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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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qu'il n'avait pas le choix. Dépêchant des messagers, il avait donc proposé la paix à ses deux ennemis, mais s'était arrangé pour rencontrer d'abord le plus jeune. De ce qu'ils s'étaient dit en tête à tête, rien n'avait transpiré. Les plus proches conseillers de l'un comme de l'autre ignoraient ce dont ils étaient convenus. Au sortir de l'entretien, toutefois, on les avait vus s'embrasser en amis.
    Quelques semaines plus tard, quand Richard avait rejoint Philippe sur la route de Bonsmoulins, nul n'avait plus douté qu'un renversement d'alliances venait de s'opérer. Seul l'ignorait encore Henri Plantagenêt.
    — Je me sens las, Maréchal, avoua Henri II. Il est heureux que cette campagne touche à sa fin, car je ne sais si j'aurais supporté d'autres combats.
    En l'unique compagnie de son fidèle chevalier, il se tenait sous le pavillon qu’eu égard à la température, il avait fait dresser à l'extérieur du village pour abriter les entretiens à venir. Les mains tendues au-dessus d'un brasero où s'élevaient de petites flammes, il se dandinait d'un pied sur l'autre, grimaçant de froid et de souffrance. Ses jambes étaient tellement percluses de rhumatismes qu'elles ne le portaient qu'à grand peine quand venait la mauvaise saison. La station assise lui étant encore plus douloureuse en raison d'une fistule, il ne se sentait bien qu'allongé – et tant les rigueurs de la guerre que sa répugnance à l'inactivité l'empêchaient de le rester très longtemps.
    — Philippe n'a désormais d'autre choix que d'accepter vos conditions, sire, assura Guillaume. Dès ce soir, vous pourrez vous reposer.
    — Et dans une semaine, je serai à Londres, approuva Henri. Je sais certaine jeunesse dont la présence sera le meilleur remède à mes maux. Le vieux Louis n'avait, paraît-il, guère de goût pour la bagatelle, mais force est de reconnaître que ses filles ont du tempérament. (Il eut un sourire malicieux.) Ce n'est pas votre avis, Maréchal ?
    Son compagnon eut un haut-le-corps.
    — Sire ! s'exclama-t-il, offusqué.
    Le Plantagenêt éclata d'un rire gras qui s'acheva en quinte de toux.
    — Eh, quoi ? renvoya-t-il lorsqu'il eut repris son souffle. Cette vieille histoire n'a plus d'importance, à présent : mon fils Henri est mort depuis plus de cinq ans et sa veuve remariée, expédiée en Hongrie. Craignez-vous donc qu'on vous reproche encore d'avoir couché avec elle ? D'ailleurs, Henri lui-même vous avait pardonné, ce me semble. Alors, plutôt que de vous récrier, dites-moi donc ce que Marguerite valait au lit. Cela me distraira peut-être de mon mal.
    Guillaume se mordait les lèvres, gêné, détestant s'entendre rappeler cette entorse à la fidélité due au suzerain, qui lui avait valu d'être un temps banni loin du jeune roi. Jamais il n'évoquait la belle Marguerite, sinon dans l'intimité de ses méditations, où les bons moments de cette impossible histoire d'amour supplantaient sans mal son triste dénouement. Certes, il ne désirait pas entacher ses meilleurs souvenirs – hors ceux qu'il s'était forgés les armes à la main – en les contant comme il eût vanté ses prouesses avec une putain.
    Renaud de Dammartin, en pénétrant sous la tente, le dispensa fort à propos de répondre.
    — La troupe du roi de France approche, sire, annonça-t-il.
    — À la bonne heure, s'exclama Henri. Nous allons en terminer avec les palabres et nous en retourner chez nous.
    — Y a-t-il autre chose ? interrogea Guillaume, constatant que l'arrivant paraissait embarrassé.
    — Oui, admit Renaud à regret. Peut-être ai-je mal vu, mais au milieu des bannières françaises, il m'a semblé reconnaître celle du comte de Poitiers.
    Le Plantagenêt écarquilla les yeux.
    — Richard ? Que diable ferait-il ici ? Allez donc voir cela, Maréchal, je vous prie.
    Quelques instants plus tard, Guillaume confirmait au vieux roi que son fils se trouvait bien parmi les cavaliers en route vers Bonsmoulins.
    — Cette petite surprise ne me dit rien qui vaille, grommela Henri. Je songe à Adélaïde et voilà son fiancé qui arrive ! C'est un présage, Maréchal, croyez m'en.
    Les lèvres pincées, l'œil noir, il resserra son manteau autour de lui et sortit dans le froid mordant pour accueillir le visiteur qu'il attendait ainsi que celui qu'il n'attendait pas.
    Plusieurs feux de camp, autour desquels se réchauffaient les soldats, brûlaient sous le ciel gris. Désireux d'éviter une nouvelle

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