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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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dire.
    Guenièvre 
rit.  « Dis-moi la vérité, Derfel. J’ai besoin  de
savoir ! » Elle remit son bras sous le mien et m’entraîna à l’ombre,
sous l’arcade. « Cet abominable Mgr Sansum veut faire de nous tous des
chrétiens et, moi, je ne veux pas en entendre parler ! Il veut que nous nous
sentions coupables en permanence, et je ne cesse de lui répéter que je n’ai
rien à me reprocher, mais les chrétiens sont de plus en plus puissants. Ils
bâtissent ici une nouvelle église ! » Mue d’une soudaine impulsion,
elle se retourna et claqua des mains. Des esclaves entrèrent dans la cour en
toute hâte et elle ordonna qu’on lui apporte son manteau et ses chiens.
« Je vais te montrer une chose, Derfel, que tu puisses voir ce que ce
misérable petit évêque est en train de faire à notre royaume. »
    Elle jeta un
manteau de laine mauve sur son fourreau de lin, puis elle prit les laisses de
deux lévriers qui haletaient à côté d’elle, leurs langues pendillant entre des
crocs acérés. Les portes de la villa s’ouvrirent devant nous. Suivis par deux
esclaves et flanqués d’un quatuor de gardes, nous descendîmes la rue principale
magnifiquement pavée de larges pierres, avec une rigole qui canalisait les eaux
de pluie vers la rivière qui coulait à l’est de la ville. Les boutiques à la
devanture ouverte regorgeaient de marchandises : des souliers, une
boucherie, du sel, un potier. Certaines maisons s’étaient effondrées, mais la
plupart étaient en bon état, peut-être parce que la présence de Mordred et de
Guenièvre avait valu à la cité un regain de prospérité. Il y avait des
mendiants, bien sûr, qui se tramaient sur des moignons, se pressant pour
ramasser les pièces de cuivre que jetaient les deux esclaves de Guenièvre au
risque de recevoir des coups de hampe. Guenièvre elle-même, sa chevelure rousse
exposée au soleil, continua son chemin sans guère prêter attention à l’émoi que
suscitait sa présence. « Tu vois cette maison ? demanda-t-elle en
montrant du doigt une belle maison à étage, du côté nord de la rue. C’est là
qu’habité Nabur, et que notre roitelet pète et vomit. » Elle haussa les
épaules. « Mordred est un enfant particulièrement désagréable. Il boitille
et ne cesse jamais de hurler. Là ! Tu l’entends ? » J’entendais
bien un enfant vagir, mais je n’aurais su dire s’il s’agissait de Mordred.
« Allons, passe par ici », ordonna Guenièvre en fendant la petite
foule de badauds qui la regardaient de l’autre côté de la rue, puis elle grimpa
sur un monceau de pierres cassées juste à côté de la belle maison de Nabur.
    La suivant, je
m’aperçus que nous étions sur un chantier, ou plutôt à un endroit où l’on
démolissait une bâtisse pour en ériger une autre sur ses ruines. Sur les
décombres d’un temple romain. « C’est là que les fidèles adoraient
Mercure, observa Guenièvre, mais maintenant nous allons avoir un sanctuaire
pour un charpentier mort. Et explique-moi comment un charpentier mort va nous
assurer de bonnes récoltes ! » Ces derniers mots, qui s’adressaient
en apparence à moi, furent prononcés assez fort pour troubler la douzaine de
chrétiens qui travaillaient à leur nouvelle église. Les uns posaient des
pierres, d’autres aplanissaient des montants de porte, d’autres encore
abattaient d’anciens murs afin de récupérer des matériaux pour le nouvel
édifice. « S’il te faut un bouge pour ton charpentier, dit Guenièvre d’une
voix sonore, pourquoi ne pas reprendre tout simplement l’ancien bâtiment ?
ai-je demandé à Sansum, mais il prétend que tout doit être neuf afin que ses
précieux chrétiens ne respirent point l’air souillé par les païens, en vertu de
quoi nous démolissons l’ancienne bâtisse, qui était exquise, pour ériger un
affreux bâtiment bancal et dénué de grâce ! » Elle cracha dans la
poussière pour conjurer le mal. « Il dit que c’est une chapelle pour
Mordred ! Tu peux croire une chose pareille ? Il est bien décidé à
faire de ce malheureux gosse un pleurnichard de chrétien. Et voilà le but de
cette horreur !
    — Chère
Dame ! » Mgr Sansum surgit de derrière l’un des nouveaux murs, qui
était effectivement de guingois en comparaison de la maçonnerie soignée des
vestiges du temple romain. Sansum portait une robe noire qui, comme ses cheveux
sévèrement tonsurés, était couverte de poussière blanche.

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