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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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corsage. Elle
portait un fourreau de lin blanc tout simple qui tombait en plis droits de ses
épaules jusqu’à ses pieds. Le lin avait dû coûter les yeux de la tête, car le
tissu était si fin que si je la regardais, ce que j’essayais d’éviter, il était
possible d’entrevoir sa nudité sous l’étoffe. Une image dorée de cerf au
croissant de lune pendait à son cou, en guise de boucles d’oreilles elle
portait des pendants en ambre sertis dans l’or, tandis qu’à sa main gauche on
remarquait la bague en or avec l’ours d’Arthur et la croix des amants.
« De la bave, de la bave, dit-elle avec délectation, si bien que lorsqu’il
eut fini, ou, pour être exacte, lorsqu’il eut fini d’essayer de commencer,
sanglotant qu’il voulait faire de moi sa reine, et la reine la plus riche de
toute la Bretagne, je suis allée voir Iorweth et lui ai demandé de jeter un
sort à un amant indésirable. Je n’ai pas dit au druide qu’il s’agissait du roi,
naturellement, même si ça n’aurait probablement pas changé grand-chose parce
que Iorweth ferait n’importe quoi pour un sourire, alors il a fait le charme et
je l’ai enterré, puis j’ai demandé à mon père de dire à Gorfyddyd que j’avais
enterré un charme mortel contre la fille d’un homme qui avait tenté de me
violenter. Gorfyddyd savait ce que je voulais dire et, comme il raffole de
cette insipide petite Ceinwyn, il a pris désormais grand soin de m’éviter.
« Elle s’esclaffa. » Que les hommes sont sots !
    — Pas le
prince Arthur, dis-je avec fermeté, veillant à employer le titre auquel
Guenièvre tenait tant.
    — Il ne
connaît rien aux bijoux », dit-elle d’une voix revêche avant de me
demander si Arthur m’avait chargé de l’espionner.
    Nous
déambulions sous la colonnade. Nous étions seuls. Un dénommé Lanval, commandant
la garde de la princesse, avait voulu laisser ses hommes dans la cour, mais
Guenièvre les pria de se retirer. « Qu’ils fassent donc courir la rumeur à
notre sujet », me dit-elle gaiement avant de se renfrogner. « Je me
dis parfois que Lanval a reçu l’ordre de m’espionner.
    — Il
veille simplement sur vous, Dame, répondis-je, car de votre sécurité dépend le
bonheur du prince Arthur, et sur son bonheur repose un royaume.
    — C’est
gentil, Derfel, ça me plaît », conclut-elle d’un ton à demi moqueur. Nous
continuions à marcher. Un bol de pétales roses trempés dans l’eau répandait un
parfum délicat sous la colonnade qui nous préservait agréablement de la chaleur
du soleil. « Veux-tu voir Lunete ? me demanda soudain Guenièvre.
    — Je
doute qu’elle en ait envie.
    — Probablement
que non. Mais tu es marié, n’est-ce pas ?
    — Non,
Dame, nous n’avons jamais été mariés.
    — Alors
ça ne compte pas, hein ? » demanda-t-elle, sans préciser ce qui ne
comptait pas. Et je me gardai bien de le lui demander. « Je désirais te
voir, Derfel, reprit-elle gravement.
    — Vous me
flattez, Dame.
    — Tes
propos sont de plus en plus charmants ! » Elle claqua des mains, puis
fronça le nez. « Dis-moi, Derfel, te laves-tu jamais ?
    — Oui,
Dame, fis-je en piquant un fard.
    — Tu
empestes le cuir, le sang, la sueur et la poussière. Ce peut être un délicieux
arôme, mais pas aujourd’hui. Il fait trop chaud. Te plairait-il que mes dames
te donnent un bain ? Nous le faisons à la romaine, avec force
transpiration et frottements. C’est très fatiguant. »
    À dessein, je
reculai d’un pas. « Je trouverai un ruisseau, Dame.
    — Mais
j’avais envie de te voir ! » Elle se rapprocha de moi et me prit par
le bras. « Parle-moi de Nimue.
    — Nimue ?
demandai-je, surpris par la question.

— Sait-elle
vraiment la magie ? » demanda-t-elle avidement. La princesse était
aussi grande que moi et son visage, si beau avec ses pommettes hautes, était
tout près du mien. La proximité de Guenièvre avait quelque chose
d’irrésistible, aussi puissant que le trouble des sens après avoir ingurgité le
breuvage de Mithra. Ses cheveux roux étaient parfumés et ses yeux verts
éblouissants étaient soulignés par de la gomme mêlée à de la suie qui les
faisaient paraître plus grands. « Est-elle une magicienne ?
demanda-t-elle à nouveau.
    — Je le
crois.
    — Tu le
crois ! » Elle recula, visiblement déçue. « Tu le crois
seulement ? »
    Je sentis
palpiter la cicatrice de ma main gauche et ne savais trop que

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