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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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de se couvrir de gloire au cours de maintes batailles et de grandioses chevauchées. De tous les témoignages parvenus à ses oreilles, il ressortait que Saladin, quoiqu'Infidèle, n'en était pas moins un chevalier de sa trempe, et il lui tardait de se mesurer à pareil adversaire.
    Philippe, pour sa part, modérait son enthousiasme. Certes, sa piété demeurait sans faille, et délivrer le tombeau du Christ lui apparaissait comme une nécessité fondamentale. En outre, s'il ne se préoccupait guère de hauts faits d'armes, il estimait que sa participation active à la défense de la Chrétienté lui vaudrait pour de bon une indulgence divine dont il doutait de moins en moins. Dieu, sûrement, ne refuserait pas le Paradis à un homme qui se battrait au service de son Église.
    En dépit de ces bonnes raisons, il regrettait de devoir quitter son royaume, pour le bien duquel il eût pu considérablement œuvrer, surtout en l'absence de Richard.
    Mais l'empereur était déjà en route, ainsi que de nombreux seigneurs français. Tergiverser davantage eût été forfaire à l'honneur.
    On partirait donc. Durant une dernière entrevue, en un Paris noyé sous les neiges hivernales, les deux rois convinrent de la date du premier avril, que l'un comme l'autre doutaient de pouvoir respecter. C'était cependant un premier pas : tout retard supplémentaire ne serait plus que minime.
    Philippe, en particulier, avait une bonne raison de ne pas s'éloigner si tôt : son épouse devait accoucher précisément début avril, et il désirait se trouver auprès d'elle à cette occasion.
    Ces réserves ne l'empêchèrent cependant pas de prendre ses dispositions pour le voyage, ni – surtout – de décréter ce que devraient être l'administration et le gouvernement du royaume pendant son absence. Les mesures qu'il prit en cette matière ne laissèrent pas de décontenancer une grande partie de ses proches.
    À la toute fin de l'hiver, il réunit un conseil en son palais de la Cité. Conseil bien différent de ceux qui l'avaient précédé durant les premières années du règne.
    Le comte de Flandre n'était pas là : il partait pour la Terre Sainte. Le sénéchal Thibaut de Blois, le connétable Raoul de Clermont, le comte de Dreux (5) , le comte de Sancerre, le comte de Champagne, le duc de Bourgogne, tout ce que la France comptait de grands vassaux, n'étaient pas là : tous partaient ou étaient déjà partis ; à quoi bon les intéresser à des décisions qu'ils n'eussent su mettre en pratique ?
    Baudouin de Hainaut ne partait pas, mais il n'était pas là non plus. Il ne s'agissait pas d'un hasard.
    Des grands du royaume, seuls avaient été conviés la reine mère et l'archevêque Guillaume aux Blanches Mains. Dès leur arrivée dans la salle du conseil, ils contemplèrent avec surprise et réprobation ceux qui s'y trouvaient déjà, plus ponctuels qu'eux.
    Passait pour le vieux chambellan Gautier, qui assistait le roi actuel comme il avait assisté le précédent dans ses tâches administratives. Bien qu'il eût été récompensé de ses services par nombre de propriétés et de dons monétaires, cet homme efficace élevait rarement la voix et, conscient de son rang, ne cherchait pas à rivaliser en splendeur avec les nobles. En conséquence, on s'était habitué à le voir participer aux conseils depuis plusieurs décennies. Il faisait pour ainsi dire partie des meubles.
    Passait aussi que fût assis là le frère Bernard de Vincennes, qu'on apercevait de loin en loin au palais et pour la sainteté duquel on éprouvait le plus grand respect. Passait encore que fût invité Guillaume de Garlande : s'il n'appartenait pas aux familles les plus prestigieuses, il descendait d'un sénéchal royal, était lui-même chevalier et s'était distingué, l'épée à la main, lors des dernières campagnes. On le savait au demeurant de bon conseil ; ses attributions dépassaient depuis beau temps les questions militaires.
    Ce qui ne passait pas, absolument pas, c'était la place de choix occupée à la table par deux inconnus que leur allure et leurs vêtements désignaient comme de simples bourgeois. Ceux-là, ni Guillaume ni Adèle ne les avaient jamais vus à la cour – ou bien ne les avaient pas remarqués car ils ne les estimaient pas dignes de leur attention.
    — Sommes-nous tous là ? interrogea Philippe lorsque sa mère et son oncle se furent installés. (Gautier inclinant la tête, il poursuivit :) Je vous ai

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