plaisir que vers l’est, on a vite réparé la voie, et que les blessés ont été ramenés à Fort Worth, avec ceux qui le voulaient. Ceux qui veulent poursuivre leur voyage vers l’ouest arriveront à Parkerville dans la journée avec notre équipe, qui a fait du bon travail.
Cade se trouvait donc à Fort Worth, avec Holt. Libéré de cette préoccupation, Logan se rendit d’un pas plus léger au bureau du télégraphe.
A son entrée, le timbre retentit sans que l’employé réagisse. Il déjeunait devant sa machine, de l’autre côté du comptoir qui divisait la pièce en deux.
— On ouvre à 8 heures, dit-il sans quitter des yeux son journal. « Ventre affamé n’a pas d’oreilles. »
— C’est à voir, répliqua Logan en faisant tomber un billet sur l’appareil de transmission.
Le billet disparut en même temps que le préposé se dressait comme un ressort.
— Pardon, Lucky… monsieur Grey, je vous avais pris pour un de ces paysans qui viennent m’embêter à pas d’heure. Moi, c’est Bill Je suis juge au concours agricole, alors vous pensez…
— Je vous plains. Vous avez quelque chose pour moi ?
— Bien sûr, des tas. J’aurais pu vous les porter plus tôt, mais je me suis dit que je risquais de réveiller votre dame, une bien belle personne.
Logan se contenta de hocher la tête en tendant la main, prêt à prendre ses messages. Le compliment ne manquait ni de simplicité ni de justesse. Caroline, sa femme, n’était pas de celles qui passent inaperçues.
Il s’assit à la table réservée aux clients, à côté de l’entrée, et passa rapidement en revue les télégrammes pour noter le nom des expéditeurs : Dair MacRae. Le médecin. Haltom, son banquier. Tom Addison. Wilhelmina Peters.
Celui du médecin d’abord. Excellente nouvelle. Le Dr Daggett acceptait de donner la priorité à Cade.
Il ne lui fallut pas plus d’un quart d’heure pour
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