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Le rêve de Marigny

Le rêve de Marigny

Titel: Le rêve de Marigny Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Monique Demagny
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chantier de la place Louis XV ?
    Vandières quitta la place un peu agacé, Gabriel un peu fâché.

    La soirée apporta encore à Vandières son lot de travail. Et c’était encore la routine qui venait le river au sol comme s’il lui fallait toujours s’évader des projets enthousiasmants pour revenir au niveau du quotidien. On vivait à Versailles, plus ou moins bien selon son statut, on y déménageait aussi le plus souvent qu’on lepouvait et on tentait l’aventure à chaque fois qu’il semblait envisageable d’accéder à un appartement plus flatteur ou plus confortable. La grande ronde des déménagements versaillais était perpétuelle. Elle s’alimentait d’elle-même, en cascade. Vandières attaqua la lecture du mémoire qu’on lui avait préparé.

    « Le logement de monsieur le marquis et de madame la marquise de Rochechouard-Faudoas en le remettant en deux comme il était à monsieur le comte de Tessé et monsieur le comte de Choiseul », « Le logement de monsieur le comte de Choiseul à madame la duchesse de Mirepoix »…

    Ce branle-bas donnait le vertige. En 1751 c’était Jeanne qui avait donné le coup d’envoi d’un remaniement majeur en quittant son appartement « d’en haut », au deuxième étage du corps central au-dessus du grand appartement du roi, qu’elle occupait depuis plus de cinq ans, pour un appartement « d’en bas », au rez-de-chaussée du corps central. Jeanne descendait à l’étage des princes. Fort heureusement l’affaire avait été menée, et fort rondement par Tournehem avant le retour de Vandières. Un tel déménagement ne pouvait que faire grand bruit. La rumeur en avait couru de galeries en galetas, dans le corps central du bâtiment et dans les ailes, et comme on était en mai on en parlait aussi dans les jardins.
    — L’appartement lui semble maintenant trop modeste.
    — L’affaire est plus compliquée !
    C’était là qu’on tendait l’oreille.
    — Elle va occuper l’appartement du duc et de la duchesse de Penthièvre…
    — Les appartements princiers ! Quel chemin parcouru !
    — Pour asseoir sa grandeur !
    — Non… Enfin, pas seulement.
    — Dites-m’en davantage…
    — Il s’agit de faire échec à mesdames. Madame Adélaïde pensait à cet appartement.
    — Madame Louise et madame Sophie vont bientôt quitter Fontevraud. Il y avait bien à cet endroit la place de les loger toutes.
    — Sauf que le roi aurait passé beaucoup de temps avec ses filles. Lors du séjour que Madame Infante a fait à Versailles elle a été logée dans l’appartement dévolu à la comtesse de Toulouse, qui touche celui du duc de Penthièvre. Le roi pouvait commodément descendre chez sa fille…
    — Par l’escalier qui avait été fait du temps de la marquise de Montespan !
    — Le roi aime tendrement ses filles !
    — Et Mesdames détestent la marquise !
    — Elle a senti le danger.
    — Madame Adélaïde convoitait l’appartement et le roi ne le lui pas accordé ?
    — C’est la reine qui l’en a dissuadé.
    — La reine ?
    — Elle est jalouse de ses filles ! Elle a aidé la marquise pour contrer Mesdames.
    — Tous ces déménagements vont faire beaucoup de remue-ménage.
    — Et coûter beaucoup d’argent ! On aménage un autre appartement pour le duc et la duchesse de Penthièvre.
    — Et pour la comtesse de Toulouse…
    — Et pour Avisse, premier garçon du Garde-meuble, qui est pris dans le tourbillon.
    Chacun réinventait l’histoire à sa façon, l’agrémentait de nouveaux détails et concluait à sa manière.
    — Chacun est mécontent !
    — Ils sont tous très contents !

    Avec de moindres conséquences quand il ne s’agissait pas d’appartements princiers, le tourbillon était perpétuel et ceux-là mêmes qui criaient le plus fort le mettaient en branle à leur profit à chaque fois qu’ils en avaient l’occasion. Vandières n’échapperait pas à en régler les litiges.

On avait repris des habitudes. Jeanne recevait son frère dans le petit cabinet de son nouvel appartement et Abel peinait encore un peu plus qu’avant à se carrer commodément dans un fauteuil bien trop étroit pour sa stature.
    Le visage de la marquise était sévère. Allait-elle gronder le Directeur des Bâtiments ? Non ! C’était un autre souci qui l’irritait ce jour-là.
    — Notre père ne fait pas toujours preuve de bon sens.
    — Vous a-t-il contrariée ?
    — C’est souvent, et il me faut

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