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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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Champenois n'étaient pas les moins affligés. Faire mine de se fier à eux tout en leur liant les mains constituait une manœuvre dont il n'était pas peu fier.
    Le sourire épanoui sur les lèvres des deux bourgeois n'avait d'égale que la moue d'Adèle et de son frère. Lesquels n'étaient cependant pas au bout de leurs surprises. Philippe reprit un instant son souffle, puis porta le coup le plus difficile à encaisser.
    — Eu égard à l'expérience du conseil parisien en matière de comptes, j'ai décidé en outre de lui confier les rênes du trésor.
    — Le trésor ? s'exclama la reine mère, outrée. Ah, non, cette fois, mon fils, vous allez trop loin, croyez m'en. Voulez-vous donc laisser la canaille dilapider votre or et retrouver les caisses vides à votre retour ?
    S'ils firent à leur tour la moue devant l'insulte enfin lâchée, Evrouin et Pierre ne prononcèrent pas une parole pour se défendre. Ce ne fut d'ailleurs pas nécessaire.
    — Les six personnes que nous avons choisies, madame, sont certes issues d'un milieu modeste mais disposent désormais de fortunes supérieures à celle de bien des grands seigneurs, dit le roi sur un ton signifiant qu'il n'admettrait nulle réplique. Vous me ferez la grâce de croire qu'elles ne se sont pas enrichies en dilapidant l'or. (Constatant qu'Adèle, furieuse mais matée, ne cherchait plus à argumenter, il continua d'une voix plus calme :) Il ne leur sera de toute façon pas loisible de puiser à leur gré dans le trésor royal : chacune d'elle possédera une clef des coffres, et leurs décisions devront être prises collectivement, avec l'aval de messire Gautier ou de messire Guillaume. Elles vous seront d'ailleurs dûment rapportées, afin que vous me les transmettiez. Les coffres eux-mêmes seront confiés à la garde des chevaliers du Temple, et vous conviendrez qu'ils ne sauraient se trouver en de meilleures mains.
    À cela, il n'était pas de réplique possible : les Templiers jouissaient d'un prestige à nul autre pareil.
    Philippe promena son regard sur les conseillers, semblant les défier d'ajouter quelque chose. Ni à l'archevêque ni à la reine mère, l'envie n'en manquait, mais ils se tinrent néanmoins cois. Satisfait, il reprit la parole :
    — Pour en finir avec les questions financières, j'ajoute qu'il ne sera levé aucun impôt nouveau, que ce soit sur le peuple ou sur l'Église, avant mon retour. Voire, si je devais laisser la vie en Terre Sainte, avant la majorité de mon fils Louis.
    Guillaume aux Blanches Mains eut un petit mouvement de tête agacé prouvant que cette nouvelle mesure ne possédait pas non plus sa faveur. Il s'abstint toutefois de formuler des réserves qu'il savait inutiles. Quant à Adèle, ses lèvres pincées, ses yeux baissés laissaient clairement entendre qu'elle n'ouvrirait plus la bouche.
    — Encore une chose, et qui vous concerne particulièrement, mon oncle, ajouta Philippe. Vous aurez bien entendu entière autorité pour régler les questions religieuses, temporelles ou spirituelles, qui pourraient agiter le royaume. Je vous demande cependant de prendre en ces occasions le conseil du frère Bernard et de ne rien faire que vous ne soyez tous deux en parfait accord.
    Il n'imposait pas à la légère cette collaboration : en associant l'ermite aux décisions importantes, il s'assurait que l'Église demeurât au service de Dieu et non à celui des nobles. Le mysticisme de Bernard, que le roi jugeait un peu exacerbé, serait toutefois tempéré par le bon sens de l'archevêque.
    Ce dernier eut un geste de la main pour signifier qu'il ne voyait pas d'objection à la chose. Le frère de Vincennes, lui, ne leva pas même les yeux du chapelet qu'il égrenait depuis le début du conseil. Sans doute il avait tout entendu, tout pesé, mais ne voyait pas la nécessité de s'exprimer.
    — À présent, si vous le voulez bien, reprit le roi, examinons ce qui devra être accompli si, Dieu m'en garde, je ne devais jamais revoir la terre de France.
    Sachant que nul n'y trouverait rien à redire, il exposa une série de mesures visant toutes à préserver les dispositions courantes jusqu'à la majorité du prince Louis.
    Lorsqu'il eut terminé, Philippe s'autorisa un sourire : cette fois, nul ne s'était tenu derrière lui, nul n'avait parlé à sa place, et ses décisions ne seraient pas contestées.
    Son vieux maître Robert Clément, au Paradis, devait être fier de lui.
     
    Le drame se produisit à la

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